BLOGUE. Entre nous, trouvez-vous que vous avez une belle apparence? Oui, j’ai bien dit «apparence». Je ne parle pas de la beauté, à savoir essentiellement des traits de votre visage. Mais bel et bien de votre apparence, c’est-à-dire de votre silhouette, de votre style vestimentaire, de la façon de vous tenir, etc.
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Vous me direz : «Pourquoi se poser la question? Qu’est-ce que ça peut bien faire? D’autant plus que notre apparence n’est, tout compte fait, que le reflet du regard que les autres portent sur nous…» Eh bien justement, c’est là que réside l’importance de cette interrogation : le regard d’autrui joue un rôle primordial dans notre existence, même si l’on refuse de le réaliser. Un exemple frappant : le simple regard que porte votre boss sur vous a déterminé le niveau de votre hausse salariale du mois dernier, et déterminera vos prochaines révisions salariales!
Comment puis-je être aussi affirmatif? Parce que je m’appuie sur une étude passionnante sur ce sujet, intitulée Links between physical appearance and wage discrimination : Further evidence. Celle-ci est signée par trois professeurs d’économie, à savoir Paulo Loureiro, de l’University of Brasilia (Brésil), ainsi que Adolfo Sachsida et Mario Jorge Cardoso de Mendoça, tous deux de l’Institute of Applied Economic Research (Brésil). Elle montre que certaines caractéristiques physiques peuvent alors jouer en votre défaveur…
Les trois chercheurs brésiliens se sont, dans un premier temps, intéressé à la notion de beauté et à l’impact que celle-ci peut avoir dans notre vie économique. Ils ont mis la main sur de multiples études, comme celle d’Averett et Korenman (1996) qui indiquait les femmes obèses étaient discriminées sur le plan salarial, ou encore comme celle de Persico, Postlewaite et Silverman (2004) qui mettait au jour le fait que les revenus d’une personne étaient corrélés à sa taille. Et ils en ont déniché une qui faisait référence en la matière, celle de Hamermesh et Biddle (1994), qui disait que la discrimination salariale ne découlait pas que du sexe et de la race, mais aussi de la beauté.
La beauté? Un concept un peu trop flou, au goût des trois chercheurs brésiliens. De fait, «on ne peut pas limiter cette notion aux traits du visage», comme l’ont fait Hamermesh et Biddle, et «ce critère est trop subjectif et fluctuant au gré du temps pour être véritablement pertinent», indiquent-ils dans leur étude. D’où leur idée de s’intéresser plutôt à l’apparence.
Là encore, vous me direz : «Mais c’est quoi, l’apparence?» Les trois professeurs d’économie ont considéré différents critères pour la déterminer – le poids, la taille et les défauts physiques flagrants (dentition, calvitie, élocution, etc.) – et se sont intéressés à la combinaison des trois. Ils entendaient voir si l’un de ces critères, et même la combinaison de plusieurs, pouvait jouer en défaveur d’une personne sur le plan salarial.
Pour cela, ils ont utilisé une base de données très intéressante : les réponses de 686 personnes interrogées en octobre 2009 à Brasilia, la capitale du Brésil, à propos de leur travail et de leur apparence physique. Et ils ont regardé, à l’aide de multiples calculs économétriques, quels points étaient corrélés entre eux.
Résultats? Attendez-vous à quelque surprises…
Ce qui nuit le plus à vos revenus est, par ordre d’importance :
1. Un handicap physique, même mineur;
2. Un problème de dentition;
3. La maigreur, c’est-à-dire un poids visiblement inférieur à ce qu’il devrait être;
4. La petitesse, à savoir une taille nettement plus petite que la moyenne.
«Contrairement à d’autres études, nous n’avons pas trouvé de corrélation avec l’obésité, ou encore avec la calvitie», notent les trois chercheurs. Et d’ajouter : «La plupart des discriminants de notre liste peuvent être expliqués par le fait que l’employeur y voit un signe de mauvaise santé, et donc de productivité potentiellement moindre que celle des autres».
Par conséquent, l’important semble être d’envoyer aux autres le signal que nous sommes en pleine forme. Pas besoin de se ruiner pour avoir des tenues dernier cri, ni de s’acharner à faire un régime pour perdre toujours plus de poids. Non, un simple sourire, du moins un beau sourire, peut suffire. Ou encore, de l’allant dans notre silhouette, pour donner l’illusion que nous sommes plus dynamiques que nous ne le sommes en réalité, et le tour est joué!
D’ailleurs, le sculpteur suisse Alberto Giacometti a lancé à ce sujet, un jour : «Tout n’est qu’apparence, non?»…
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