C'est un véritable nouveau départ que tente Frank Hennessey, l'expert recruté par Groupe Restaurants Imvescor (IRG, 2 $), pour redresser le franchiseur des restaurants Mikes, Scores et Bâton Rouge.
Son plan de relance ans passe par la rénovation de 100 des 229 restaurants, d'ici trois ans, pour que ses ventes comparables progressent de 3 à 5 % par année, après 2016.
Imvescor investira jusqu'à 50 000 $ par établissement, soit 20 % du coût total des rénovations de chaque restaurant.
«C'est une mesure incitative assez rare. D'habitude, les franchisés rénovent seuls leur restaurant», a expliqué M. Hennessey, en entrevue.
Le gestionnaire qui cumule 27 ans d'expérience chez Cara, Harvey's, Bento Sushi et Darden, doit rebâtir les ponts avec les franchisés après une longue période de conflits et trois ans et demi de déclin des ventes. Un regroupement de 80 d'entre eux avaient d'ailleurs manifesté leur grogne et même retenu les services d'un avocat en 2013 pour contester la gestion de l'ancien président, Denis Richard. «J'ai déjà rencontré Robert Beauregard [un franchisé Mikes de Québec à la tête du regroupement de 80 franchisés mécontents] pour lui dire que je considère les franchisés comme des partenaires. Nos relations sont déjà meilleures», a-t-il confié.
L'amélioration des ventes comparables est au coeur du plan de M. Hennessey qui veut élaguer les menus de 40 % pour que les franchisés concentrent leurs efforts sur les mets qui leur fournissent 80 % de leurs revenus.
Un fonds américain confiant
Adam Wyden, président du fonds new-yorkais ADW Capital Partners et actionnaire d'Imvescor depuis deux ans, croit au redressement. «Le plan d'action, la gouvernance et le pedigree du nouveau président constituent une réelle bouchée de fraîcheur. Il était temps qu'un adulte prenne les choses en mains», a-t-il dit en entrevue, de New York.
L'amateur de franchises juge inconcevable, par exemple, que les dépenses générales, administratives et de soutien aux franchisés atteignent 24 millions de dollars, par rapport à des revenus totaux de 44,9 M$.
Imvescor revoit déjà ses coûts. Le franchiseur rapatrie de Moncton à Montréal les fonctions du siège social et négocie des rabais avec divers fournisseurs, que ce soit pour l'achat d'aliments, de fournitures et d'espace publicitaire.
Le franchiseur refilera ensuite une partie de ses économies aux franchisés. «Avec plus de bénéfices dans leur poche, les franchisés seront plus disposés à rénover», indique M. Wyden.
Déjà, un maître franchisé s'est engagé à rajeunir ses 21 restaurants Mikes, Scores et Bâton Rouge, au coût de 4,5 M$, a souligné M. Hennessey, lors de la première conférence téléphonique d'Imvescor.
L'unique crainte de M. Wyden : ne pas pouvoir profiter du redressement si Entreprises Cara (CAO, 34 $) se pointait avec une offre pour Imvescor afin d'en tirer les bienfaits elle-même. «En tant que société ouverte sans actionnaire de contrôle, nous ne sommes pas à l'abri d'offres, mais Cara ne nous a pas approchés», s'est contenté de dire M. Hennessey de son ex-employeur.
Scores : une enseigne «fatiguée»
La chaîne de restaurants pour la famille Scores est «certainement notre enseigne la plus fatiguée», a reconnu le gestionnaire de 52 ans.
Pour stimuler la fréquentation et stabiliser les ventes, Imvescor fera la promotion de son populaire bar à salades au cours de l'été.
Encore une fois, la stratégie vise à donner aux franchisés le goût de rénover leurs restaurants, ce qui n'a jamais été fait.
M. Hennessey a confiance que son plan de trois ans réussira, tout en admettant qu'il a beaucoup de pain sur la planche pour faire passer son bénéfice d'exploitation à plus de 20 M$ d'ici 2018, par rapport à celui de 15 M$ prévu en 2015.
Les progrès à ce jour l'encouragent. Il donne en exemple la hausse de 10 % des ventes comparables de deux restaurants Bâton Rouge rénovés et celle de 17 % de 13 restaurants Pizza Delight rafraîchis, depuis deux ans.
Trop tôt pour célébrer
Le plan de match et les compétences de M. Hennessey plaisent aussi à Martin Landry, de Valeurs mobilières GMP, mais il n'est pas prêt à crier victoire «tant il y a du travail à abattre».
L'unique analyste à suivre la société ne recommande donc pas encore l'achat du titre, même s'il augmente de 3 % ses prévisions de bénéfice d'exploitation de 2015 et de 7 % celles de 2016.
De surcroît, le titre d'Imvescor a déjà atteint son cours cible de 2 $, soit un multiple de 7 fois le bénéfice d'exploitation de 16,6 M$ et 11 fois le bénéfice de 0,18 $ par action qu'il prévoit pour 2016. M. Landry voit des petits signes d'amélioration : les ventes des restaurants ouverts depuis plus d'un an ont décliné de 0,2 % au deuxième trimestre, leur meilleure performance en sept trimestres. Mikes, Pizza Delight et Bâton Rouge ont accru leurs ventes comparables, tandis que celles de Scores ont diminué 3 %. L'analyste prévoit un repli d'encore 0,2 % des ventes comparables pour l'ensemble de l'exercice 2015, suivi d'un bond de 0,8 % l'an prochain.
Si Imvescor compte le gestionnaire québécois Fiera Capital parmi ses actionnaires (9 % des actions), plusieurs autres sont des fonds américains, dont Grizzly Rock Capital et Aegis Capital.
Deux Américains siègent aussi au conseil d'administration, dont Arnaud Ajdler, directeur général du fonds activiste Engine Capital.
M. Hennessey entend donc consacrer du temps à faire connaître son plan de relance, à commencer par une participation à la conférence organisée par CIBC Marchés mondiaux, le 18 juin.