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Coprésidente du Groupe Germain Hospitalité, qui possède les hôtels ALT et les hôtels boutiques Le Germain, Christiane Germain regrette que la question de la générosité soit si peu évoquée dans le milieu des affaires.
Les Affaires - Que signifie la générosité pour vous ?
Christiane Germain - Certains donnent seulement s'ils reçoivent en retour. Mais, pour moi, c'est important de développer une capacité à donner sans penser à ce que cela va nous rapporter. C'est une belle approche de la vie.
La générosité est une façon d'être. Il y a plusieurs moyens de l'exprimer. Un réseau, qu'on a mis 25 ans à construire, n'arrive pas dans une boîte. Le partager avec des gens qui débutent en affaires représente beaucoup.
De nombreuses personnes ont été très généreuses avec moi quand j'ai commencé. Elles m'ont ouvert des portes extraordinaires. J'ai été chanceuse, car ce n'est vraiment pas rien. Il ne faut pas banaliser ce geste, puisqu'elles n'étaient pas obligées de le faire.
L.A. - Quel est l'intérêt de se montrer généreux en affaires ?
C.G. - On ne fait pas fausse route en essayant d'être plus généreux avec ses employés comme avec ses clients. Ce sont de petites choses qui font que la générosité flotte dans l'air.
Cela améliore la qualité de son produit, parce que cela se ressent dans le service qu'on donne au client. Je ne cherche pas à gérer un OSBL, mais je veux avoir le meilleur rapport qualité-prix possible pour que les gens qui viennent chez nous en aient pour leur argent. Les clients satisfaits vont revenir.
L.A. - Comment intégrez-vous la générosité dans votre vie de chef d'entreprise ?
C.G. - La générosité est une attitude. Cela peut être aussi de partager une lecture avec ses collègues ou d'aider des employés qui ont besoin d'un coup de main pour traverser une période difficile. Je ne suis pas une mère Teresa. Mais j'essaie d'être à l'écoute de ce qui se passe autour de moi et de voir si je peux donner de petits coups de pouce au quotidien.
C'est important d'être généreux selon ses moyens. Donner de l'argent à des hôpitaux ou à des universités, c'est formidable, mais il y a des PME qui n'ont pas la possibilité de signer de gros chèques. On peut aussi se montrer généreux en consacrant de son temps.
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L.A. - Est-ce toujours facile d'en faire preuve ?
C.G. - Cela m'arrive de donner en pensant recevoir, quand je négocie avec quelqu'un par exemple. Il y a des éléments d'une relation d'affaires qu'il faut bien continuer. J'essaie de garder en tête la notion de générosité, même si je n'y parviens pas tout le temps. Être généreux ne signifie pas être naïf. Je ne confonds pas la notion de profitabilité avec celle de générosité. Les deux peuvent s'opposer, mais on peut trouver un équilibre et faire en sorte que la générosité fasse partie de l'équation. C'est un objectif délicat à atteindre. On peut parfois passer à côté, mais ce n'est pas grave, on peut réessayer !
Le lien entre succès et générosité est trop peu fait dans le milieu des affaires. Je n'ai rien contre l'argent, au contraire, mais ce n'est pas le seul critère de réussite.
L.A. - Pourquoi le monde entrepreneurial ne lui accorde-t-il pas plus d'importance ?
C.G. - On est porté à adopter une vision à court terme, à s'intéresser à ce qui est bien aujourd'hui pour son organisation. Car aujourd'hui, les entreprises, surtout celles qui sont inscrites en Bourse, sont plus évaluées sur le court terme que sur le long terme.
Je suis une personne pragmatique, mais je crois qu'on a avantage à intégrer l'aspect de la générosité dans sa réflexion. À long terme, c'est bénéfique pour les gens comme pour les entreprises. C'est bien plus le fun de rendre les gens heureux !
L.A. - Est-ce une qualité qui se conjugue davantage au féminin dans le monde des affaires ?
C.G. - Nous ne sommes pas nombreuses en affaires, alors la valeur de générosité est encore plus importante. Il faut se serrer les coudes, que ce soit en matière de réseau ou de coups de pouce.
Ce n'est pas parce qu'on est une femme qu'on est automatiquement généreuse. Sans vouloir généraliser, je constate que les femmes d'affaires ont tendance à agir davantage en fonction de ce qu'elles obtiendront en retour. Les femmes sont très tournées vers les résultats, car elles veulent faire en sorte que tout soit parfait. Elles ont dû mal à lâcher prise. Un homme est capable d'aller jouer au golf sans que cela lui soit profitable sur le plan des affaires, mais une femme s'accordera moins souvent le luxe d'y aller pour le plaisir, car elle aura tendance à privilégier ses responsabilités.
Entreprendre au féminin
Dans cette grande série, qui paraît toutes les deux semaines, nous vous présentons le parcours d'entrepreneures de tous horizons, nous examinons des enjeux liés à l'entrepreneuriat féminin, et nous donnons la parole à des personnalités féminines du milieu des affaires québécois.
Présenté par Desjardins, Avec la collaboration de Femmessor, la Caisse de dépôt et placement du Québec et PwC.
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