La France est en train d'innover en matière de management. Le gouvernement Hollande a en effet décidé de mettre au point le "compte pénibilité". Le compte pénibilité? Il s'agit d'un système permettant aux salariés des entreprises privées de bénéficier, le cas échéant, d'avantages en guise de compensation pour leur travail à caractère pénible.
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Ainsi, les personnes qui travaillent de nuit, qui doivent accomplir des tâches répétitives, ou encore qui sont exposées au bruit pourront accumuler des points. Ces derniers pourront, par la suite, être convertis en formation professionnelle, en possibilité de ne travailler qu'à temps partiel, ou bien en possibilité de partir plus tôt à la retraite. Cette nouveauté devrait entrer en vigueur en 2016, d'après une récente annonce du premier ministre Manuel Valls.
Maintenant, vous me demanderez : «Oui, mais c'est quoi, au juste, un travail pénible?». Et je vais vous donner la réponse, à l'aide d'un document interne au gouvernement français, à savoir une note de service rédigée par Michel de Virville, conseiller-maître à la Cour des comptes. Celle-ci décrit en effet les 10 facteurs de pénibilité physiologique qui permettront d'engranger des points, année après année. Les voici détaillés :
1. Déplacer des charges lourdes. Cela concerne les salariés qui doivent lever ou porter des charges de 15 kg ou plus, ou qui doivent pousser ou tirer des poids de 250 kg. Et ce, pendant au moins 600 heures par an. Sont également concernés ceux qui doivent manipuler plus de 7,5 tonnes d'objets par jour durant au minimum 120 jours par an.
2. Adopter une posture pénible. Cela survient lorsqu'on travaille accroupi, à genoux ou les bras au-dessus des épaules. Également lorsqu'on doit faire des torsions du torse de plus de 30 degrés ou des fléchissements du torse de plus de 45 degrés. Et ce, durant au moins 900 heures par an.
3. Subir des vibrations mécaniques. Cela correspond à l'utilisation, par exemple, de marteaux-piqueurs ou d'autres engins de chantier. Ces outils doivent entraîner des mouvements des mains d'au moins 2,5 m/s2 ou des bras de 0,5 m/s2, pour une durée d'au moins 450 heures par an.
4. Être exposé à des agents chimiques dangereux. Il s'agit là d'exposition à des produits reconnus comme dangereux, d'après une liste établie par le ministère de la Santé. S'y ajoutent la poussière et la fumée.
5. Œuvrer en milieu hyperbare. Cela se produit lorsqu'on travaille en milieu sous-marin. Il faut qu'il y ait au moins 60 interventions ou travaux par an à plus de 1 200 hectopascals.
6. Travailler à des températures extrêmes. Soit lorsqu'on travaille dans les températures inférieures à 5 degrés Celsius ou supérieures à 30 degrés Celsius. Et ce, durant au moins 900 heures par an.
7. Supporter du bruit. On parle de bruit dès lors qu'il s'agit de sons quotidiens d'au moins 80 décibels, ou, de manière ponctuelle (au moins 600 heures par an), d'au moins 135 décibels.
8. Travailler de nuit. Cela concerne ceux qui doivent travailler au moins une heure entre minuit et 5h du matin. Et ce, durant au moins 120 jours par an.
9. Travailler en équipes alternantes de manière atypique. Cela vise ceux qui ont des horaires de travail variables impliquant des périodes de nuit. Cette situation doit survenir au moins 50 jours par an.
10. Effectuer des tâches répétitives. Par tâches répétitives, on entend ici la répétition de mêmes gestes à une cadence imposée. Ces gestes-là doivent revenir au moins une fois par minute. Et ce, pendant au moins 900 heures par an.
Quelqu'un qui entre dans l'une de ces catégories obtiendra 4 points par an, et 8 points s'il entre dans plusieurs de celles-ci. On ne pourra pas, tout au long de sa vie professionnelle, accumuler plus de 100 points.
Les 20 premiers points obtenus devront nécessairement être convertis en formation, sachant que 2 points permettront d'obtenir 40 heures de formation. Par la suite, les autres points pourront être dédiés à l'obtention de temps partiel (10 points payent un trimestre à mi-temps), ou bien permettre de partir plus tôt à la retraite (10 points équivalent à un trimestre).
Voilà. Vous êtes maintenant en mesure d'établir si votre travail est vraiment pénible, ou pas. Du moins sur le plan physiologique. Sachez qu'en France 1 employé du privé sur 5 est susceptible de pouvoir obtenir un compte pénibilité.
En passant, le poète français Nicolas Boileau a dit dans ses Épîtres : «Le pénible fardeau de n'avoir rien à faire».
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