BLOGUE. Une idée neuve? Et ça y est, une étincelle jaillit des yeux de vos collègues et de votre boss, soit parce qu'elle est géniale, soit parce qu'elle déclenche chez eux une autre idée, encore meilleure. Tout le monde a déjà vécu ça, en brainstorming, n'est-ce pas? Euh… eh bien, disons, plus ou moins.
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Pourquoi, plus ou moins? Parce que tout le monde n'est pas, semble-t-il, doué pour trouver des idées neuves : certains en pondent comme ils respirent, et d'autres, à raison de deux ou trois par an, et encore, quand c'est une année faste pour eux. Mais surtout, tous les milieux de travail, semble-t-il toujours, n'ont pas la même ouverture à l'innovation. Car, disons que les idées neuves présentent le défaut de bousculer les idées reçues, et donc de déranger l'ordre établi. Vous voyez sûrement ce que je veux dire…
Mais voilà, il ne s'agit là que d'impressions, juste de "semble-t-il". Y aurait-il moyen de s'assurer de la pertinence de celles-ci, d'après vous? La réponse : «Oui». Grâce à une étude intitulée Fire in the belly? Employee motives and innovative performance in startups versus established firms. Celle-ci est le fruit du travail d'Henry Sauermann, professeur de management stratégique à Georgia Tech (États-Unis). Elle indique ce qui fait que certains employés sont plus prompts à avoir des idées neuves au travail que d'autres, et surtout, elle met au jour deux trucs pratiques permettant de booster l'émergence d'idées neuves au sein de votre équipe.
Le chercheur a procédé d'une manière on ne peut plus simple pour découvrir tout cela. Il a demandé à la National Science Foundation de lui donner l'accès à sa base de données dénommée Scientists and engineers statistical data system (Sestat), et a eu le feu vert. Il s'est alors intéressé au profil de 10 750 personnes enregistrées en 2003 dans cette base de données, qui avaient toutes des diplômes universitaires, étaient toutes scientifiques ou ingénieurs et étaient employées à temps plein dans des firmes œuvrant dans différents secteurs économiques (informatique, aérospatiale, télécommunications, chimie, pharmaceutique, etc.).
Toutes ces personnes ont été directement contactées pour répondre à une multitude de questions, auxquelles elles ont répondu par courriel, par téléphone ou par une rencontre en tête-à-tête. Les questions portaient essentiellement sur :
> L'employeur : chaque participant devait indiquer la taille de l'entreprise en termes d'employés, l'année de sa fondation, etc.
> L'innovation : chaque participant devait indiquer le nombre de brevets scientifiques qu'il avait déposé durant les cinq dernières années.
> La motivation : chaque participant devait indiquer les facteurs qui le motivaient à travailler, comme le salaire, la sécurité d'emploi, le défi intellectuel, le degré d'indépendance et le degré de responsabilités.
> Les compétences : chaque participant devait enfin indiquer le détail des diplômes qu'il avait obtenus, histoire d'identifier les domaines qu'il maîtrisait le plus.
Puis, M. Sauermann est parti à la chasse des éventuelles corrélations entre toutes ces données. Résultat? De très belles prises, à mon avis…
> Avantage aux start-ups. Les employés des start-ups innovent plus que ceux qui travaillent dans des entreprises dîtes établies.
> Divergence des motivations. Les employés de start-ups sont nettement plus motivés à travailler que les autres par le fait d'assumer des responsabilités, de relever des défis et de jouir d'une grande autonomie dans l'accomplissement de leurs tâches.
> Sécurité d'emploi. Les employés des start-ups se soucient fort peu de la sécurité d'emploi.
D'où la conclusion suivante tirée par le professeur de management stratégique de Georgia Tech : «La recherche de l'argent et des autres incitatifs traditionnels ne sont pas ce qui caractérise les employés doués pour l'innovation, c'est plutôt leur tolérance au risque», dit-il.
Autrement dit, plus on est tolérant au risque, plus on innove. C'est aussi bête que ça.
Quelles implications cette trouvaille a-t-elle pour votre quotidien? Plusieurs, bien entendu, mais je vais me contenter d'en mettre deux en évidence :
1. Encouragez la prise de risque. L'idéal pour que les employés émettent des idées neuves, c'est que cela ne leur occasionne aucun tort. Il convient donc d'indiquer à tout un chacun que les idées neuves sont les bienvenues, et surtout qu'elles sont sans danger pour son émetteur, même si leur application éventuelle amènerait des changements conséquents dans le train-train quotidien de l'équipe ou de l'entreprise. Il faut aussi souligner que l'échec est toléré, à condition, bien sûr, qu'il ne se répète pas trop souvent.
2. Inspirez-vous du modèle des start-ups. Si vous évoluez dans une entreprise "établie", votre innovation n'est de toute évidence pas optimale, en ce sens qu'elle n'est pas aussi bouillonnante que dans une start-up. Une idée peut donc être de créer une cellule spéciale composée d'employés doués pour innover et chargée d'émettre des idées neuves à l'image de ce qui se fait au sein des start-ups. Bref, une cellule un peu "à part", mais en réalité "au cœur" de l'innovation de l'ensemble des équipes de votre organisation.
En passant, le compositeur américain John Cage aimait à dire : «Je ne comprends pas pourquoi les gens ont peur des idées neuves. Moi, j'ai peur des vieilles idées».
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