BLOGUE. Bien des investisseurs ont cette idée fausse que pour faire beaucoup d’argent en bourse, ils se doivent d’investir dans une entreprise qui évolue dans une industrie en forte croissance, voire révolutionnaire. Combien d’investisseurs ont adopté cette idée à la fin des années 90 en croyant que l’Internet allait révolutionner le monde? Ils ont eu raison quant au potentiel révolutionnaire de l’industrie de l’Internet. Quant aux profits de leurs placements dans les titres technologiques, ce fût dans bien des cas une toute autre histoire…
Trop souvent, cette fausse idée de rechercher le prochain Microsoft ou Biochem Pharma incite selon moi les investisseurs à prendre des risques indus. Pourtant, les meilleurs placements à long terme s’avèrent souvent des titres qui évoluent dans des industries qui n’affichent pas nécessairement de forte croissance.
Par exemple, la semaine dernière, j’écrivais un blogue sur une entreprise « mystère » dont le titre s’est apprécié de plus de 3 100 % depuis 2000 – il s’agit bien évidemment de Stella-Jones. Cette entreprise est un leader dans la fabrication de poteaux et de traverses de chemin de fer en bois traité. On est bien loin de l’Internet ou d’une industrie révolutionnaire! On parle plutôt d’une industrie mature qui existe depuis de nombreuses décennies et qui, bon an mal an, poursuit sa progression, alimentée en grande partie par une demande récurrente provenant de la nécessité d’entretenir les réseaux ferroviaire et de services publics existants.
Votre épicier de quartier
Votre épicier de quartier
Un autre exemple percutant est celui de Metro, la chaîne d’épiceries québécoise. Depuis la venue de M. Pierre Lessard à la barre de l’entreprise en 1990, alors que l’entreprise était en difficultés financières, Metro n’a cessé d’améliorer sa performance financière. D’une perte enregistrée en 1990, la société a renoué avec la rentabilité dès 1991 et a depuis augmenté ses profits par action à chaque année, à l’exception de 2008. De 1991 à 2012, ses profits par action ont augmenté à un taux annuel composé de 20,1 %. Pendant cette période, la valeur du titre a été multipliée par près de 76 en 22 ans (sans tenir compte des dividendes)! Et pourtant, on ne peut pas dire que l’industrie de l’alimentation en soit une de croissance. En plus d’être mature, cette industrie fait face à une concurrence féroce et croissante depuis de nombreuses années.
Un autre bel exemple québécois est le titre de Quincaillerie Richelieu, un distributeur de quincaillerie spécialisée pour l’industrie de la rénovation et des fabricants de meubles. Encore une fois, on ne parle pas ici d’une industrie de croissance, encore moins révolutionnaire! Pourtant, Richelieu a su augmenter ses profits par action de 0,16 $ en 1995 à 2,28 $ en 2011, un taux de croissance annuel composé de 16,6 %. La valeur de son titre depuis sa venue en bourse en 1993 a été multipliée par 16, pour un rendement annuel composé de 15,7 %, sans tenir compte des dividendes.
Petit train va loin
Petit train va loin
Un autre exemple? Canadien National, le transporteur ferroviaire bien connu. Encore là, son industrie est mature. Pourtant, la société a su augmenter ses profits 0,91 $ en 1997 à 4,84 $ en 2011, un taux de croissance annuel composé de 12,7 %. Depuis sa venue en bourse en 1995 à un prix équivalent à 4,50 $, la valeur de son titre a été multipliée par 19.
À mon avis, ces exemples démontrent bien qu’il n’est vraiment pas nécessaire de trouver la prochaine révolution technologique pour faire de l’argent en bourse. Si en plus, on tient compte du niveau de risque lié à la plupart des innovations technologies, il me paraît évident que c’est davantage du côté des sociétés bien établies dans des industries matures qu’un investisseur devrait chercher des occasions de s’enrichir.
Je serais heureux de connaître d’autres exemples d’entreprises qui ont enrichi leurs actionnaires alors qu’elles oeuvrent dans des industries matures.
Philippe Le Blanc, CFA, MBA
À propos de ce blogue : Philippe Le Blanc est gestionnaire de portefeuille chez COTE 100 – www.cote100.com – et éditeur de la Lettre financière COTE 100 – www.lettrecote100.com. COTE 100 détient des actions des sociétés citées dans ses portefeuilles sous gestion.