BLOGUE. Peut-être croyez-vous - comme moi jusqu’à hier - que le management n’a rien à voir avec les mathématiques. De fait, le management n’est lui-même pas une science exacte, alors, de là à avoir le moindre point commun avec celle qui en est la plus rigoureuse… Je me trompais. Je l’ai découvert en lisant une entrevue palpitante de Gunter Dueck parue dans le WE Magazine, dans le cadre d’un dossier sur le leadership.
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Gunter Dueck? Il s’agit d’un Allemand qui est à la fois mathématicien et philosophe, qui de surcroît est le grand manitou du cloud computing chez IBM Allemagne, et qui enfin se pique de management. L’un de ses derniers ouvrages mêle justement un peu tout cela : Lean Brain Management soutient que nous gaspillons notre intelligence à mille petites tâches insignifiantes et que nous ferions mieux de nous concentrer sur l’essentiel, comme par exemple, d’arrêter immédiatement d’enseigner comme on le fait (des années durant à l’école, à l’université, etc.) au profit de sessions de formation intensives, nettement plus efficaces et beaucoup moins chronophages; ce livre a obtenu un Business Book Prize du Financial Times Deutschland.
Selon lui, le travail est une action menée à l’aide de deux leviers : la continuation et le changement. On continue la tâche amorcée, ou bien on y apporte un changement. Et le management consiste à manipuler adéquatement ces deux leviers. «Les leaders sont ceux qui font avancer les autres avec eux, dans leur travail comme dans leur développement personnel. Ils ont une mission ardue, parsemée d’embûches, mais terriblement passionnante», dit-il.
Ainsi, le leader doit agir comme un guide. «Vous n’êtes un leader que si d’autres vous suivent sans pour autant se sentir votre subordonné. Dans un sens, vous devez être un peu leur père ou leur mère, et vous dévouer à eux comme on le fait à l’égard d’enfants», illustre-t-il, en ajoutant que le jour où l’on se fâche contre un employé comme l’on gronde un enfant, c’est qu’on a soi-même un problème de leadership, car crier sur un petit n’a jamais été une bonne méthode d’éducation.
«Les employés aiment les directives claires. Si leur leader les leur donnent, ils sont satisfaits de lui et de leur travail. Mais si jamais ce n’est pas le cas, ou si l’un des employés n’est pas respecté, ou affaibli, alors le vent de la tempête va se mettre à gronder et risquera de renverser le mauvais leader», explique-t-il.
Alors, comment transformer ses employés en fidèles prêts à vous suivre partout où vous irez, ou presque? Gunter Dueck recommande une certaine forme de fermeté, car la priorité est de se faire respecter en tant que leader. «Au besoin, n’hésitez pas à user de la coercition. Frappez là où c’est nécessaire, vite et bien. Le choc sera rude pour les autres, mais vous pourrez alors profiter du moment de flottement qui s’ensuivra dans leur esprit pour asseoir votre autorité», estime-t-il, en déplorant que l’on accorde aujourd’hui si peu d’intérêt au Prince de Machiavel, pourtant riche en leçons managériales.
Une autre qualité nécessaire pour convaincre les autres de vous suivre est d’être capable d’avoir une vision claire de l’avenir. C’est en cela que les mathématiques peuvent être d’un grand secours. «Quand on a l’esprit mathématique, on manie avec aisance les concepts, on décèle facilement les interactions qui existent entre différentes choses, on est ouvert à l’innovation. Le cerveau fonctionne à toute vitesse, sans se laisser distraire par l’insignifiant. Bref, on est efficace», affirme-t-il sur son blogue, en parlant de son ouvrage Management by Mathematics.
«Certains diront que les mathématiciens sont des personnes froides, calculatrices, timides sur le plan social, que sais-je encore. C’est bien entendu un cliché. Nombre de scientifiques, et en particulier de mathématiciens, sont devenus au courant de leur carrière des gestionnaires, notamment dans le secteur des TI. Et leur approche originale fait des étincelles, croyez-moi», ajoute-t-il.
À cet égard, l’avènement des médias sociaux, comme Facebook et autres Twitter, est une bonne nouvelle pour les leaders à l’esprit mathématique, d’après le chantre du cloud computing. «J’ai moi-même été le leader virtuel d’employés d’IBM qui devaient travailler ensemble sur un projet spécifique, raconte-t-il. Chacun d’eux faisait son travail normal et dédiait des heures sup’ au projet, sur une base volontaire. On ne se voyait jamais, on ne se rencontrait que sur la base informatique dédiée au projet. J’étais leur cloud manager. Tout s’est très bien déroulé, et ce pour une raison fort simple : j’avais motivé chacun en lui promettant qu’il aurait du fun dans la réalisation du projet. C’est tout.»
Mais attention, il ne s’agit pas là de la panacée! «Gérer une équipe par Internet est problématique en soi, reconnaît-il. Tout le monde n’est pas encore assez à l’aise avec ce média. Et puis, celui-ci ne permet pas de tout faire : qui aurait l’idée d’élever son enfant via Facebook?»
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