BLOGUE. La patience est une vertu. Une vertu rare, dans ce monde où l'on est sans cesse poussé à aller de plus en plus vite. Dans un monde où, en réalité, on confond vitesse et précipitation. Ce qui explique pourquoi, si souvent, nous frappons des murs.
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Y a-t-il aujourd'hui moyen de renouer avec la patience? De ralentir pour devenir plus efficace dans son travail – comme je l'explique dans mon livre Le Cheval et l'Âne au bureau (Éd. Transcontinental) –, vu que l'efficacité n'est pas une question de rapidité, mais de rythme? Oui, de rythme régulier de travail, à l'image des rameurs d'aviron qui courent à la catastrophe si l'un d'eux tente tout seul d'accélérer la cadence.
La réponse à cette interrogation est : «oui». C'est ce qu'indique une étude intitulée When time has a will of its own, the powerless don't have the will to wait: Anthropomorphism of time can decrease patience. Celle-ci est le fruit du travail d'Ashwani Monga, professeur de marketing à l'École de commerce Darla-Moore de l'Université de Caroline du Sud (États-Unis), assisté de son étudiant Frank May.
Ainsi, les deux chercheurs ont mené cinq expériences visant à voir si la perception que l'on a du temps avait la moindre incidence sur notre patience. Plus précisément, si l'anthropomorphisme du temps jouait sur notre capacité à être patient.
L'anthropomorphisme du temps? Derrière ce terme bizarroïde se cache, en fait, une chose très simple : quand nous parlons du temps, et donc quand nous pensons à la notion de temps, il nous arrive de lui prêter des caractéristiques qui sont humaines. Les expressions abondent : «Du temps de Charlemagne», «Les outrages du temps», ou encore «Tuer le temps». Sans parler des Grecs, qui, durant l'Antiquité, personnifiaient le temps par l'entremise de divinités comme Chronos et Kairos.
La première expérience de MM. Monga et May était la suivante… Il a été demandé à 131 clients d'un magasin américain de bien vouloir répondre à un questionnaire d'une dizaine de minutes, en échange d'un bon d'achat. Le questionnaire visait à évaluer deux choses :
> Anthropomorphisme du temps. D'une part, le niveau d'anthropomorphisme du temps qu'avait chaque participant, c'est-à-dire s'il avait plus ou moins tendance à attribuer des caractéristiques humaines au temps;
> Pouvoir. D'autre part, le sentiment de pouvoir de chacun, c'est-à-dire la conviction que l'on est une personne qui a plus ou moins d'influence sur autrui.
Une fois le questionnaire rempli, les participants avaient un choix à faire :
> Impatience. Soit prendre le bon d'achat de 5 dollars immédiatement valide.
> Patience. Soit prendre le bon d'achat de 10 dollars valide dans une semaine.
Intéressant, n'est-ce pas? Maintenant, voici le résultat :
> Plus on perçoit le temps à travers des caractéristiques humaines et plus on sent qu'on a du pouvoir, plus on est capable de faire preuve de patience.
> Plus on perçoit le temps à travers des caractéristiques humaines et moins on sent qu'on a du pouvoir, moins on est capable de faire preuve de patience.
Autrement dit, notre tendance à humaniser le temps combinée à notre sensation de ne pas contrôler la situation dans laquelle on se trouve nuit grandement à notre patience.
Les deux chercheurs ont, bien entendu, cherché à connaître les raisons de tout cela. Les quatre autres expériences leur ont permis de découvrir que :
> Tantôt le temps joue contre nous. Quand on se sent impuissant, on a l'impression que le temps est contre nous. D'où notre réflexe d'agir au plus vite, afin de minimiser l'impact que l'on croit négatif du temps sur nous.
> Tantôt le temps joue pour nous. En revanche, quand on sent qu'on contrôle la situation, on a l'impression que le temps joue en notre faveur. Dès lors, nous sommes en mesure de nous montrer patient, et même plus qu'à l'habitude.
Et voilà. Pour vous montrer, à l'avenir, plus patient, il suffit donc d'user de deux trucs ultrasimples :
> Quand vous sentez que vous contrôlez la situation dans laquelle vous êtes. À ce moment-là, pensez au temps qui passe et imaginez-le sous la forme d'un être humain (un bel homme ou une jolie femme). Vous verrez alors le temps passer vite, très vite, peut-être même trop vite. Bref, vous deviendrez patient presque à votre insu.
> Quand vous vous sentez impuissants face à la situation dans laquelle vous êtes. À ce moment-là, pensez au temps comme un sablier dont les grains s'écoulent à toute vitesse. Tentez de visualiser le flot continu de grains de sable, qui passe de la bulle de verre supérieure à celle qui se trouve juste en dessous. Et absorbez-vous dans cette image de mince filet de sable qui file à toute allure, de manière continue. Si vous y parvenez, vous verrez alors le temps filer sans vous en rendre compte, et serrez donc devenu plus patient que d'habitude.
En passant, le poète latin Horace a dit dans ses Odes : «La patience adoucit tout mal sans remède».
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