La faiblesse des taux d'intérêt et la volatilité des Bourses poussent plus d'un investisseur vers de nouvelles solutions de rechange. Parmi celles-ci, les fonds négociés en Bourse (FNB) d'actions privilégiées séduisent un nombre croissant de particuliers, qui veulent accroître la diversification de leur portefeuille et maximiser leur rendement après impôt.
Il existe trois grandes catégories d'actions privilégiées : perpétuelles, à taux variable et à taux révisable. Les actions privilégiées perpétuelles ne comportent aucune date d'échéance et versent un dividende fixe tant qu'elles sont en circulation. Une action privilégiée à taux variable voit le montant du dividende trimestriel versé varier en fonction d'un taux de référence tel que le taux des bons du Trésor américain, tandis qu'une action privilégiée à taux révisable verse un dividende fixe jusqu'à une date de révision où le taux d'intérêt est modifié.
«Les actions privilégiées sont des titres hybrides, entre les actions et les obligations. Elles permettent de générer des revenus constants», explique Ian Gascon, président de Placements Idema, une firme spécialisée dans les FNB.
Dans la structure du capital d'une entreprise, ces titres ont priorité sur les actions ordinaires, mais passent après les obligations. Ils sont donc plus risqués que les obligations, mais moins que les actions.
«Les actions privilégiées ont généralement un risque de crédit plus élevé que les obligations en ce sens que, si une entreprise connaît des problèmes financiers, ses détenteurs d'obligations recouvreront un plus grand pourcentage de la valeur nominale de leur placement que les détenteurs d'actions privilégiées», explique Raymond Kerzerho, directeur de la recherche chez PWL Capital. Les actions privilégiées sont donc des titres qui s'adressent à des investisseurs qui ont un profil plus audacieux. De ce fait, les experts conseillent de se départir d'une partie des actions en portefeuille pour investir dans des titres privilégiés. Ainsi, le risque global du portefeuille ne sera pas augmenté.
Au 31 décembre 2012, les actions privilégiées à taux révisable étaient les favorites des investisseurs canadiens avec une part de marché de 59 %, suivies par les actions privilégiées perpétuelles (34 %) et à taux variable (3 %), selon BMO Marchés des capitaux. Les 4 % restants reviennent aux actions privilégiées à échéance déterminée, qui peuvent être rachetées par l'entreprise émettrice à une date préétablie.
Toutefois, malgré cette préférence pour les titres à taux révisable, le marché des FNB d'actifs privilégiés offerts au pays est dominé par des fonds investissant principalement dans des actions perpétuelles.
Des six FNB d'actions privilégiées qui se négocient à la Bourse de Toronto, un seul est principalement composé de titres à taux révisable, le BMO S&P/TSX Laddered Preferred Share Index ETF (ZPR). On retrouve aussi un seul FNB à taux variable, lancé au début d'octobre dernier, le Horizons Active Floating Rate Preferred Share ETF (HFP).
Les avantages des FNB
Marc Ryan, auteur du site InvestisseurAutonome.info, note que les FNB offrent plusieurs avantages pour un particulier. Premièrement, les FNB permettent d'obtenir une diversification à faible coût. De plus, le marché des actions privilégiées n'est pas toujours liquide, mais un FNB permet d'investir dans un grand nombre de titres sans se soucier de l'impact qu'aura notre ordre d'achat sur le prix de l'actif privilégié.
Enfin, investir dans un FNB permet de bénéficier de l'expertise du gestionnaire de fonds. Autrement dit, un des avantages notoires des FNB est que l'investisseur n'a pas à faire tout le travail de vérification diligente quant au risque de crédit de l'entreprise.
«Dans un FNB, nous n'avons pas le contrôle de nos placements. L'investisseur doit alors davantage s'intéresser aux frais de gestion et à la structure du FNB, c'est-à-dire à la diversification mise en place par le gestionnaire, car le marché des actions privilégiées canadiennes est très concentré dans le secteur financier», dit Ian Gascon.
Sensibilité aux taux d'intérêt
Le comportement des actions privilégiées est comparable à celui des autres titres à revenu fixe, disent les experts. À l'instar des obligations, le prix des actions privilégiées est sensible aux variations des taux d'intérêt.
Parmi les trois catégories d'actions privilégiées, les moins sensibles sont celles à taux variable, car leur taux est révisé généralement tous les trois mois sur la base d'un taux court terme, dit Raymond Kerzerho.
Les actions perpétuelles sont souvent les plus sensibles. «Comme elles sont presque toujours rachetables au gré de l'émetteur à prix fixe à partir du cinquième anniversaire de leur lancement, elles ont tendance à s'apprécier peu lorsque les taux d'intérêt baissent, mais à se déprécier fortement si les taux augmentent de façon importante», prévient M. Kerzerho. Au milieu du spectre, les actions privilégiées à taux révisable ont une sensibilité aux taux d'intérêt significative, mais moindre que celle des actions perpétuelles.
Hors REER
Les actions privilégiées sont particulièrement intéressantes d'un point de vue fiscal, soutient Ian Gascon. En effet, le revenu des actions privilégiées étant un dividende, son imposition est inférieure à celle d'une obligation à coupons. Selon Ian Gascon, bien que les FNB d'actions privilégiées soient admissibles dans les comptes enregistrés tel le REER, la fiscalité avantage les investisseurs qui privilégieront ces placements hors des comptes enregistrés.
Marc Ryan est du même avis. «Avec des actions privilégiées canadiennes, peu importe que l'on investisse dans un REER ou dans un compte non enregistré, l'imposition est minime. Mais si on investit dans notre REER, on gaspille l'avantage fiscal offert aux actions privilégiées», dit Marc Ryan.
Enfin, les FNB totalement investis dans des titres canadiens sont plus intéressants que des FNB qui possèdent des titres américains, pensent les experts. «Les actions privilégiées américaines offrent un dividende qui est imposé selon le même taux que les intérêts [d'obligations], alors pourquoi encourir leur risque de crédit additionnel ?» demande Raymond Kerzerho.