Malgré des investissements de 400 millions de dollars, incluant 200 millions de dollars pour l'achat de fréquences sans-fil en 2008, le deuxième câblodistributeur au pays Shaw Communications fait marche arrière et renonce à déployer son propre réseau sans-fil qui lui aurait permis d'offrir un forfait de quatre services comme le font Rogers, Vidéotron, Bell et Telus.
Le volte-face de Shaw active la machine à spéculation des analystes. Maher Yaghi, analyste de Valeurs mobilères Desjardins, présente quatre possibilités.
L'abandon d'une stratégie sans-fil par Shaw augmente les chances que Rogers Communications mette éventuellement la main sur son rival de l'Ouest, si la famille Shaw qui contrôle l'entreprise se résignait à vendre un jour., croit M. Yaghi.
Pour sa part, Greg MacDonald, de Macquarie Equities Research, croit toujours possible que Shaw et Rogers concluent une entente de partage de réseau sans-fil, probablement lorsque le gouvernement fédéral aura dévoilé les contraintes de la prochaine enchère des fréquences sans-fil, prévue en 2012.
N'ayant plus de sommes massives à investir dans un nouveau réseau, Shaw Communications aura aussi les moyens à nouveau de relever son dividende et de racheter ses actions, deux moyens de procurer un rendement à ses actionnaires, à court terme, disent les deux analystes.
À plus long terme toutefois, M. MacDonald est convaincu que Shaw aura besoin d'une stratégie pour rendre son accès au câble mobile partout. Sans produit mobile, la croissance de Shaw sera entâchée, ce qui pourrait peser sur son titre en Bourse, dit-il.
Le Wi-Fi : le premier pas d'une nouvelle stratégie sans-fil ?
La marche-arrière de Shaw profitera surtout au fournisseur Telus qui, lui, offre déjà des forfaits de quatre services et qui aura un rival de moins à concurrencer. Telus est le titre favori dans les télécommunications de Macquarie et de Canaccord Genuity.
Il est aussi possible, ajoute M. Yaghi, que Shaw attende tout simplement qu'un des nouveaux fournisseurs sans-fil, tel que Wind ou Mobility, connaisse des difficultés financières et y investisse pour avoir un réseau sans-fil, à moindre frais.
Pour sa part, Tim Casey, de BMO Marchés des capitaux, n'est pas impressionné par la décision de Shaw d'implanter des bornes WI-FI dans les plus grandes villes de l'Ouest pour étendre le service Internet et de câble de ses clients existants.
" Aux États-Unis, seulement 20 % des clients de Cablevision se prévalent de son service Wi-Fi ", dit M. Casey.
Le service WI-Fi ne sera pas concurrentiel par rapport aux services sans-fil offerts par Telus, Rogers, Wind et Mobility, dit M. Casey.
Dvai Ghose, de Canaccord Genuity, est plus tranchant. À son avis, un service Wi-Fi qui coûterait 60 millions de dollars à déployer en 2012, est insuffisant pour permettre à Shaw de profiter du boum du téléchargement vidéo.
" L'entreprise fait erreur si elle croit que ses abonnés paieront un surplus pour avoir accès à du contenu exclusif de Shaw à l'extérieur de la maison ", dit-il.
M. Ghose se demande d'où viendra la future croissance de Shaw étant donné la valeur qu'accordent les consommateurs à leur mobilité.
M. MacDonald partage cet avis. " Wi-Fi n'est pas une solution commerciale viable à long terme. Sans solution mobile à offrir, Shaw pourrait perdre des clients à son service de câble de base ", note-t-il.
Par ailleurs, Peter Rhamey, de BMO, croit que l'aveu de Shaw, qui affirme qu'un investissement de presque un milliard de dollars dans son propre réseau sans-fil ne se justifie pas économiquement, augmente les chances qu'Ottawa assouplisse les règles de propriété étrangère des fournisseurs de télécommunications, afin que les nouveaux arrivants obtiennent le capital nécessaire pour concurrencer les fournisseurs établis tels que Bell et Telus, comme le souhaite le gouvernement.
Jeudi le 1er septembre, l'action de Shaw a reculé de 3,6 % à 21,59 $.