BLOGUE. Qui n'a jamais eu de coup de chance? Oui, qui n'a jamais gagné, même une somme dérisoire, à une loterie ou à un autre tirage au sort? Qui n'a jamais gagné à pile-ou-face, ou à roche-papier-ciseau? Ou encore, qui n'a jamais fait une super affaire, en trouvant dans un magasin l'objet de ses rêves et de surcroît, assorti d'une réduction de prix de 25 ou 50%? Ça semble clair, tout le monde a déjà eu, au moins une fois dans sa vie, de la chance. Mais voilà, s'agissait-il vraiment de chance?
Découvrez mes précédents posts
Suivez-moi sur Facebook et sur Twitter
Je m'explique… L'étymologie du mot «chance» dérive du latin cadere, qui signifie «tomber». D'où notre perception de la chance comme quelque chose qui nous tombe dessus, sans prévenir, et donc quelque chose qui ne dépend absolument pas de nous. On considère que le hasard a tourné en notre faveur, et c'est tant mieux comme ça. Le hic? N'avez-vous pas remarqué que certains sont plus «chanceux» que d'autres? Et inversement, que d'autres – les losers – sont plus «malchanceux» que les autres, comme s'ils étaient continuellement recouverts de poisse? Si la chance dépendait strictement du hasard, cela ne devrait statistiquement pas se produire…
Comment expliquer ce mystère? Eh bien, en envisageant l'hypothèse que la chance en tant que telle n'existe pas! Et par conséquent, qu'il ne dépend que de nous de saisir notre chance quand elle se présente à nous. «Bien sûr, il y a toujours des coups de chance, rarissimes et impossibles à prédire, c'est ce que le neurologue James Austin appelle la "chance aveugle", mais je pense que la chance est, en fait, une compétence que chacun peut apprendre à maîtriser et à cultiver pour la faire advenir au quotidien», a dit au magazine Clés Philippe Gabilliet, le professeur de psychologie sociale qui a signé le livre Éloge de la chance, ou l'art de prendre sa vie en main (Saint-Simon, 2012).
Ainsi, M. Gabilliet estime que les «veinards à répétition» présentent quatre caractéristiques particulières, des caractéristiques qu'il nous appartient de développer pour voir les choses tourner à notre avantage un peu plus souvent.
1. L'optimisme. «Face aux difficultés, un individu optimiste va instinctivement se focaliser sur ses propres forces, chercher des solutions et faire confiance à l'avenir. Cette capacité à recycler positivement un coup du sort est l'un des ingrédients de la chance durable», explique-t-il.
Richard Wiseman, le professeur de psychologie de l'Université d'Hertfordshire (États-Unis) qui a écrit The Luck Factor, a mené une expérience intéressante à cet égard. Il prenait deux personnes, une qui disait qu'elle avait souvent de la chance dans la vie et l'autre qui affirmait que la vie ne lui souriait jamais. Et il leur demandait, à tour de rôle, d'aller prendre tout seul un café au comptoir dans un bar qu'il leur indiquait.
Que se passait-il? Presque systématiquement, l'optimiste trouvait sur son chemin le billet de banque qui traînait par terre et entamait une discussion au comptoir avec son voisin, justement un homme d'affaires qui cherchait à recruter quelqu'un comme lui. Quant au pessimiste, il marchait sur le billet de banque sans le voir et sirotait son café tout seul dans son coin. L'explication : les optimistes sont plus ouverts au monde qui les entoure que les pessimistes, si bien qu'ils voient plus facilement les opportunités qui se présentent.
2. L'intention préalable. «Un hasard ne peut se transformer en coup de chance que si nous sommes préparés mentalement à son arrivée et que si nous avons déjà réfléchi à l'orientation que nous pourrions lui donner», dit M. Gabilliet.
M. Wiseman a mené, un jour, une autre expérience, qui consistait à demander aux participants de compter le nombre de photos qu'il y avait dans un journal. Il y en avait 43 exactement. Tout le monde trouvait ce chiffre, en l'espace de quelques minutes. Pourtant, une poignée de participants le trouvait en… quelques secondes! Comment faisaient-ils? Ils avaient découvert un petit encadré, dans les premières pages, qui disait qu'il y avait dans ce journal 43 photos. L'explication : ces participants-là ne se contentaient pas de remplir la mission qui leur était donnée, et – inconsciemment – leur cerveau allait au-delà et surveillait tout ce qui pouvait passait ; bref, ils étaient mentalement prêts à créer leur chance.
3. La disponibilité intérieure. «La curiosité, l'ouverture d'esprit, la capacité d'être attentif à ce qui nous entoure, permettent de faire apparaître des opportunités là où on ne les attendait pas», poursuit l'auteur de l'Éloge de la chance.
De fait, si l'on a conscience que la chance peut nous sourire à condition qu'on la cherche, il suffit donc de s'évertuer à forcer notre destin, jour après jour. «Faites les choses différemment, conseille Ben Fletcher, un collègue de Richard Wiseman, dans un article du magazine Psychology Today. Par exemple, vous souhaitez rencontrer l'âme sœur? Alors mettez toutes les chances de votre côté, en lisant un autre journal que celui que vous lisez d'habitude, en changeant de votre siège habituel dans le métro ou le train, ou en regardant des émissions de télé que vous n'avez jamais regardées. Car le simple fait de casser vos habitudes vous amènera à voir les choses autrement, à penser autrement, et par suite à voir les opportunités autour de vous qui vous échappaient jusqu'alors.»
4. La connexion. «La chance véritable fait son miel des échanges et des interactions que nous tissons avec les autres. Entretenir son "réseau de chance", c'est s'assurer de multiplier les rencontres, les demandes inattendues, de créer en somme un espace où pourront fleurir les occasions favorables», dit M. Gabilliet.
Aujourd'hui, quantité de connexions se font virtuelles, grâce aux médias sociaux. Mieux vaut donc apprendre à en faire bon usage. Un exemple lumineux : c'est par l'un de ses contacts LinkedIn que Shel Horowitz, un expert en matière de marketing, a appris que Davos cherchait des conférenciers ; il a sauté sur l'occasion, et sa candidature a été retenue. Et pourtant, qui aurait dit au départ qu'il était possible d'avoir ses entrées à Davos par LinkedIn? «Ne cataloguez jamais les gens et les situations à l'avance. Attendez un peu, toujours, et vous leur verrez des facettes surprenantes», conseille M. Wiseman dans son livre.
Voilà. C'est aussi simple que ça. Quatre points à travailler, et votre vie tant personnelle que professionnelle peut prendre une nouvelle tournure. À vous donc de jouer…
En passant, Albert Camus a dit dans ses Carnets : «L'homme n'est rien en lui-même. Il n'est qu'une chance infinie. Mais il est le responsable infini de cette chance.»
Découvrez mes précédents posts