BLOGUE. J’ai reçu une flopée de commentaires à propos de mon post «10 trucs infaillibles pour être plus créatif» inspiré du tout dernier livre de Jonah Lehrer, Imagine. Des commentaires enthousiastes, mais doutant parfois de la pertinence de quelques-unes des recommandations, en particulier celle qui dit que ceux qui ont un petit coup dans le nez sont plus imaginatifs que les autres. Et je me suis dit que ces remarques répétées valaient d’être creusées un peu plus.
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C’est donc ce que j’ai fait, et j’ai vite mis la main sur une étude passionnante. Celle-ci est intitulée Uncorking the muse : Alcohol intoxication facilitates creative problem solving. Elle est l’œuvre de Jennifer Wiley, professeure de psychologie cognitive de l’University of Illinois at Chicago, assistée de deux de ses étudiants, Andrew Jarosz et Gregory Colflesh. Elle montre que boire un petit coup peut clairement aider à trouver des idées neuves et intéressantes.
Ainsi, les trois chercheurs ont demandé à 40 hommes âgés de 21 à 30 ans de se prêter à une expérience amusante. Ils leur ont demandé de ne pas boire une goutte d’alcool durant les 24 heures précédents l’expérience, et d’être totalement à jeun (ni boisson ni nourriture) durant les quatre dernières heures. La moitié d’entre eux ont alors dû boire en l’espace de 10 minutes assez de vodka Smirnoff parfumée à la canneberge pour dépasser une alcoolémie de 0,8 g d’alcool par litre de sang (note : le taux légal d’alcool au Canada, lequel correspond à deux pintes de bière pour un homme d’une stature moyenne). Et l’autre, une boisson qui avait le goût de l’alcool, mais qui n’en avait pas les effets : ce placebo permettait d’en faire un groupe témoin.
Puis, pendant un peu moins d’une heure, tout le monde a visionné le dessin animé Ratatouille. Pourquoi? Parce que les trois chercheurs voulaient que ceux qui étaient intoxiqués à l’alcool aient une alcoolémie de pile 0,75 g au moment de faire les tests.
Il s’agissait d’associer un mot à une série de trois autres. Par exemple, les participants se voyaient soumis les mots «pièce», «vif» et «cuillère» et devaient logiquement trouver le mot «argent».
Résultats? Impressionnants!
> Efficacité. Les intoxiqués ont trouvé la bonne réponse en moyenne dans 58% des cas, les autres, dans 42% des cas;
> Rapidité. Les intoxiqués ont trouvé les bonnes réponses en moyenne en 11,5 secondes, les autres, en 15,2 secondes;
> Intuition. Les intoxiqués ont dit avoir trouvé la plupart des bonnes réponses par intuition – comme quand on dit «Eurêka!» – plutôt que par réflexion. Ce qui n’a pas été le cas pour les autres.
Aucun doute n’est donc possible : l’alcool aide à résoudre des problèmes de logique qui demandent un peu d’imagination. Bref, il permet d’être plus efficace et plus rapide dès qu’il est question de créativité. CQFD.
Faut-il en déduire que les alcooliques sont les plus créatifs qui soient? Bien sûr que non. L’étude ne portait que sur des personnes un peu éméchées, pas sur des personnes habituées à prendre de l’alcool de manière exagérée. Elle ne s’intéressait qu’à ceux qui sont euphorisés temporairement par l’alcool, pas à ceux pour qui l’alcool est devenu une souffrance quotidienne.
Maintenant, il convient de se demander pourquoi un peu d’alcool peut avoir un tel effet sur la créativité individuelle. «Il semble que l’effet désinhibiteur de l’alcool soit en jeu. Ceux qui ont un peu bu hésitent moins à associer des idées qui a priori n’ont rien à voir ensemble, ou encore à faire tomber des barrières mentales que nous avons tous en temps normal. Cela se traduit par un bouillonnement intellectuel plus intense, et par suite à de meilleures solutions aux problèmes rencontrés», indiquent les chercheurs dans leur étude.
Aussi simple que ça…
En passant, Winston Churchill aimait à dire : «J’ai retiré plus de choses de l’alcool que l’alcool ne m’en a retirées»…
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