Quel va être l’un des grands gagnants de l’année 2011? Vraisemblablement le billet vert, selon les prévisions d’Études économiques Desjardins.
Pour bien comprendre le phénomène qui devrait se produire, il convient de revenir sur ce qui s’est passé durant la récession de 2008-2009. Les investisseurs qui présentaient une plus grande aversion au risque se sont alors massivement tournés vers des actifs libellés en dollars américains, ce qui a avantagé le billet vert par rapport à la plupart des autres devises. Maintenant que le gros de la tempête est derrière nous et que les investisseurs renouent graduellement avec des placements plus risqués, souvent dans d’autres monnaies, c’est le processus inverse qui devrait se produire.
Mais voilà, les étoiles ne sont pas toutes alignées pour une dépréciation généralisée du dollar américain en 2011. «Même si la croissance économique américaine sera au rendez-vous, elle demeurera plus modeste que ce qu’elle a été lors des précédentes phases de reprise», estiment François Dupuis, vice-président et économiste en chef, et Hendrix Vachon, économiste sénior, d’Études économiques Desjardins.
Du coup, il ne faut pas s’attendre à un réel retour à la normale en ce qui concerne l’appétit des investisseurs pour le risque. Le début d’année, marqué par la recrudescence des craintes en zone euro, montre bien à quel point les investisseurs restent très nerveux, soulignent-ils.
Un coup de main de la Fed
En fait, ce qui aidera la devise américaine, ce sera surtout la fin du programme quantitatif de la Réserve fédérale (Fed). Cette dernière a annoncé le 3 novembre une seconde vague d’achats de titres du gouvernement américain afin de stimuler l’économie des États-Unis et d’augmenter le taux d’inflation. Dans l’attente de l’annonce officielle de la nouvelle mesure, le billet vert s’était fortement déprécié.
Or, les politiques monétaires quantitatives sous-tendent une offre plus abondante de liquidités et des taux d’intérêt bas pendant une période prolongée. Elles réduisent aussi la confiance des investisseurs envers la devise. il y a alors un risque que l’inflation augmente trop, en cas de dérapage, et que cela cause une perte significative du pouvoir d’achat de la devise. Ce risque dépend cependant de la croissance du crédit découlant de la politique quantitative. «À cet égard, la faible progression de l’encours du crédit aux États-Unis n’est pas inquiétante pour la valeur du dollar américain à court terme», considèrent les deux experts.
Les achats de la Fed devraient se monter à 600 milliards de dollars américains et se terminer en juin prochain. Comme la porte a été laissée ouverte pour augmenter ou diminuer l’acquisition de titres, l’évolution du dollar américain est devenu très sensible à l’état de l’économie aux États-Unis. Comme Desjardins mise sur une poursuite de la croissance économique chez nos voisins du Sud au cours des prochains trimestres, «mais sans surprise en terme d’ampleur», cela devrait s’avérer suffisant pour faire augmenter graduellement le taux d’inflation et diminuer le taux de chômage. «Dans ce contexte, la Fed ne devrait pas avoir recours à une autre vague d’achats de titres à l’été, et le dollar américain en bénéficiera au fur et à mesure que les investisseurs s’en convaincront», affirment MM. Dupuis et Vachon.
Le huard soumis à différentes pressions
Quelle conséquence pour le huard? Il pourrait perdre quelques cents à court terme, «vu que la Banque du Canada demeurera sur les lignes de côté pendant quelques mois encore et qu’une légère correction est anticipée du côté des prix du pétrole au premier trimestre». Le contexte redeviendra toutefois favorable à la devise canadienne au fur et à mesure que l’année avancera, affirment-ils.
Le dollar canadien se maintient au-dessus de la parité avec le billet vert depuis le début de l’année. Il a même atteint un sommet de 32 mois, à 1,0165 dollar américain, le 18 janvier.
Comment expliquer cela? La parité a surtout été atteinte parce que la devise canadienne était soutenur par les cours élevés des matières premières, en particulier ceux du pétrole. La relation historique entre le taux de change canadien et les prix du pétrole montre que la parité avec le billet vert est soutenable lorsque les prix de l’or noir se maintiennent à plus de 85 dollars américains le baril, comme c’est le cas actuellement. Ce sont cependant surtout des facteurs temporaires qui maintiennent les cours pétroliers à plus de 90 dollars le baril pour l’instant. Même si des statistiques économiques encourageantes ont été publiées aux États-Unis en début d’année, cela n’est pas suffisant pour appréhender une pénurie de pétrole cette année.