BLOGUE. J'ai eu la chance d'assister hier à la conférence de Susan Cain, l'auteure du best-seller Quiet: The Power of Introverts In a World That Can't Stop Talking, au OFF Montréal d'Infopresse. Une conférencière qui a été littéralement acclamée lors de son passage en 2012 aux TED Talks. Une coach, surtout, qui a mis au jour le fait que les entreprises se pénalisaient lourdement à ne pas être assez à l'écoute des employés introvertis, toute la place étant en général occupée par les extravertis.
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En effet, les introvertis présentent, d'après Mme Cain, nombre de qualités fondamentales pour le succès d'une équipe ou d'une entreprise :
> Ils apprennent plus de leurs erreurs que les extravertis;
> Ils sont plus fidèles que les extravertis;
> Ils sont plus prudents que les extravertis;
> Ils font des leaders plus équilibrés que les extravertis;
> Ils sont plus à l'écoute que les extravertis;
> Ils sont plus prompts à féliciter et récompenser les autres pour leurs efforts et leurs résultats que les extravertis;
> Etc.
C'est que les introvertis, contrairement à l'image que l'on véhicule souvent sur eux, ne sont pas des personnes timides et renfermées sur elles-mêmes. Non, les introvertis ont, en fait, cette simple particularité de préférer les environnements de travail calmes à ceux où règne une surexcitation permanente. Ils ont besoin de silence pour réfléchir, et s'isoler un moment pour cela ne les effraye pas, au contraire des extravertis. C'est tout.
Des introvertis, vous en connaissez sûrement dans votre entourage. Certains sont aujourd'hui des célébrités : il suffit de songer à Bill Gates, ou encore à Mark Zuckerberg. Et peut-être l'êtes-vous vous-même.
Cette conférence de Mme Cain m'a fait me souvenir d'une étude passionnante sur un nouveau profil psychologique concocté par un professeur de management de Wharton, Adam Grant. Quel profil? Celui de l'ambiverti, à savoir celui des personnes qui ne sont ni introverties ni extraverties.
Dans l'étude intitulée Running ahead: The ambivert advantage, il a été demandé à 340 employés d'un centre d'appels téléphoniques américain de répondre à un questionnaire détaillé sur leur personnalité. Ces employés étaient tous des représentants commerciaux, chargés de dégager des revenus à partir de clients existants et de clients potentiels. À l'aide des données recueillies, M. Grant a été en mesure d'attribuer une note de 1 à 7 à chaque participant : 1 correspondait aux personnes les plus introverties et 7, aux plus extraverties.
Puis, le chercheur a regardé la performance de chacun dans les trois mois qui ont suivi. Ce qu'il a trouvé est particulier…
> Les introvertis ont enregistré en moyenne des revenus de 120 dollars par heure de travail.
> Les extravertis ont enregistré en moyenne des revenus de 125 dollars par heure de travail.
Autrement dit, il n'y avait guère de différence, en termes de performance, entre les introvertis et les extravertis. Mais le plus surprenant était ailleurs…
> Ceux qui n'étaient ni introvertis ni extravertis ont enregistré en moyenne des revenus de 155 dollars par heure de travail.
Ceux-là, il les a appelés les "ambivertis". Les ambi-quoi? Les ambivertis, c'est-à-dire les personnes qui n'ont ni la note de 1 ou de 2, ni celle de 6 ou 7, mais plutôt 3, 4 ou 5. Il s'agit de personnes qui ne sont ni silencieuses ni bavardes, mais qui savent quand il convient de parler et quand il convient de se taire. Bref, ce sont des personnes qui agissent parfois comme des introvertis, et parfois comme des extravertis, en adaptant leur comportement à la situation.
Un détail mérite d'être souligné dans l'étude du professeur de management de Wharton : le profil le plus performant était, de loin, celui des ambivertis ayant une note de 4 – pile au milieu de l'échelle –, avec une moyenne de revenus de 208 dollars par heure de travail. Qu'est-ce que ça signifie? Eh bien, que les ambivertis sont nettement plus performants que les introvertis et les extravertis.
La bonne nouvelle, c'est que les ambivertis sont nettement plus nombreux que les introvertis et les extravertis dans la population, d'près M. Grant, et donc qu'il y a de fortes chances que vous soyez vous-mêmes un ambiverti. En conséquence, il y a de fortes probabilités pour que vous soyez faits pour être performant dans votre travail, en ce sens que votre profil psychologique vous y prédispose.
On peut également déduire une autre chose de cette étude. On peut en effet souligner le fait que, trop souvent, on a tendance à retrouver des leaders extravertis aux postes de direction des entreprises. Vous savez, ces fameuses grandes gueules au sourire carnassier, qui passent leur temps à toiser les autres et à se féliciter des bons résultats enregistrés par leur équipe. Oui, je suis sûr que vous savez…
Le hic? Vous l'avez déjà compris, ces leaders-là ne sont pas les plus performants, mieux vaudrait voir à leur place un ambiverti. Car au lieu de toujours parler plus fort que les autres comme les extravertis, les leaders ambivertis savent se taire et écouter ce que les autres ont d'important à leur dire. Car au lieu d'être catégoriques dans leurs opinions comme les extravertis, les leaders ambivertis savent changer d'idée lorsqu'ils en croisent une meilleure que la leur. Car encore au lieu de s'activer en tous sens comme les extravertis, les leaders ambivertis savent rester calmes dans la tempête. CQFD.
En passant, Sénèque a dit dans De la colère : «Il n'y a de vraiment grand que ce qui est calme».
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