La vente du distributeur de pièces de remplacement automobile Uni-Sélect n’est pas inévitable, assure en entrevue son président, Richard Roy, même si une nouvelle transaction change la donne dans son secteur d'activités.
La question de la vente de la société de Boucherville refait surface après l’annonce de l’achat par l’Américaine Advance Auto Parts (NY, AAP) de General Parts pour 2G$US, qui hissera le rival d’Uni-Sélect devant le leader actuel Autozone (NY, AZO).
Deux analystes estiment en effet que cette transaction toute fraîche et l’appétit et les ressources financières des géants O’Reilly Automotive (NY, ORLY) et Genuine Parts ou NAPA (NY, GPC) rendent une éventuelle offre pour Uni-Sélect presque assurée.
«L’achat par Advance Auto Parts altère le paysage pour tous les acteurs de l’industrie. La concurrence se corse, mais la consolidation a aussi un aspect positif en augmentant la possibilité qu’Uni-Sélect soit elle-même un jour acquise», écrit Leon Aghazarian, de la Financière Banque Nationale.
«Une vente n’est pas inévitable et Uni-Sélect n’est pas à vendre», a déclaré sans hésitation M. Roy.
La consolidation de l’industrie dure depuis longtemps. Uni-Sélect a d’ailleurs été un participant actif en enfilant 70 acquisitions, depuis dix ans, rappelle-t-il.
«Nous sommes partis de zéro et nos ventes américaines atteignent aujourd’hui 1,3 milliard, soit 70 % de notre chiffre d’affaires», a tenu à préciser M. Roy.
Concurrents plus coriaces ou occasions à saisir ?
Benoit Poirier, de Valeurs mobilières Desjardins, craint que les économies d’échelle et le pouvoir d’achat accru des plus gros acteurs de l’industrie rendront la tâche plus difficile pour Uni-Sélect, qui occupe le sixième rang américain.
M. Roy voit évidemment les choses autrement. Advance Auto Parts avait besoin de General Parts pour aller chercher des parts de marché auprès des distributeurs indépendants de pièces qui servent les professionnels de l’industrie. Ce créneau croît en effet d’environ 4 %, alors que celui qui sert les mécaniciens en herbe croît d’un pour cent tout au plus.
Advance Auto Parts perdait aussi des parts de marché auprès des détaillants.
Or, Uni-Sélect réalise déjà 90 % de ses revenus auprès de distributeurs qui servent les professionnels de l’automobile.
De plus, Advanced Auto Parts cherche aussi à percer le marché de la peinture pour automobile qu’Uni-Sélect domine avec un part de marché de 17 % en Amérique du Nord.
Des distributeurs Carquest à recruter
Habitué aux mouvements de son industrie, M. Roy y voit des occasions à saisir pour son entreprise.
Uni-Sélect pourrait par exemple recruter des distributeurs de l’enseigne Carquest de General Parts parmi ceux qui ne veulent pas joindre un groupe axé sur la vente au détail.
Aussi, Uni-Sélect pourrait améliorer ses conditions d’achat auprès de fournisseurs de pièces qui pourraient être évincés de la chaîne d’approvisionnement de la nouvelle Advance Auto Parts.
«Dans ce genre de jeu de domino, il y a toujours des gagnants et des perdants», évoque M. Roy.
Enfin, le généreux prix que paie Advance Auto Parts pour General Parts, soit 9,3 fois son bénéfice d’exploitation, «valide notre décision de ne pas mettre en vente notre division américaine l’été dernier et de la redresser au lieu de la céder à petit prix», ajoute M. Roy.
Uni-Sélect se négocie à un multiple de 7,2 le bénéfice d’exploitation prévu en 2014.
Le potentiel de meilleures marges, en attendant
En attendant la suite des événements, les analystes misent sur le plan de redressement américain d’Uni-Sélect, au cours des 18 prochains mois.
Le plan vise des économies annuelles de 30M$ d'ici la fin de 2014, avec l'élimination de 600 emplois et la fermeture de dizaines de magasins et de centres de distribution.
Constatant les progrès du plan d’actions, M. Aghazarian a récemment haussé de 22$ à 24$ son cours-cible pour Uni-Sélect, sans toutefois en recommander l’achat.
M. Poirier joue de prudence et recommande de conserver le titre, en vue d’un cours-cible de 24$.
«La réalisation du plan stratégique devrait appuyer la valeur d’Uni-Sélect en Bourse, mais nous restons sur les lignes de côté étant donné le contexte encore plus concurrentiel de l’industrie.»
Surtout que l'action d'Uni-Sélect a déjà rebondi de 26% depuis avril sur les promesses du plan d'action.
En septembre, RBC Marchés des capitaux avait ajouté Uni-Sélect à sa liste de titres à faible capitalisation favoris, soit les plus susceptibles de s’apprécier au cours des trois à six prochains mois, avec un gain potentiel d'encore 17%.
La société bénéficiera d’un meilleur multiple d’évaluation en Bourse à mesure que les progrès de sa restructuration amélioreront ses marges d’exploitation au cours des prochains trimestres, avait fait valoir l’analyste Sara O’Brien.
Le deuxième semestre devrait voir les premiers bénéfices du plan d’action de 18 mois dévoilé en juillet, qui a entraîné jusqu'ici des frais de restructuration de 35,2M$.
Une nouvelle offensive de ventes et une plus grande stabilité du progiciel de gestion intégré freinent aussi le déclin des ventes aux États-Unis, sans l’effet des acquisitions.
«La société améliore le taux d’exécution des commandes de ses clients, avec moins d’actif et moins de stocks à financer», explique l'analyste.
En même temps, Uni-Sélect utilise ses flux de trésorerie pour réduire son importante dette, ce qui diminue les craintes concernant le respect des clauses de son financement bancaire.
Le 31 octobre, Uni-Sélect dévoilera les résultats de son troisième trimestre. Ils incluront à la fois des coûts de sa restructuration et ses premiers bienfaits.