Même si Lowe’s et Rona se parlent depuis un an au sujet « d’une éventuelle relation d’affaire », Robert Dutton, grand patron du quincailler québécois, a nié l’existence de ces discussions lors de l’assemblée annuelle des actionnaires tenue en mai dernier.
Pressé de questions par les journalistes, le dirigeant avait alors affirmé qu’il n’y avait pas de discussions avec qui que ce soit, mis à part « les employés et les marchands ».
Excédé par la persistance des rumeurs d’acquisition de l’entreprise qu’il dirige, Robert Dutton avait aussi nié à deux reprises avoir eu d’autres types de lien avec le quincailler américain. « Il n’y a pas de contact à avoir avec Lowe’s », avait-il martelé.
Vous pouvez écouter Robert Dutton répondre aux journalistes en cliquant dans l'encadré à droite (podcast).
Lowe’s affirme pourtant dans un communiqué de presse avoir rencontré la direction de Rona le 27 juillet 2011, à la demande de l’entreprise de Boucherville, pour évaluer différentes options stratégiques.
Robert Dutton n’était pas disponible mardi pour accorder d’entrevue et son service de relations publiques n’a pas voulu nous expliquer ces apparentes contradictions.
Étonné et irrité par les rumeurs
Les deux entreprises auraient notamment tenté de conclure un accord « visant l’acquisition de Rona par Lowe’s ». Une lettre en ce sens avait d’ailleurs été transmise au conseil d’administration de Rona le 15 décembre dernier. Cette missive n’a pas été rendue publique parce qu’elle contenait une clause de confidentialité, a expliqué à LesAffaires.com un porte-parole de Lowe’s. Il a toutefois précisé qu’elle « ressemble beaucoup à celle divulguée par Lowe’s ce matin ».
Toujours selon Lowe’s, le chef de la direction de Rona, Robert Dutton, se serait même « rendu en Caroline du Nord afin de poursuivre les discussions initiales avec Lowe’s».
Quelques mois plus tard, Robert Dutton s’étonnait que des rumeurs d’acquisition circulent et, irrité, il se demandait d’où elles venaient, comme on peut l’entendre dans l’extrait audio. À son avis, ces rumeurs étaient « très dangereuses » parce qu’elles démobilisaient les troupes. Il avait demandé aux actionnaires de l’aider à les faire taire.
Lettres gardées secrètes
On ne sait pas pourquoi Rona a décidé cette semaine de divulguer la teneur de ses discussions avec Lowe’s. Soit plus d’un an après le début des rencontres et six mois après le dépôt de la première offre.
Cette décision a fait en sorte que son acquéreur potentiel a dévoilé de nombreux de détails qui seraient peut-être restés autrement secrets. « Nous vivons avec la décision de Rona [de rendre l’information publique] », a commenté un porte-parole de Lowe’s, au cabinet de relations publiques National.
Les deux « propositions » de son client n’avaient pas été rendues publiques, a-t-il indiqué, parce qu’il ne s’agit pas d’offres d’achat officielles, mais plutôt de « propositions d’engager la discussion ».
La plus récente lettre, datée du 8 juillet et adressée à « Cher Robert », mentionne que Lowe’s est « prêt [à ] acquérir toutes les actions ordinaires émises et en circulation de RONA à raison de 14,50 $ CA par action au comptant » et qu’il s’agit d’une « offre que vos actionnaires devraient trouver attrayante ».
« Nous sommes prêts à aller de l’avant rapidement afin de conclure cette transaction », ajoute-t-on.
À l’Autorité des marchés financiers (AMF), le porte-parole Sylvain Théberge mentionne qu’en vertu du règlement 62-104, une offre devient officielle à partir du moment où les actionnaires ont reçu la « note d’information », un document qui en précise les détails. Ce règlement s’applique aussi aux entreprises américaines qui souhaitent acquérir des sociétés québécoises.
En plus de cette note d’information, l’entreprise doit émettre un communiqué de presse et publier une annonce dans les journaux.
L’entreprise faisant l’objet de l’offre doit pour sa part réagir et préciser si elle recommande ou non l’offre reçue dans un délai de 35 jours.
Les simples discussions ne font pas l’objet d’une obligation légale de divulgation.