BLOGUE. C'est bien connu, au travail, certains sont plus populaires que d'autres auprès de leurs collègues. Dès qu'ils apparaissent, les autres détournent le regard, leur décochent un sourire et s'apprêtent à entamer une discussion avec eux, si l'envie leur prend. Dès qu'ils parlent, tout le monde les écoute. Et dès qu'ils s'éloignent, les autres ressentent une éphémère impression de vide.
Découvrez mes précédents posts
Suivez-moi sur Facebook et sur Twitter
Ces personnes donnent l'impression qu'elles sont populaires depuis leur naissance, qu'elles ont ça dans le sang, sans avoir à se forcer. Qu'elles ont vu ce don éclore durant leur tendre enfance, puis à l'école, au cégep, à l'université, au bureau, etc. Et que cela joue grandement en leur faveur : par exemple, lorsqu'il y a une promotion professionnelle à décrocher, ce sont elles qui l'obtiennent. Pas vrai?
Pour en avoir le cœur net, trois professeurs d'économie et un chercheur en économie ont décidé d'unir leurs talents pour trouver un moyen de vérifier cette intuition que nous avons tous. Il s'agit de deux professeurs de l'Université d'Essex (Grande-Bretagne), Andrea Galeotti et Stephen Pudney, d'une professeure de l'Université de Chicago (États-Unis), Gabriella Conti, et d'un chercheur de l'Institut de recherche sur l'emploi (IAB) à Nuremberg (Allemagne), Gerrit Müller. Le fruit de leur travail se trouve dans une étude sobrement intitulée Popularity.
Ainsi, les quatre chercheurs se sont intéressés à une riche base de données, la Wisconsin Longitudinal Study (WLS). Cette dernière renferme une foule d'informations sur le tiers des étudiants en école secondaire de l'État américain durant les années 1957, 1964, 1975, 1993 et 2004. Des informations sur, entre autres, leur profil socio-économique, leurs capacités intellectuelles, leurs résultats scolaires, le niveau scolaire finalement atteint et leur progression professionnelle.
Ils ont choisi de se pencher sur les 4 330 hommes qui avaient donné des informations détaillées à leur sujet en 1975, alors qu'ils étaient à l'école secondaire, et notamment sur leurs meilleurs amis d'enfance, très exactement en 1957. Pourquoi? Parce que c'est par ce moyen que les quatre chercheurs ont pu évaluer la popularité d'une personne. Ils ont, en effet, considéré que :
> Quelqu'un pouvait être populaire par le nombre d'amis qu'il disait avoir;
> Quelqu'un pouvait aussi être populaire par le nombre de personnes qui se disaient son ami.
Puis, ils ont mis au point un modèle de calcul économétrique destiné à identifier d'éventuels facteurs ayant pu influencer l'évolution salariale de ces personnes. Quels facteurs? Eh bien, des facteurs comme le milieu social dont elles sont issues, la localisation de leur école secondaire, ou encore leur méthode pour décrocher leur premier emploi, sans oublier – bien sûr – leur popularité.
Résultats? Je vous les donne sans tarder…
> Hormis la popularité, aucun des différents facteurs envisagés n'a eu la moindre incidence statistique sur l'évolution salariale des personnes étudiées.
> Une seule sorte de popularité – la véritable, en fait – a joué en la faveur de ces personnes, à savoir celle qui considère uniquement le nombre de gens qui se disent leur ami. (Dire que l'on a beaucoup d'amis donne l'impression d'être populaire, mais en vérité, ce qui compte, c'est le nombre de personnes qui disent vous apprécier. Idem aujourd'hui avec Twitter, avec la distinction entre Abonnements et Abonnés.)
> Quarante années après leur tendre enfance, les personnes qui étaient déjà populaires touchaient un salaire en moyenne 10% supérieur à ceux qui n'étaient pas du tout populaires à l'époque. Cette différence était, je le souligne, exclusivement attribuable à une variable, la popularité. Rien d'autre.
Voilà. Être populaire durant son enfance et sa jeunesse se traduit, à la longue, par un plus gros salaire que les autres. Pourquoi? Mme Conti et MM. Galeotti, Pudney et Müller avancent une explication dans leur étude : «La popularité, du moins telle que nous l'avons évaluée, semble un bon indicateur de compétences clés pour évoluer durant sa carrière plus vite que la plupart des autres : comprendre les règles tacites d'un groupe, s'y adapter, s'en servir pour briller et obtenir l'appui d'autrui», disent-ils. Et de souligner que tout cela se résume en deux mots : «confiance et réciprocité».
Si vous avez donc une chose à retenir, c'est la suivante :
> Qui réussit à maîtriser deux clés fondamentales du leadership – la confiance et la réciprocité – voit les portes de la popularité s'ouvrir toutes grandes à lui.
En passant, l'écrivain irlandais Oscar Wilde aimait à dire : «Personne ne survit au fait d'être estimé au-dessus de sa valeur».
Découvrez mes précédents posts