Vous comme moi, nous souffrons tous d’un même mal : nous pensons toujours, ou presque, de la même façon. Et ce, parce que notre cerveau a la fâcheuse manie de prendre des raccourcis : face à une situation connue, nous avons le réflexe de recourir à la solution qui a déjà bien fonctionné par le passé, sans nous poser de questions ; et face à une situation inconnue, nous avons le réflexe de recourir, là encore, à une solution qui a fait ses preuves par le passé, convaincus que nous sommes que cela minimisera les risques en comparaison avec une solution totalement inédite pour nous. Pas vrai?
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Le hic, c’est que penser et agir de la sorte nous fait souvent rater la cible lorsque celle-ci est importante, voire nous mène carrément droit à la catastrophe. Pourquoi? Parce que le simple fait de refuser - inconsciemment - de s’adapter à une situation est le signe clair d’un refus d’user de notre plus grand atout dans la vie, à savoir l’intelligence. D’ailleurs, pour vous en convaincre, je vous invite à vous souvenir de la dernière grosse erreur que vous avez commise au travail, et à regarder en toute objectivité si elle n’était pas due en grande partie à votre réflexe de recourir à un schéma de pensée auquel vous recourez souvent. Vous voyez?
Bien. Maintenant, la question saute aux yeux : comment s’y prendre pour se défaire, le moment venu, d’un schéma de pensée qui nous est habituel? Oui, comment se défaire d’une telle habitude mentale, si fermement ancrée en nous? Eh bien, je pense avoir mis la main sur une merveilleuse astuce à ce sujet. Une astuce tirée du livre intitulé Apprenez à faire les bons choix, de la coach allemande Birgit Preuß-Scheuerle (Éditions Vigot, 2008). Une astuce… magique!
«Pour se délester d’une habitude mentale, il convient de se placer dans un autre environnement que celui dans lequel on évolue couramment. Et faire comme si la décision à prendre concernait non pas l’entreprise, mais une association, une école ou une garderie. Ne vous considérez pas comme le collaborateur que vous êtes, mais par exemple comme le papa ou la maman impliqué dans une association, une école ou une garderie, ou bien comme le jardinier de celle-ci. C’est-à-dire avec un rôle correspondant à peu près au vôtre dans l’entreprise, mais dans un tout autre cadre.
«Cette idée peut vous paraître saugrenue, et vous faire sourire, mais tentez l’expérience ne serait-ce qu’une fois. Disons que vous êtes le jardinier d’une école. Et qu’il vous faut prendre une décision importante concernant un dossier qui vous déstabilise parce que vous sentez, au fond de vous-même, qu’il va vous falloir sortir des sentiers battus. Vous mettre ainsi dans la peau d’un jardinier va vous permettre d’être moins nerveux dans votre réflexion, grâce à votre approche du problème originale et ludique à la fois. Et cela vous permettra de voir autrement la réalité à laquelle vous êtes confronté : vous verrez plus facilement qu’on ne peut jamais transformer un “tournesol” en “sapin”, que votre “violette” a besoin d’être fortifiée, ou encore que votre “cactus” mérite d’être maintenu à distance le temps que vous trouviez les gants nécessaires pour le rempoter ailleurs.
«Avez-vous saisi le principe? Sûrement, car il est simple. Maintenant, pour vous aider à le suivre concrètement, il existe une méthode par étape dénommée ‘La forêt enchantée’.
«Imaginez que vous êtes dans une forêt enchantée. Vous y rencontrez plusieurs créatures étranges aux oreilles pointues, des elfes. Et vous vous devez de répondre à leurs interrogations afin de trouver, grâce aux indications qu’ils voudront bien vous donner, le bon chemin à travers un enchevêtrement d’arbres et de buissons.
«Le premier elfe que vous croisez vous demande : “Admettons que tu puisses décider et agir comme tu le veux, que ferais-tu?” Si vous trouvez une bonne réponse, il vous autorise à poursuivre votre chemin.
«Le deuxième elfe vous demande : “Imagine que, si tu voulais rester en vie, tu doives prendre la décision que tu tracasse avec la personne qui, à ton avis, y est la plus opposée. Comment ferais-tu pour parvenir à une décision?” Si vous trouvez une bonne réponse, il vous autorise à poursuivre votre chemin.
«Le troisième elfe vous dit : “Tu ne t’en rends pas compte, mais les personnes qui sont à vos côtés au travail flottent de manière invisible juste au-dessus de ta tête, en ce moment. Que disent-elles de la situation actuelle?” Si vous trouvez une bonne réponse, il vous autorise à poursuivre votre chemin.
«Le quatrième elfe, installé au bord d’une rivière, vous demande : “Bon, comment se passe jusqu’à présent ta prise de décision? Souviens-toi de la dernière fois où tu as pris plaisir à prendre une décision (ex.: ta prochaine destination de vacances, etc.). Et regarde bien les éléments qui ont contribué à te procurer du plaisir à ce moment-là : tu verras alors apparaître à la surface de l’eau les rochers grâce auxquels tu pourras traverser la rivière”.
«Le cinquième elfe semble sortir de nulle part et vous pose une question sur votre avenir : “Imagine que deux années ont passé, tu as pris ta décision et tu as atteint ton objectif. De quoi aimerais-tu alors te souvenir?” Si vous trouvez une bonne réponse, il vous autorise à poursuivre votre chemin.
«Enfin, le sixième et dernier elfe surgit de derrière un arbre et vous avertit de faire attention à ne pas tomber dans un trou. Il vous demande : “Si tu voulais que la situation actuelle se détériore encore plus, que devrais-tu faire?” Si vous trouvez une bonne réponse, vous apercevez le passage permettant d’éviter le trou. Vous parvenez ainsi à l’orée de la forêt enchantée et pénétrez dans un vaste champ d’une beauté extraordinaire.»
Voilà. Le tour est joué!
Si vous prenez le temps de bien répondre à chacune des interrogations des elfes, vous verrez que votre prise de décision sera plus aisée que jamais à effectuer. Pourquoi? Voici l’explication :
1. La première question ouvre votre regard sur de nouvelles idées et d’autres modes de comportement.
2. La deuxième question vous aide à ne plus vous sentir le seul responsable de la décision à prendre et à reporter la responsabilité sur toutes les autres personnes impliquées.
3. La troisième question vous donne une autre perspective sur le problème en question et vous conduit à saisir le point de vue des autres personnes impliquées.
4. La quatrième question insiste sur les événements émotionnels positifs et vous aide à penser en termes de solutions, et non plus de problèmes.
5. La cinquième question oriente votre pensée vers les étapes pouvant mener à la résolution du problème rencontré.
6. La sixième question vous aide à analyser vos schémas de pensée anxiogènes et à vous intéresser à ce qu’il vous est possible de faire pour les combattre.
Subtil, n’est-ce pas? Alors, n’hésitez pas une seconde à faire un petit tour dans la forêt enchantée lorsque vous sentez que vos habitudes prennent trop souvent le dessus. Car cela vous évitera de sombrer dans la routine, et par suite, de filer droit dans le mur sans même le voir venir à vous. C’est que pour viser juste, un peu de féérie est nécessaire.
En passant, l’écrivain autrichien Hugo von Hofmannsthal disait : «L’elfe, transparent comme l'air, est le messager vigilant qui porte à travers les airs une parole magique : en passant, il s'empare du mystère de nuages, des étoiles, des cimes, des vents ; et il transmet la formule magique fidèlement, mêlée cependant aux voix mystérieuses des nuages, des étoiles, des cimes et des vents. Il est le messager qui ne fait plus qu'un avec le message».
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