Alan Greenspan, l’ancien dirigeant de la Réserve fédérale américaine, vient d’exposer sa vision des choses quant à une possible bulle sur les marchés boursiers nord-américains. Verdict : la bulle n’est pas là, pour le moment...
Alors que le S&P 500 et le Dow sont à des niveaux record et que le Nasdaq culmine à un sommet inégalé depuis l’éclatement de la bulle des points-com, il est inévitable que les acteurs de marché envisagent des scénarios noirs. À cet égard, l’ancien responsable de la Fed, Alan Greenspan, vient de trancher.
Selon M. Greenspan, les marchés boursiers des États-Unis n’approchent pas encore le territoire d’une bulle. «Ça n’a pas les caractéristiques, à mon avis, d’une bulle des marchés boursiers», a-t-il dit lors d’une entrevue à Bloomberg Television qui devrait être diffusée cette fin de semaine. «Ça pourrait devenir une bulle, mais je ne vois pas de bulle en ce moment», poursuit-il.
Alan Greenspan est passé maître dans l’expertise des bulles financières. Ce dernier a eu un rôle crucial dans la sortie de crise des deux bulles les plus spectaculaires des temps modernes, soit la bulle des technos dont le mouvement haussier a commencé en 1990 et celle du crédit et de l’immobilier démarrée en 2000.
Durant la présidence de Greenspan, les professionnels des marchés avaient pris l’habitude de parler de «Greenspan put» [dans l’univers des produits financiers dérivés, un put ou option de vente peut jouer le rôle d’une assurance pour l’investisseur détenant des positions longues en portefeuille NDLR], soit une confiance communément partagée que la banque centrale américaine interviendrait pour secourir les marchés au besoin en coupant agressivement les taux d’intérêt. De nos jours, nous assistons à un «Bernanke put», et le «Yellen put» semble être un scénario réaliste dans un futur à court-terme.
Alan Greenspan se souvient encore de la grande sagesse dont il avait fait preuve avec ses collègues de la Fed quant au marché haussier de 1990 et sur la durée pendant laquelle cela pourrait continuer. En 1996, Greenspan avait posé sa question devenue célèbre : «Comment pouvons-nous savoir à quel moment l’exubérance irrationnelle a exagérément augmenté la valeur des actifs?». Après avoir hoqueté sur une brève période, le marché a poursuivi son irrationalité sur une période d’environ quatre ans.
Certains observateurs soutiennent que l’économie américaine et mondiale aurait été plutôt tiède sans les bulles qui ont pris naissance sous la surveillance de Greenspan. «Nous savons que l’expansion économique de 2003 à 2007 était conduite par une bulle», a écrit Paul Krugman, lauréat du Nobel et chroniqueur au New York Times, au début novembre. «Vous pouvez dire la même chose pour l’expansion des années 90, ou pour l’expansion sous l’ère Reagan, qui était conduite à cette époque par les banques commerciales (savings and loan) et une grosse bulle sur l’immobilier commercial».
Pour sa part, Larry Summers, qui était le premier choix du président Obama pour succéder à Ben Bernanke, a fait un plaidoyé en faveur de bulles à répétition, afin de soutenir positivement les taux d’intérêt, une forte croissance et un niveau d’emploi élevé.
M. Greenspan ne semble pas être du même avis que Summers et Krugman. Toutefois, la théorie de la croissance par les bulles de M. Summers sera bientôt mise à l’épreuve avec des marchés boursiers grimpant de record en record.