Embaucher une superstar. Pour prendre en mains une équipe de choc, voire carrément l'entreprise. Qui n'en rêve pas? Mais qui ne se dit pas aussi, en douce, qu'un tel coup pourrait être à double tranchant, car la superstar pourrait tout aussi bien faire des étincelles que s'éteindre d'un coup, et l'entreprise avec elle?
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Alors? Cela vaut-il la peine de courir un tel risque? Ou pas? La réponse à cette interrogation existe. Elle se trouve dans une étude intitulée Superstar chinese CEOs, laquelle est signée par : Martin Conyon, professeur de gouvernance à l'École de management de l'Université de Lancaster (Grande-Bretagne); Lerong He, professeur de management à l'Université d'État de New York à Brockport (États-Unis); et Xin Zhou, professeur de finance à l'École de management de l'Université Fudan à Shanghai (Chine).
Les trois chercheurs ont noté qu'un phénomène particulier était en train de se produire dans l'économie de la Chine : l'émergence de PDG à l'aura de superstars. Ces PDG-là volent de succès en succès, ils roulent sur l'or et l'affichent sans honte, et surtout, les médias se les arrachent. Ils deviennent de véritables icônes. Ce qui est d'autant plus curieux que la Chine est encore, du moins officiellement, un régime communiste.
Bien entendu, ils ont voulu savoir si ces PDG-là méritaient, ou pas, une telle fascination populaire. Oui, ils ont tenu à vérifier s'ils livraient bel et bien la marchandise, ou pas. Bref, ils ont voulu découvrir s'il valait la peine, en général, de faire appel aux lumières d'une superstar.
Pour ce faire, ils se sont plongé dans plusieurs bases de données sur les entreprises chinoises : celle du China Securities Index 800, qui concerne les entreprises cotées aux Bourses de Shangai et de Shenzhen; celle dénommée le China Stock Market & Accounting Research du service d'information GuoTaiAn ; ou encore, celle du site Web de Sina-Finance. Celles-ci leur permettaient d'avoir les moindres détails sur les plus grandes entreprises chinoises et sur leurs hauts-dirigeants.
Les trois chercheurs ont retenu un panel de 572 entreprises, dont ils ont recueilli toutes les informations pour la période allant de 2000 à 2010. Ils ont repéré dans celles-ci 76 PDG superstars.
Superstars? Dans le cas présent, il s'agissait d'après les trois chercheurs des PDG occupant de surcroît un siège à l'Assemblée nationale populaire (un rapport de l'Institut Hurun indique qu'actuellement 83 des quelque 3 000 députés sont milliardaires, à l'image de Zong Quinghou, l'homme d'affaires le plus riche de Chine) ou à la Conférence consultative politique du peuple chinois. En effet, figurer au sein d'une de ces deux assemblées – placées sous la direction du Parti communiste chinois – est le signe qu'on dispose d'un immense pouvoir, et traduit par conséquent le fait qu'on est une sorte de superstar aux yeux des Chinois.
Cela fait, Martin Conyon, Lerong He et Xin Zhou ont regardé s'il existait, ou pas, la moindre corrélation entre le fait qu'un PDG soit une superstar et la performance de l'entreprise qu'il dirige. Ce qu'ils ont ainsi mis au jour est fort intéressant :
> Un effet positif immédiat. L'annonce de la nomination d'un PDG superstar se traduit aussitôt par un bond de la valeur du titre boursier de l'entreprise.
> Un effet positif qui perdure un an. Le titre boursier des entreprises dirigées par un PDG superstar s'apprécient nettement plus que celui des autres. Et ce, pendant un an. Après, l'effet s'estompe pour finir par disparaître complètement.
> Plus productives. Les entreprises dirigées par un PDG superstar affichent une meilleure productivité que les autres, du moins pendant la période de temps où celui-ci est à leur tête.
> Un coût plus élevé. Les PDG superstars gagnent nettement plus que les autres. Ce qui n'est pas, bien entendu, une surprise. Ils touchent en effet des primes à la performance plus élevées ainsi que davantage d'options sur titres (stock options, en anglais).
«Nous résultats montrent sans l'ombre d'un doute que les entreprises ont tout intérêt à embaucher un PDG superstar. Car celles-ci enregistrent une meilleure performance en Bourse et deviennent globalement plus performantes. Et ce, même s'il en coûte plus cher de rémunérer un tel PDG», disent les trois chercheurs dans leur étude.
Voilà. À vous de voir, maintenant, si vous êtes prêts à mettre le prix pour connaître un succès retentissant. Ou pas.
En passant, le moraliste français Chamfort disait : «L'estime vaut mieux que la célébrité, la considération vaut mieux que la renommée».
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