Innover. C'est devenu un impératif, de nos jours. Mais un impératif déstabilisant plus que motivant, car personne ne sait au juste comment s'y prendre pour trouver et concrétiser des idées vraiment neuves. Pas vrai?
Et pourtant, ce n'est pas si complexe qu'il y paraît. J'en veux pour preuve une étude fascinante intitulée Hiring new ideas: International migration and firm innovation in New Zealand, laquelle est signée par : Keith McLeod, analyste au ministère des Affaires, de l'Innovation et de l'Emploi de la Nouvelle-Zélande, ainsi que Richard Fabling et David Maré, tous deux chercheurs et associés de l'Institut de recherche en économie et en politique Motu, à Wellington (Nouvelle-Zélande). Celle-ci montre en effet qu'il y a un moyen ultrasimple pour innover avec brio. Oui, ultrasimple.
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Les trois chercheurs ont tout d'abord noté quelque chose de curieux à propos de leur pays, la Nouvelle-Zélande. Les experts de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) considèrent que celui-ci a le potentiel d'avoir un produit intérieur brut (PIB) par habitant supérieur de 20% à la moyenne des pays membres de l'OCDE, et pourtant, sa performance en est loin : le PIB par habitant de la Nouvelle-Zélande est inférieur de 20% à la moyenne des pays membres de l'OCDE.
Ils ont regardé de près les études de l'OCDE à ce sujet et en sont arrivé au constat que ces experts-là pointaient du doigt, au fond, deux épines fichées dans les pieds de l'économie du pays. D'une part, la faiblesse des échanges des entreprises avec l'étranger (importations/exportations). D'autre part, le sous-investissement des entreprises dans le développement des compétences des employés. Autrement dit, «les entreprises néo-zélandaises peinent à innover parce qu'elles ont peu de connexions à l'international et parce qu'elles ne forment pas suffisamment leur capital humain, c'est-à-dire leurs forces vives», disent-ils dans leur étude.
Les mots clés sont donc les suivants : international & capital humain. Et à force de les avoir sous les yeux, une idée leur a sauté au visage : et si la solution au problème résidait justement dans la combinaison de ces deux termes… Et si les entreprises néo-zélandaises renouaient avec l'innovation en allant chercher des forces vives à l'étranger…
Afin de vérifier la validité de leur intuition, les trois chercheurs se sont plongé dans les immenses bases de données de Statistique Nouvelle-Zélande, en portant leur attention sur quelque 6 000 entreprises – tous secteurs d'activités confondus (agriculture, mines, énergie, commerce de détail, etc.) – ayant fourni des informations pointues à leur sujet en 2005, 2007, 2009 et 2011. Objectif : traquer celles ayant recruté des étrangers – soit des immigrants, soit des expatriés revenus au pays – et regarder si elles brillaient par leur créativité davantage que les autres, ou pas, depuis. Aussi simple que ça.
Résultats? Les voici :
> De la nouveauté naît l'innovation. Les entreprises qui recrutent des nouveaux immigrants ou des expatriés récemment revenus au pays innovent nettement plus que les autres.
> Avantage aux nouveaux immigrants. Les entreprises qui recrutent de nouveaux immigrants lancent plus de nouveaux produits ou services que les autres. Elles adoptent plus aisément de nouveaux processus de fabrication que les autres. Elles concoctent plus de nouvelles stratégies de marketing que les autres. Et elles sont plus disposées à faire leur entrée sur de nouveaux marchés à l'étranger que les autres.
> Avantage aux expatriés récemment revenus au pays. Les entreprises qui recrutent des expatriés récemment revenus au pays lancent plus de nouveaux produits ou services que les autres. Elles adoptent plus aisément de nouvelles méthodes de management que les autres. Et elles concoctent plus de nouvelles stratégies de marketing que les autres.
Comment expliquer un tel impact de ces nouveaux arrivants sur la capacité d'innover d'une entreprise? Les trois chercheurs ont, bien entendu, tenu à le savoir. Ils ont affiné l'analyse de leurs données, ce qui leur a permis de faire une belle trouvaille :
> Une question d'expérience. Comme on l'a vu, le fait qu'ils apportent un regard neuf sur les activités de leur nouvel employeur est ce qui leur permet de contribuer positivement à la créativité de l'entreprise. Mais ils n'ont pas l'apanage du regard neuf : tout nouvel employé (jeune diplômé néo-zélandais, etc.) peut y contribuer tout autant et tout aussi bien. En vérité, ce qui fait toute la différence, c'est une chose qu'ils ont de plus que les autres, à savoir leur niveau de connaissances élevé. Car dans la majeure partie des cas, les nouveaux arrivants en Nouvelle-Zélande sont des personnes diplômées et compétentes, qui de surcroît ont été confrontés, grâce à leur expérience professionnelle passée, à d'autres façons de penser et de faire.
Que retenir de tout cela? Tout bonnement ceci :
> Qui entend booster comme jamais la créativité de son équipe, voire de son entreprise, se doit d'embaucher… des idées neuves! C'est-à-dire des personnes riches en idées vraiment neuves, soit les nouveaux immigrants et les expatriés récemment revenus au pays. Pourquoi? Parce qu'ils présentent le double avantage de porter un regard neuf sur leur écosystème professionnel et plus que ça, une réflexion neuve sur celui-ci, à la lumière de leur expérience. Bref, parce qu'ils amènent avec eux l'intelligence.
En passant, le penseur français Ernest Renan aimait à dire : «Nous avons les idées arrêtées dès que nous cessons de réfléchir».
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