Assouplissements monétaires à la chaîne, prêts massifs aux banques, achat d'obligations de pays en difficulté: les banques centrales tiennent les économies occidentales à bout de bras, au risque de déstabiliser les systèmes financiers et sociaux.
Donnant le coup d'envoi jeudi de l'assemblée générale du FMI, sa directrice générale, Christine Lagarde, a mis en avant les récentes «bonnes décisions» des banques centrales.
«Elles ont envoyé des signaux forts que ce soit la banque centrale américaine (Fed), la Banque centrale européenne (BCE), la Banque d'Angleterre ou la Banque du Japon (BoJ)», a-t-elle énuméré.
Mi-septembre, la Fed a lancé un programme faramineux de 40 G$US par mois, prévoyant le rachat de titres adossés à des créances immobilières.
Les banques centrales d'Angleterre et du Japon ont, chacune de leur côté, augmenté ces derniers mois le montant de leurs acquisitions d'actifs au coeur de leur politique d'assouplissement monétaire, avec des enveloppes portées à l'équivalent de 602G$ US et de 1033 G$US.
Quant à la Banque centrale européenne (BCE), elle annonçait avec fracas début septembre un programme illimité d'achat d'obligations d'Etat pour apaiser les tensions sur les taux d'intérêt des pays en difficulté de la zone euro.
Les félicitations de Mme Lagarde cachent pourtant de solides divergences au sein du conseil d'administration du FMI sur l'opportunité de ces mesures.
Troubles en vue
Troubles en vue
Lors d'une récente réunion, plusieurs directeurs ont souligné que «des assouplissements monétaires prolongés pourraient entraîner des troubles économiques et financiers et susciter des flots de capitaux déstabilisateurs pour les autres régions».
Ils ont aussi évoqué «des effets limités» de ces politiques monétaires pour doper la croissance qui reste atone dans les pays développés, dont les gouvernements sont actuellement occupés par leur réélection (Etats-Unis) ou la lutte contre les déficits (Europe).
Au Japon, la BoJ peine par exemple depuis trois ans à sortir l'archipel de la déflation malgré une politique monétaire ultra-accommodante.
«Tout le monde comprend que ce n'est pas la panacée, comme le président de la Fed Ben Bernanke l'a lui-même souligné. La question est maintenant de savoir comment nous allons reconstruire l'économie», a reconnu jeudi le gouverneur de la banque du Japon, Masaaki Shirakawa.
Mais au-delà des effets limités, certains pays émergents sont nettement plus critiques et évoquent les dommages que les décisions des banques centrales provoquent à leurs économies.
Guerre des monnaies
Guerre des monnaies
A Tokyo, le ministre brésilien des Finances, Guido Mantega, a ainsi renouvelé jeudi ses attaques contre la la Fed américaine .
«Il est évident que si vous pratiquez une politique monétaire accommodante pendant dix ans, à un certain moment vous allez obtenir des résultats, mais les effets collatéraux seront peut-être pire que les résultats directs», a-t-il dénoncé, pointant «une dévaluation du dollar qui favorise la guerre des monnaies, parce que les autres pays répondent exactement de la manière».
Du côté des organisations de la société civile ou de salariés, les critiques sont encore plus virulentes, notamment vis-à-vis de la BCE accusée d'être déconnectée des réalités économiques et sociales que ses décisions entraînent.
«Elles ne sont pas assez soumises à la pression démocratique», estime Sargon Nissan, économiste à l'association Bretton Woods Project, une ONG qui surveille les politiques des grandes institutions financières inernationales.