Positiver. Cela revient-il à porter des lunettes roses? À s'empêcher de voir ce qui ne nous convient pas? Et donc à refuser de regarder la réalité en face pour ne pas sombrer dans la dépression?
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Ou cela revient-il plutôt à s'arrêter d'être obnubilé par le négatif pour – enfin – percevoir le positif? À voir – enfin – en relief, c'est-à-dire l'ensemble des aspects des problèmes rencontrés quotidiennement au travail? Et par conséquent à se mettre en position de se sentir mieux au bureau?
Pas facile de trancher a priori, me direz-vous. Avec raison.
D'où ma joie à la découverte d'une étude intitulée Building positive resources: Effects of positive events and positive reflection on work stress and health. Celle-ci est le fruit du travail de : Joyce Bono, professeure de management à l'Université de Floride à Gainesville (États-Unis); Theresa Glomb, professeure de comportement organisationnel à l'École de management Carlson (États-Unis); Winny Shen, professeure de psychologie à l'Université de Floride-Sud à Tampa (États-Unis); Eugene Kim, professeur de comportement organisationnel à la Faculté de commerce Scheller de Georgia Tech (États-Unis); et Amanda Koch, chercheuse à l'HumRRO (Human Resources Research Organization). Car elle montre que positiver au travail, même un tant soit peu plus que d'habitude, peut avoir un réel impact sur chacun de nous. Un impact que l'on n'imagine même pas…
Les cinq chercheurs ont invité 61 volontaires œuvrant dans le milieu hospitalier à se prêter à une petite expérience, durant deux semaines. Dans un premier temps, il s'agissait de répondre sur leur cellulaire à un questionnaire qui prenait deux minutes de leur temps. Ce questionnaire leur était envoyé toutes les deux heures après leur arrivée au travail. Il s'agissait simplement d'indiquer les menus événements qui étaient survenus dans les deux dernières heures, des événements positifs comme négatifs. Exemples : «Un patient m'a reproché de mal faire mon travail», «Quelqu'un m'a sourit» et autres «J'ai reçu une mauvaise nouvelle provenant de mes proches».
Dans un deuxième temps, les participants devaient porter en permanence des capteurs mesurant leur pression artérielle. Une mesure était ainsi prise toutes les demi-heures, l'objectif étant de voir si la personne était, à chacun de ces moments-là, plus, ou moins, stressée que d'habitude.
Enfin, les participants devaient répondre à un dernier questionnaire, plus détaillé, en fin de journée, quand ils étaient à leur domicile. Cela se faisait au téléphone. L'idée était alors d'établir l'état de santé de la personne concernée, à l'aide de questions comme «Vous sentez-vous fatigué, ce soir?», «Ressentez-vous des raideurs dans le cou?» et «Avez-vous de la difficulté à vous concentrer en ce moment-même?».
À noter un autre point important : au bout d'une semaine, il a été demandé aux participants d'accomplir une tâche supplémentaire. Laquelle? Chaque soir, décrire dans un journal intime trois menus événements positifs qui sont survenus dans la journée.
Résultat? Les cinq chercheurs ont noté, tout d'abord, que les gens déploraient souvent les mêmes choses, tout comme ils se réjouissaient en général des mêmes choses. Ce qui leur a permis d'établir une table de la fréquence des principaux événements positifs et négatifs qui surviennent dans notre quotidien au travail :
1. «J'ai accompli ce que je voulais faire.» - 3,5 fois par jour.
2. «J'ai eu du fun et j'ai socialisé.» - 2,75 fois par jour.
3. «J'ai dû travailler avec des personnes difficiles.» - 1,75 fois par jour.
4. «J'ai dû accomplir des tâches personnelles au détriment de mes tâches professionnelles.» - 1,1 fois par jour.
5. «J'ai reçu un feedback positif.» - 0,5 fois par jour.
6. «J'ai pensé à des soucis personnels, ce qui a nui à ma performance au travail.» - 0,5 fois par jour.
7. «J'ai reçu de bonnes nouvelles, ce qui a amélioré ma performance au travail.» - 0,5 fois par jour.
8. «Je suis entré en conflit avec un collègue.» - 0,4 fois par jour.
9. «J'ai reçu un feedback négatif.» - 0,4 fois par jour.
10. «Quelqu'un m'a manqué de respect au travail.» - 0,3 fois par jour.
11. «J'ai reçu de mauvaises nouvelles, ce qui a nui à ma performance au travail.» 0,3 fois par jour.
Instructif, n'est-ce pas? On voit ainsi ce qui nous rend heureux – et malheureux – au travail. Soit :
> Heureux. On se sent heureux au travail dès lors qu'on éprouve un sentiment d'accomplissement de soi. Ce qui passe essentiellement par des marques de reconnaissance de la part d'autrui, ou tout bonnement par le simple fait de passer de bons moments avec les collègues.
> Malheureux. On se sent malheureux au travail dès lors qu'on se sent à l'étroit dans l'écosystème dans lequel on se trouve (faibles possibilités de développement, relations conflictuelles avec les autres, etc.). Ce qui se traduit souvent par l'absence, ressentie comme cruelle, de marques de reconnaissance.
Ce n'est pas tout. Les cinq chercheurs ont ensuite découvert ceci :
> Moins de stress. Un menu événement positif survenu le matin permet de réduire le stress de la personne durant l'après-midi. L'effet n'est donc pas immédiat, mais tout de même rapproché.
> Moins de soucis. Un menu événement positif survenu le matin permet à la personne de mieux décrocher du travail, en soirée. Celle-ci pense dès lors moins à ses soucis liés au travail, et vit mieux l'instant présent vécu seul ou en famille.
> Mieux-être. Le simple fait de rédiger dans un journal intime trois événements positifs survenus dans la journée permet de : ressentir moins de stress; ressentir moins de maux physiques et autres symptômes liés à la fatigue; mieux décrocher du travail, le soir venu.
«Ces trois effets-là sont véritablement impressionnants, compte tenu du fait que ce qui les déclenche est mineur en soi : rédiger trois phrases dans un carnet, par exemple, c'est une intervention qu'on peut juger comme minimale», indiquent-ils dans leur étude.
Que retenir de tout cela? C'est fort simple, d'après moi :
> Positivez davantage, même si c'est un tout petit peu plus qu'à l'habitude. Surtout le matin. Parce que vous vous sentirez moins stressé. Parce que vous serez plus performant. Parce que vous vous sentirez mieux avec vos collègues. Parce que vous serez peut-être même enfin heureux au travail.
Comment faire pour positiver davantage? Les cinq chercheurs ont une idée :
> Gratitude, etc. «Imaginez qu'un manager modifie notre idée de journal intime rempli en fin de journée par autre chose, comme l'idée de démarrer une réunion hebdomadaire pour un nouveau rituel, à savoir l'impératif pour chaque participant de partager avec les autres un événement positif qui lui est arrivé depuis la dernière réunion. Cela peut également être le simple fait d'amener les membres de son équipe, d'une manière ou d'une autre, à focuser sur un accomplissement personnel, sur une expérience positive récente, ou encore sur une expression de gratitude envers un collègue pour un service rendu. Cela favorisera la diminution du stress ressenti au sein de l'équipe, voire l'amélioration de leur performance globale», explicitent-ils.
Voilà. À votre imagination de trouver la meilleure idée vous concernant, sachant qu'il est toujours possible de s'inspirer du petit rituel matinal de Karelab, qui a fait l'objet d'un de mes récents billets de blogue.
En passant, le dramaturge français Pierre Corneille a dit dans Le Cid : «Dans le bonheur d'autrui, je cherche mon bonheur».
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