La bourde. La fameuse bourde qui vous aviez la hantise de commettre au travail. Vous venez de la commettre. Et depuis, vous vous en mordez les doigts jusqu’au sang. La question vous taraude, jour après jour, heure après heure, minute après minute : «Vais-je pouvoir m’en remettre, un jour ?». Une question lancinante, usante, exténuante même, parce que sans réponse à vos yeux…
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Bon. Maintenant, asseyez-vous bien.
Car j’ai une information fondamentale à partager avec vous, que vous veniez de faire une bourde monumentale ou que vous craigniez d’en faire une, un jour prochain. Cette information, je l’ai dénichée dans une étude intitulée The career effects of scandal : Evidence from scientific retractions et signée par deux professeurs de l’École de management MIT Sloan à Cambridge (Etats-Unis) – Pierre Azoulay (management) et Alessandro Bonatti (économie), assistés de leur étudiant Joshua Krieger. Elle devrait vous intéresser au plus haut point…
Les trois chercheurs se sont plongé dans une riche base de données, celle l’Association of American Medical Colleges, qui compile toutes sortes d’informations sur les chercheurs universitaires spécialisés dans les sciences biomédicales. Ils se sont intéressé en particulier aux 376 chercheurs établis aux Etats-Unis qui ont été contraints, entre 1980 et 2009, de retirer un ou plusieurs articles qu’ils avaient rédigé, à la suite d’un faux-pas professionnel. Un faux-pas ? Celui-ci peut prendre deux aspects :
> Le faux-pas involontaire. Il s’agit d’une erreur lourde de conséquences (une erreur de calcul, une erreur d’échantillonnage,…).
> Le faux-pas volontaire. Il s’agit ici d’une conduite inacceptable (un plagiat, une fraude,…).
Ils ont ensuite analysé les conséquences de chaque faux-pas effectués par ces centaines de chercheurs sur leur carrière. Et ce, à travers le prisme de l’impact qu’ont eu leurs articles par la suite.
Résultats ? Les voici :
> Une confiance érodée. En général, les articles des chercheurs qui ont commis un faux-pas connaissent une chute de 10% du nombre de citations par leurs pairs par rapport à ceux qui n’ont jamais commis de faux-pas. C’est-à-dire que la communauté des chercheurs leur fait nettement moins confiance, au point de ne plus guère s’appuyer sur leurs travaux pour enregistrer des progrès dans leur domaine. Bref, la confiance est gravement érodée : «Les pairs considèrent dès lors leur travail comme irrémédiablement médiocre», soulignent les trois chercheurs dans leur étude. Et ce, quel que soit le type de faux-pas commis.
> Un facteur aggravant. Les chercheurs expérimentés – comprendre ceux qui jouissaient jusqu’alors d’une bonne réputation dans leur domaine – sont nettement plus pénalisés que les novices quand ils commettent un faux-pas volontaire. Leurs articles ultérieurs voient, en effet, le nombre de leurs citations par des pairs dégringoler d’un coup de 20%. Cela étant, à noter une différence majeure lorsque le faux-pas est involontaire : les chercheurs expérimentés ne sont à ce moment-là pas plus pénalisés que les novices (10% pour les uns comme pour les autres) ; c’est que personne ne tient alors rigueur du fait que le fautif ait de l’expérience, ou pas, puisque chacun sait pertinemment que nul n’est à l’abri d’une bévue.
Intéressant, n’est-ce pas ? Nous ne sommes donc pas à égalité face aux faux-pas professionnels. Plus on a d’expérience, et en particulier une réputation solide, plus la chute est importante lorsqu’on se fait prendre la main dans le sac. Car la désillusion est encore plus forte.
Ce n’est pas tout. L’étude met aussi au jour que le moindre faux-pas – volontaire comme involontaire – est suivi de conséquences. De conséquences graves mêmes, pour la carrière de la personne concernée : les autres n’ont alors plus vraiment confiance dans le sérieux et la qualité de son travail.
Que retenir de tout cela ? Ceci, à mon avis :
> Qui a commis un faux-pas professionnel se doit de prendre conscience que cela sera suivi de conséquences pour lui dans sa carrière, mais des conséquences que ne sont que rarement dramatiques. En effet, seules les personnes d’expérience ayant commis une fraude de manière délibérée verront leur réputation démolie. Pas les autres. À plus forte raison s’il s’agit d’une bête erreur : les autres savent très bien que cela risque de leur arriver un jour. Bref, pas de panique si vous venez de trébucher : sachez que vous allez vaciller un moment, peut-être même vous étaler par terre, mais rien ne vous empêchera de vous relever peu après !
En passant, l’Écrivain et philosophe français Voltaire a dit dans Brutus : «Quel homme est sans erreur ? Et quel roi, sans faiblesse ?»
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