C’est du jamais vu depuis les années 1970. L’an dernier, les prix des matières premières ont globalement bondi de 30%, selon l’indice Cyclope, dévoilé par le rapport homonyme, considéré comme la «bible» des marchés mondiaux. Une ascension «irrationnelle» qui pourrait laisser présager une correction en 2011, selon les experts qui ont signé ce rapport…
«Nous assistons à un véritable choc, le plus important depuis les années 1970», considère Philippe Chalmin, professeur d'histoire économique à Paris-Dauphine et coordinateur du rapport réalisé par une équipe internationale d’économistes, de journalistes et d’experts des matières premières.
Les hausses les plus fortes ont été enregistrées en 2010 pour le caoutchouc (+89%), le coton (+65%), le minerai de fer (+62%), l'étain (+50%) ou le nickel (+49%). Le cuivre, que la Chine consomme avec avidité, a pour sa part atteint un record, à 10 000 dollars américains la tonne (+46%).
Les céréales ont aussi progressé en 2010, le maïs prenant 15% et le blé en Europe 26%. Seul le prix du riz a reculé, de 10%, grâce à une hausse de la production mondiale. Il n'y a pas de risque de pénurie, mais on assiste indéniablement à une augmentation de la demande mondiale et à une baisse des stocks. Tout cela n'est pas très sain, commente François Luguenot, l'un des rédacteurs du rapport et spécialiste des matières premières agricoles.
Quant au café, son cours a grimpé de 27%. Les principaux pays producteurs latino-américains comme le Brésil, la Colombie ou le Mexique ont connu de mauvaises conditions météorologiques qui ont fait craindre une baisse des récoltes.
Enfin, dans le secteur de l'énergie, si le pétrole a fait preuve de stabilité autour des 80 dollars américains le baril avec de légères tensions sur les derniers mois de 2010, le marché du charbon a connu une fin d'année tendue, en raison notamment des inondations qui ont affecté le Queensland (Australie), premier exportateur mondial de charbon à coke.
Maintenant, à quoi s’attendre pour 2011? Sur un certain nombre de marchés, comme le coton ou les métaux, nous faisons face à des prix irrationnels par rapport à la demande, souligne M. Chalmin, qui estime qu'une correction devrait s'opérer cette année.
La Chine, premier importateur mondial du soja aux minerais de fer, pourrait aussi être tentée, afin de contenir l'inflation galopante et la flambée de l'immobilier, de ralentir sa croissance et d'être de ce fait moins gourmande, ce qui offrirait une détente sur les cours.
Enfin, le dollar américain pourrait reprendre de la vigueur face à la monnaie européenne, pénalisée par les dettes très importantes de certains pays de la zone euro aux premiers rangs desquels la Grèce ou le Portugal. Un dollar américain plus fort fera logiquement baisser les prix, d’après M. Chalmin.
Avec AFP.