BLOGUE. Tout sourit aux optimistes, dit-on. La chance tourne toujours en leur faveur, les beaux projets leur tombent du ciel, ou encore les primes leur sont dues. Pas vrai? Eh bien, non, pas forcément. L'optimisme n'est pas la panacée que l'on imagine.
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Ça, je l'ai appris dans une étude intitulée CEO optimism and the board's choice of successor, signée par Timothy Colin Campbell, un professeur de finance à l'Université de Miami (États-Unis). Une étude qui met au jour le fait qu'être optimiste dans la vie n'a pas que de bons côtés…
Ainsi, M. Campbell s'est penché sur une base de données intéressante, l'Execucomp. Cette dernière recèle notamment des informations sur les départs entre 1992 et 2005 de quelque 400 PDG d'entreprises figurant dans l'indice boursier américain du S&P 1500, par exemple si ce départ était contraint ou volontaire. Et il a eu l'idée de la croiser avec deux autres, à savoir la Thomson Financial's Insider Transaction Database (sur les transactions boursières) et Compustat (sur les investissements des entreprises).
Son objectif avec tout ça? Regarder si le niveau d'optimisme dans la vie d'un PDG a une incidence, ou pas, sur ses chances d'être recruté par un conseil d'administration d'une grande entreprise.
Comment s'y est-il pris? C'est très simple. Le chercheur s'est appuyé sur une méthode particulière pour évaluer le niveau d'optimisme d'un PDG, une méthode établie par Malmendier & Tate au milieu des années 2000, qui consiste, d'une part, à regarder la manière dont celui-ci investit. Trois possibilités :
> Si l'entreprise qu'il dirige figure parmi celles qui investissent le plus dans son secteur d'activité (au-dessus du 80e centile), durant au moins deux années consécutives, le PDG est considéré comme "hautement optimiste".
> Si l'entreprise qu'il dirige figure parmi celles qui investissent le moins dans son secteur d'activité (en-dessous du 20e centile), durant au moins deux années consécutives, le PDG est considéré comme "faiblement optimiste". (Il va de soi qu'aucun PDG ne peut être franchement pessimiste, car sinon il ne resterait pas en poste très longtemps…).
> Dans tous les autres cas de figure, le PDG est considéré comme "modérément optimiste".
D'autre part, cette méthode tient compte d'un autre critère primordial, soit la façon dont le PDG use des actions qu'il détient de l'entreprise qu'il dirige. Là encore, trois possibilités :
> S'il en achète de nouvelles dès qu'il le peut, de manière prolongée, il est perçu comme étant "hautement optimiste".
> S'il en vend dès qu'il le peut, de manière prolongée, il est perçu comme étant "faiblement optimiste".
> S'il les gère autrement, il est perçu comme étant "modérément optimiste".
Fort de toutes ces données, M. Campbell a été en mesure d'estimer le niveau d'optimisme de chacun des quelque 400 PDG étudiés, et surtout de voir comment les conseils d'administration agissaient au moment d'en recruter un nouveau. Un travail qui lui a permis de faire trois belles trouvailles :
1. Avantage à la modération. Les conseils d'administration ont en général tendance à recruter des PDG modérément optimistes. Autrement dit, ils craignent ceux qui ne sont pas assez et ceux qui sont trop optimistes.
2. Duplicata. Les conseils d'administration ont tendance à choisir comme successeur un PDG ayant le même type d'optimisme que celui qui est parti. Quand celui-ci était faiblement optimiste, le nouveau l'est aussi, en général; etc.
3. À l'interne. Quand les conseils d'administration ont recruté un PDG au niveau d'optimisme similaire à celui qui est parti, il y a plus de chances qu'ils aient embauché à l'interne qu'à l'externe.
Par conséquent, être quelqu'un de franchement optimiste dans la vie peut nuire à sa carrière. Du moins, pour un PDG, d'après l'étude. Et l'on peut, à mon avis, généraliser à d'autres que les PDG, dès lors qu'on occupe un poste à responsabilités, même modestes. Qu'en pensez-vous?
En passant, le philosophe austro-britannique Karl Popper aimait à dire : «Être optimiste est un devoir moral».
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