Le détaillant de vêtements pour femmes Reitmans (Tor., RET.A, 5,96 $) n’est plus le commerce sans histoire qu’il a si longtemps été.
Pendant que les analystes délaissent un à un le détaillant octogénaire, des amateurs d’aubaines aguerris n’ont pas perdu espoir que la société puisse éventuellement redresser ses ventes et sa rentabilité.
Pour l’exercice qui prendra fin en janver 2015, les deux analystes qui restent prévoient un bénéfice nul. Cela se compare à un bénéfice de pointe de 1,57 $ en janvier 2008.
Reitmans compte en effet plusieurs actionnaires patients dont l’assureur Fairfax Financial (Tor., FFH), ainsi que les gestionnaires de fonds Letko Brosseau, Franklin Bissett Asset Management et Chou Associates.
Depuis décembre 2013, Reitmans multiplie les mesures pour protéger sa rentabilité et ses flux de trésorerie en réaction à l’assaut constant de concurrents mieux positionnés et plus agiles, d’un dollar canadien en chute libre et de la popularité croissante de l’achat en ligne.
La société a notamment charcuté son dividende de 75 %, a renégocié des baux et a supprimé des postes.
À l’assemblée annuelle de juin, Jeremy Reitman a carrément admis qu’il s’agissait de la période la plus difficile qu’il n’ait jamais vu, en plus de 40 ans de carrière.
Un meilleur sentiment d'urgence
Un meilleur sentiment d'urgence
Après une ultime tentative de repositionnement, Reitmans a aussi choisi de fermer d’ici 12 à 18 mois sa chaîne de 117 boutiques Smart Set qui servait le créneau particulièrement volatil des jeunes femmes, depuis 1940.
« Cette décision est un autre signe que les dirigeants sont plus que jamais concentrés sur la rentabilité. Ils jugent qu’il vaut mieux reprendre 71 des 117 des baux de Smart Set et de les convertir à ses autres enseignes », a dit en entrevue Neil Forster, analyste chez Franklin Bissett Asset Management.
M. Forster a confiance que M. Reitman fera tout ce qu’il faut pour préserver les profits du détaillant que sa famille contrôle.
Déjà au deuxième trimestre, dit-il, ses ventes comparables ont augmenté pour la première fois depuis 2011.
Marie-Ève Savard, d’Investissements Standard Life, salue aussi la discipline et le coup de barre plus musclé de Reitmans. « Avec les H&M et Forever 21 et la progression des ventes en ligne, c’était devenu de plus en plus difficile pour Smart Set », indique-t-elle.
Une aubaine ou un piège ?
Une aubaine ou un piège ?
Pourquoi une telle patience ? Parce qu’au cours déprimé actuel, l’action de Reitmans se négocie à valeur d’aubaine et risque peu de chuter davantage, explique M. Forster.
La société dispose notamment d’une encaisse de 166 millions de dollars ou de 2,55 $ par action.
Son dividende diminué procure encore un rendement de 3,4 %.
Son action se négocie aussi tout près de sa valeur comptable tangible, fait-il aussi valoir.
« Quand on prend du recul, on réalise que la société n’a pas besoin de retrouver un rendement sur le capital de 20 % pour rebondir en Bourse », évoque aussi M. Forster.
Mme Savard est partagée entre le potentiel de redressement et l’environnement ultra-concurrentiel qui prévaut pour tous les détaillants pour femmes.
Les investisseurs qui détiennent déjà le titre peuvent le conserver puisque le risque de rechute est mince.
Par contre, un nouvel acheteur devrait attendre de voir des signes plus solides d’amélioration avant de bouger, suggère-t-elle.
Le titre de Reitmans reflète cette ambivalence. Il se situe entre son sommet annuel de 7,05 $ et son plancher annuel de 5,36 $.
Fairfax Financial est aussi reconnu pour sa grande patience, mais l’assureur est aussi souvent intervenu dans le passé pour rescaper des entreprises, dont le détaillant de meubles The Brick.
Pour l’instant, l’assureur dirigé par l’investisseur Prem Watsa semble se contenter de rester un investisseur passif avec un bloc d'actions de 16,4 %. Toutefois, M. Reitman s’est dit ouvert aux suggestions et à du « sang neuf » au conseil, lors de l’assemblée annuelle de juin.