Plusieurs données économiques indiquent que les investisseurs sont un peu trop optimistes et que les marchés pourraient subir un repli de 10 % à 15 % d’ici trois à six mois, selon Neil Matheson, premier vice-président, stratégie de placement chez Investissements Standard Life.
« Une correction est un risque qui devient de plus en plus élevé, mais ce qui est escompté par le marché est plus faible », indique-t-il à Finance et Investissement. Neil Matheson prévoit que ce repli, qui ne se traduira pas pour autant en tendance baissière, proviendra d'une diminution de l'optimisme ambiant à la suite d'une décélération de l'économie nord-américaine.
Les investisseurs sont actuellement très optimistes parce que l'indice S&P TSX se rapproche de son sommet record de tous les temps, que la croissance économique est solide et que les sociétés affichent de forts bénéfices.
« Il y a neuf mois, on craignait une récession à double creux, les actions étaient déprimées de 15 % à 20 %, les taux d'intérêt à long terme ont chuté jusqu'à 3,5 %. Depuis, les bourses ont augmenté de plus de 20 %. Les taux d'intérêt des obligations de 30 ans ont monté de 3,5 % à 5 %. On est passé d'un extrême à un autre », observe Neil Matheson.
Or, plusieurs chiffres laissent croire à Neil Matheson que les investisseurs font fausse route. « Le marché anticipe que l'économie est en pleine croissance et qu'elle va s'accélérer. Mais (plusieurs facteurs) laissent croire que l'économie va décélérer d'ici six mois », dit-il.
D'abord, les refinancements hypothécaires, un indicateur de la croissance économique aux États-Unis, sont en chute libre, souligne Neil Matheson. Puis, l'augmentation des prix de l'énergie menace réduire les dépenses discrétionnaires des ménages. De plus, on observerait déjà une décélération de la croissance des ventes au détail.
La hausse du prix du pétrole et de la nourriture ne devrait cependant pas engendrer une vague inflationniste aussi prononcée que celle à laquelle s'attendent les investisseurs, selon Neil Matheson.
« Le problème du prix des commodités n'en est pas un d'inflation. S'il y a une augmentation dans le prix du pétrole, c'est comme une taxe, ça prend une partie de l'épargne (des ménages). Pour compenser, ils diminuent leurs dépenses ailleurs, mentionne-t-il. Pour avoir un mouvement important dans l'inflation, il faut voir un mouvement à la hausse de la masse salariale. » Or, aux États-Unis, le taux de chômage est très haut et la croissance du revenu des ménages reste « très faible », selon lui.
Enfin, la Chine resserre le crédit actuellement dans le but de freiner la spéculation immobilière. Si elle réussit et que la construction immobilière diminue, le prix des matières de bases pourrait décliner, entrainant aussi une baisse de l'économie canadienne dont plusieurs entreprises sont fournisseuses des Chinois.
« L'effet chinois est énorme en terme réel et en terme psychologique. Le consommateur de matières premières le plus important au monde, c'est vraiment la Chine », note-t-il.
Nouvelle répartition d'actif
Pour se protéger contre une correction boursière, les clients peuvent modifier peu à peu leur répartition d'actifs pour les six prochains. À court terme, ils peuvent d'abord se garder plus d'argent comptant.
« On surpondère toujours les actions, mais on vend un peu de nos gagnants depuis quelques mois, comme les pétrolières, les aurifères et les (firmes du secteur des) mines et métaux », mentionne Neil Matheson.
Quant aux obligations, il favorise celles à échéance très longue. « On pense que les taux ont monté de façon excessive. Elles donnent une protection contre la correction du portefeuille d'action canadienne », estime-t-il.