Le dernier bulletin SPIVA (S&P Dow Jones Indices versus Active), pour la période terminée le 30 juin, n'apporte rien de neuf au débat entre les défenseurs de la gestion passive et les apôtres de la gestion active. Sur cinq ans, les résultats demeurent sans équivoque pour toutes les catégories de fonds d'actions canadiennes et étrangères : la majorité des gestionnaires actifs affichent une performance inférieure à leurs indices respectifs.
Ainsi, 19,57 % des fonds d'actions canadiennes gérés activement ont réussi à mieux performer que l'indice composé S&P/TSX. Parmi les fonds d'actions à majorité canadiennes, seulement 10,7 % ont connu une performance supérieure à un indice constitué à 50 % d'actions canadiennes, à 25 % d'actions américaines et à 25 % d'actions internationales. Parmi les fonds d'actions internationales gérés activement, seulement 10 % ont battu leur indice de référence.
La catégorie dans laquelle la gestion active obtient ses meilleurs résultats est celle des fonds d'actions canadiennes de petite et moyenne capitalisation. L'étude SPIVA montre que 35,7 % des fonds gérés activement ont battu l'indice complémentaire S&P/TSX sur cinq ans, et 72 % ont réussi à le battre sur un an. Cet indice moins connu est composé des mêmes titres que l'indice composé S&P/TSX sans les 60 titres de grande capitalisation qui composent le S&P/TSX 60. On se retrouve avec 190 titres dont la capitalisation boursière varie de 167 M$ à 13,6 G$ et dont la médiane est de 1,52 G$.
Une stratégie à l'origine de la réussite
La base de données PALTrak de Morningstar Canada permet de cibler des fonds gérés activement qui ont réussi à maintenir une performance de loin supérieure à cet indice, de façon soutenue. C'est le cas du Fonds Nouveau du Canada Mawer, dirigé par Martin Ferguson, qui affiche une performance annualisée de 17,4 % pour la période 14 ans terminée le 31 décembre 2014, par rapport à 6,6 % pour l'indice complémentaire S&P/TSX. Mais hélas, il n'est plus possible d'y investir, pas plus que dans le BMO Fonds d'entreprise, son clone.
Une brève description de la stratégie de placement permet de mieux comprendre ce succès. Martin Ferguson dit rechercher les blue chips des petites capitalisations. En cela, il se limite aux entreprises possédant un modèle déjà rentable, éliminant du coup celles qui pourraient mettre en marché un nouveau produit ou développer une mine.
Or, en faisant cela, il élimine une bonne partie des titres que l'on retrouve parmi les petites capitalisations canadiennes. C'est que le secteur des matériaux compte pour 34 % de l'indice des titres à petite capitalisation S&P/TSX. Vous y trouvez beaucoup de titres aurifères et autres titres miniers dont le profil financier ne répond guère à ce que Martin Ferguson recherche.
C'est aussi la position de Richard Fortin, cogestionnaire du Fonds de sociétés à microcapitalisation Franklin Bissett, un fonds ayant dégagé un rendement supérieur à son indice de référence depuis son lancement. «Nous ne spéculons pas sur des titres aurifères. Nous ciblons un groupe de 200 entreprises de meilleure qualité qui, en dépit de leur taille, sont bien gérées et rentables, avec un risque relativement inférieur à celui de l'ensemble des titres de petite capitalisation», explique-t-il.
La faible pondération en titres de produits matériels et l'absence de titres énergétiques découlant de son mandat axé sur les PME québécoises ont aussi contribué au rendement de 23,4 %, pour la période de six ans terminée le 31 décembre dernier, du Fonds croissance Québec Banque Nationale, dirigé par Marc Lecavalier.
Les titres industriels et de la consommation discrétionnaire comptent respectivement pour 29,8 % et 21 % du fonds. Un critère récurrent dans le choix des entreprises en portefeuille est leur croissance, non seulement interne, mais par acquisition. Des titres comme Groupe MTY, Stella-Jones, TransForce, Alimentation Couche-Tard, Héroux-Devtek et Groupe WSP Global en sont des exemples.
D'avoir sous-pondéré ou écarté d'un portefeuille pour une raison ou une autre le secteur des produits matériels et de l'énergie s'est avéré une bonne décision. Ces deux secteurs affichent des rendements annualisés de - 6,9 % et de - 3 %, respectivement, pour la période de cinq ans terminée le 31 décembre.
D'ailleurs, la correction de 16,6 % de l'indice complémentaire S&P/TSX entre son sommet du 26 août et son creux du 15 décembre est en bonne partie attribuable aux secteurs des produits matériels et de l'énergie, qui ont respectivement chuté de - 23,1 % et - 41,1 % durant cette période.
Toutefois, cette correction n'a guère touché les petites capitalisations de qualité ; et aujourd'hui, les excellents rendements boursiers des cinq dernières années font qu'elles sont devenues chères et qu'il est de plus en plus difficile de trouver celles qui offrent de la valeur, selon certains gestionnaires. Ainsi, l'encaisse du Fonds de petites sociétés Trimark a graduellement grimpé jusqu'à 30 % au 30 septembre et elle était encore de 25,4 % au 31 décembre. Il serait donc prudent d'abaisser le rendement espéré à l'égard de ces titres pour l'avenir.
Dans un marché baissier, les fonds de petite capitalisation peuvent chuter bien davantage que les grandes. Rappelons que, pour l'année terminée le 31 octobre 2008, l'indice S&P/TSX 60 des grandes capitalisations affichait un rendement de - 31,2 %. Le rendement médian des fonds d'actions canadiennes de petite et moyenne capitalisation était de - 43 % pour la même période.
Le Fonds de petites entreprises Dynamique n'avait reculé que de 18 % pendant cette période, montrant ainsi le caractère défensif du style d'Oscar Belaiche, son gestionnaire depuis 2002. Ce fonds affiche la plus faible volatilité sur 10 ans parmi tous les fonds de sa catégorie.
Outre les fonds cités précédemment, le Fonds d'actions canadiennes pur Cambridge mérite aussi considération, malgré son historique d'un peu moins de quatre ans. Son gestionnaire Brandon Snow compte de solides antécédents, notamment au Fonds Fidelity Grande Capitalisation Canada.
Yves Bourget a fait carrière dans l’industrie des valeurs mobilières pendant une vingtaine d’années, notamment à titre de vice-président pour le Québec de Placements Altamira, de 1990 à 1997. Il collabore depuis 2001 à la publication Finance et Investissement, notamment en matière de fonds communs.