BLOGUE. J'ai une petite question a priori anodine pour vous : quelle est la dernière fois où vous avez pris l'air? Je veux dire, où vous vous êtes promené dehors, en pleine nature, plusieurs heures d'affilée, sans vous soucier de votre cellulaire et autres gadgets électroniques (oui, oui, sans même le sempiternel iPod branché aux oreilles, qui a pour principale fonction de vous couper du monde extérieur, bref de vous maintenir enfermé dans votre petite bulle…).
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Alors? Pas facile à dire. Peut-être le week-end dernier, et encore, pas sûr. C'est en fait que nous passons de moins en moins de temps en contact avec la nature, et ce, sans vraiment le réaliser. Tenez, saviez-vous qu'en Amérique du Nord le nombre de visites par personne aux parcs nationaux a diminué en moyenne de 20% depuis 1988? Que les 8-18 ans passaient en moyenne plus de sept heures et demie par jour devant un média électronique (télévision, ordinateur et cellulaire)? Et que les jeunes enfants ne passaient plus en moyenne que 15 à 25 minutes par jour à jouer ou à faire du sport dehors?
Nos vies changent, à vue d'œil, mais est-ce pour le mieux? C'est ce que ce sont demandés trois professeurs de psychologie : Ruth Ann Atchley, de l'Université du Kansas (États-Unis), ainsi que David Strayer et Paul Atchley, tous deux de l'Université d'Utah (États-Unis). Une interrogation qui a donné une étude intitulée Creativity in the wild: Improving creative reasoning through immersion in natural settings. Celle-ci montre que nous perdons grandement à nous couper de la nature comme nous le faisons aujourd'hui…
Les trois chercheurs ont eu une idée d'expérience très simple. Ils ont eu vent que la société Outward Bound organisait des programmes de leadership destinés aux cadres d'entreprise, des programmes d'un genre particulier : la plupart de ceux-ci consistent à effectuer une expédition de plusieurs journées en pleine nature, loin de toute trace de civilisation (aucun gadget électronique, par exemple), où il faut marcher en forêt sac au dos, grimper des parois rocheuses, descendre en bateau des rapides, ou même faire du traîneau à chiens. Et ils se sont dit qu'on pouvait peut-être évaluer ce que les participants retiraient concrètement d'une telle aventure.
Ainsi, il a été demandé à huit groupes différents de bien vouloir se prêter à un petit test, le Remote Associates Test (RAT), concocté en 1962 par Martha Mednick et servant depuis comme d'un outil courant pour évaluer la créativité d'une personne. Ces huit groupes avaient des profils similaires en matière de créativité, et étaient donc comparables les uns par rapport aux autres.
Une seule différence, toutefois : la moitié des groupes a passé le test tout juste avant le départ de l'expédition, et l'autre moitié, durant la matinée de la quatrième journée de l'aventure dans la nature sauvage. Résultats?
> Ceux qui avaient passé trois jours dans la nature ont eu en moyenne une performance 50% meilleure que les autres.
Autrement dit, le simple fait de prendre l'air, de prendre le grand air, suffit à booster sa créativité. C'est aussi bête que ça.
«Notre étude ne permet pas de dire si cette différence entre les deux groupes provient du fait d'avoir passé du temps dans la nature, d'avoir coupé toute utilisation de gadget électronique, ou d'un peu des deux. Mais elle montre sans l'ombre d'un doute que l'on devient plus créatif dès lors qu'on s'immerge dans la nature, sans lien électronique avec la ville», indique l'étude.
Et d'ajouter : «Cela étant, on peut raisonnablement avancer que le contact avec la nature stimule nos sens et nos émotions, à un point tel que l'activité de notre cerveau liée à la créativité en est décuplée». CQFD.
En passant, le médecin grec Hippocrate aimait à dire : «C'est la nature qui guérit les malades».
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