Dans un contexte où le rendement du marché obligataire canadien1 oscille autour de 1,75 %, il peut être tentant d'ajouter au portefeuille des obligations qui offrent à la fois un rendement courant d'intérêt allant de 4 à 5 %, une protection en cas de hausses des taux d'intérêt et un potentiel d'appréciation lié au marché des actions. De sorte que le rendement potentiel de vos titres à revenu fixe puisse atteindre entre 3 et 3,5 %.
C'est ce que peuvent procurer les obligations convertibles (OC), affirme David Stonehouse, gestionnaire du nouveau Fonds d'obligations mondiales convertibles AGF, qui croit que cette participation indirecte au marché des actions générera des rendements intéressants à moyen et à long terme.
Une portion de 10 à 20 % d'un portefeuille allouée aux OC a bonifié le rendement de celui-ci sans en augmenter le risque, pour la période de cinq ans terminée le 30 novembre dernier2.
Comme leur nom le suggère, ces obligations de sociétés sont assorties d'une option de conversion en actions à un cours prédéterminé, qui est toujours plus élevé que le cours de l'action au moment de l'émission de l'obligation.
Prenons une obligation de 1 000 $ convertible en 20 actions au prix de conversion de 50 $ (20 x 50 $ = 1 000 $). Elle est émise lorsque le cours de l'action ordinaire est de 40 $. La plupart des obligations convertibles sont émises à un prix de conversion de 20 à 30 % supérieur au cours actuel de l'action ordinaire.
Supposons que l'action monte à 55 $. Pour trouver la valeur courante approximative de l'obligation, on multiplie d'abord le nombre d'actions dans le ratio de conversion (20) par la différence entre le cours actuel de l'action et le prix de conversion (55 $ - 50 $ = 5 $) pour un produit de 100 $, auquel on ajoute la valeur de l'obligation (1 000 $), pour une valeur de 1 100 $. Quand le cours de l'action dépasse sensiblement le prix de conversion, l'obligation commence à se négocier en suivant le prix de l'action. Mais attention, il y a un «plafond» au gain potentiel : au-delà d'un certain prix de l'action, la société pourrait forcer la conversion de l'obligation en actions.
Si le cours de l'action demeure sous le prix de conversion de 50 $, l'option de conversion a peu de valeur et l'obligation convertible fluctue comme une obligation ordinaire en fonction des taux d'intérêt et de sa cote de crédit. Évidemment, à l'échéance, l'obligation sera remboursée à sa valeur nominale de 1 000 $, assurant une protection à la baisse, à moins de défaillance.
En raison de la valeur de l'option de conversion, les obligations convertibles versent en général un coupon d'intérêt moins élevé que les obligations traditionnelles, réduisant les coûts pour la société émettrice : «Pour certaines entreprises, l'émission d'obligations convertibles est la seule façon d'obtenir des capitaux. Seulement le quart des obligations convertibles est émis par des sociétés dont la cote de crédit est de première qualité3 ; un autre quart est composé de titres à haut rendement, et le reste n'est pas coté», reconnaît David Stonehouse.
Parce que leurs échéances sont plutôt courtes et parce qu'elles peuvent être converties en actions, les prix des OC baissent moins que les obligations traditionnelles lorsque les taux d'intérêt montent. Du 24 juillet 2012 au 31 décembre 2013, le taux des obligations fédérales américaines de 10 ans est passé de 1,39 à 3,03 %, ce qui s'est traduit par un rendement de - 0,2 % des obligations mondiales de qualité supérieure, par rapport à 36,5 % pour les OC.
En fait, aux États-Unis, les fonds d'obligations convertibles ont eu tendance à se comporter comme des versions moins volatiles de fonds d'actions de grande capitalisation : selon les données de Morningstar, la catégorie de fonds d'obligations convertibles affiche une volatilité inférieure à celle de l'indice S&P 500 de 15 % et de 18 %, respectivement, sur des périodes de 10 et 15 ans. De plus, cette catégorie affiche un ratio d'encaissement de hausses de 70,4 % du S&P 500 au cours des cinq dernières années, et de 78,9 % des baisses.
«Dans l'ensemble, une fluctuation de 1 % des actions sous-jacentes se traduit par une fluctuation de 0,50 % dans la valeur de notre fonds», précise David Stonehouse.
Deux FNB d'obligations
Le marché canadien ne compte que pour 3 % des obligations convertibles, et il est concentré dans quatre secteurs : les fiducies de placement immobilier, l'énergie, les matériaux et les services publics comptent pour trois quarts de ce marché. Le marché mondial est beaucoup plus diversifié. Environ 60 % du marché des obligations convertibles est nord-américain, 30 %, européen et 10 %, asiatique.
Deux FNB d'obligations convertibles sont cotés au Canada : le iShares Convertible Bond Index ETF (Tor., CVD) tente de reproduire passivement le rendement d'un indice d'OC d'émetteurs canadiens ; le First Asset Canadian Convertible Bond ETF peut dévier de cet indice à la discrétion du gestionnaire. Ils affichent des ratios de frais de gestion de 0,45 % et de 0,65 %, respectivement. S'ils ont tous deux dégagé des rendements annualisés de 4,14 % sur 3 ans au 31 décembre dernier, c'est en raison des intérêts versés, car leur cours boursier est inférieur à celui de leur lancement.
Lancé en novembre 2012, le fonds Bluebay offert par RBC a dégagé un rendement annualisé de 7,36 % pour les deux années terminées le 31 décembre dernier. Son ratio de frais de gestion est 2,1 %. Les frais du fonds AGF sont de 1,95 %. Aucune série D moins coûteuse n'est offerte pour les investisseurs autonomes.
Il est regrettable de constater une fois de plus l'écart avec les frais pratiqués aux États-Unis : le fonds Vanguard Convertible Securities est géré activement et affiche un ratio de frais de gestion de 0,63 %.
1 Tel que mesuré par l’indice FTSE TMX Canada UniverseXM Bond Index.
2 Selon AGF, à partir de données compilées par Morningstar Direct.
3 La cote BBB est la cote minimale pour qu’une obligation soit considérée comme une obligation de première qualité.
Biographie
Fellow CSI, Yves Bourget a fait carrière dans l’industrie des valeurs mobilières pendant une vingtaine d’années, notamment à titre de vice-président pour le Québec de Placements Altamira, de 1990 à 1997. Il collabore depuis 2001 à la publication Finance et Investissement, notamment en matière de fonds communs.