Une réunion qui s'éternise, un boss malcommode, un dossier si rébarbatif qu'on n'arrive jamais à s'y mettre… Nous avons tous nos petites misères au travail. Des petites misères qui, parfois, réussissent à nous pourrir la vie. Pas vrai?
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La question saute aux yeux : n'y aurait-il pas un moyen efficace – pour ne pas dire radical – pour mettre un terme à toutes ces petites misères? Ou du moins, à celles qui nous gâchent vraiment notre plaisir?
Eh bien, tenez-vous bien, j'ai une excellente nouvelle pour vous, aujourd'hui! Car ce moyen-là existe bel et bien. Je l'ai déniché dans une étude intitulée Consuming experential categories et signée par : Anuj Shah, professeur de science du comportement à l'École de commerce Booth (États-Unis); et Adam Alter, professeur de marketing à l'École de commerce Stern (États-Unis). Un moyen tout bonnement génial de simplicité, comme vous allez le voir…
Les deux chercheurs ont procédé à six expériences visant à voir comment les gens s'y prenaient pour soit maximiser leur plaisir, soit minimiser leur déplaisir. Je vais vous décrire l'une d'elles, ça vous suffira pour saisir.
MM. Shah et Alter ont eu accès aux données de 1666 utilisateurs réguliers du site Web Goodreads.com, qui permet à chacun de donner son opinion sur ses lectures les plus récentes. Ils se sont spécifiquement intéressé à ceux qui s'étaient lancé dans des trilogies, à l'image de The Hunger Games, Millenium, The Lord of the Rings et Fifty Shades of Grey. Des trilogies que certains ont adoré et que d'autres ont détesté. Et ils ont regardé le comportement que les uns et les autres avaient eu entre la lecture du deuxième et du troisième tome. Voici ce qu'ils ont noté :
> Ceux qui aiment savourent. Ceux qui adoraient une trilogie ont étiré le temps le plus longtemps possible entre la fin de la lecture du deuxième tome et le début de celle du troisième. Cela leur prenait parfois un mois avant de s'y mettre, période de temps durant laquelle certains lisaient un autre livre. Pourquoi agissaient-ils ainsi? Parce qu'ils savouraient cet instant précis où un grand plaisir les attendait, un plaisir d'autant plus grand qu'il prendrait ensuite fin.
> Ceux qui détestent abrègent. Ceux qui détestaient une trilogie enchaînaient aussitôt le deuxième et le troisième tome, histoire de mettre fin au plus vite à leur supplice. Vous me direz, comment se fait-il qu'ils aient lu la trilogie en entier s'ils ne l'aimaient pas. C'est qu'il s'agissait de passionnés de lecture, qui tenaient par-dessus tout à présenter aux autres une critique fondée.
Les autres expériences leur ont permis de mieux comprendre comment nous nous y prenons pour tirer le plus de plaisir possible de ce qui nous fait du bien et, inversement, comment nous nous y prenons pour atténuer le plus possible ce qui nous procure des contrariétés. Et c'est là qu'ils ont fait une splendide trouvaille :
> L'astuce des catégories. Lorsque nous nous lançons dans des tâches lourdes et/ou complexes, nous avons le réflexe inconscient de les catégoriser. C'est-à-dire que notre cerveau range chacune d'elles dans différentes catégories, afin de simplifier la vue d'ensemble de tout ce qu'on a à accomplir. Deux scénarios sont alors possibles :
– Les tâches à accomplir nous font a priori plaisir. En ce cas, nous avons tendance à multiplier les sous-catégories, dans l'optique de multiplier notre plaisir. Car cela nous met en tête l'idée qu'on aura plein de choses à faire, et donc plein d'occasions d'avoir du plaisir.
– Les tâches à accomplir nous mécontentent a priori. En ce cas, nous avons tendance à réduire le nombre de catégories, dans l'optique de réduire notre déplaisir. Car cela nous met en tête l'idée qu'on aura peu de choses à faire, et donc peu d'occasions d'avoir du déplaisir.
Subtil, n'est-ce pas? Prenons un exemple concret pour bien nous rendre compte de ce qui se produit alors en nous…
Imaginons que vous dressiez la liste des choses que vous rêveriez d'accomplir avant de mourir. Et que ces choses soient les suivantes : monter sur un éléphant; tenir dans vos bras un bébé tigre; voir les chutes d'Iguazu; et plonger en apnée dans le Mer Morte. Sans que vous vous en rendiez compte, votre cerveau a rangé tout cela en deux catégories : cajoler un animal sauvage; vivre une émotion forte liée à l'eau.
Dans le cas présent, il s'agit de plaisirs à assouvir, si bien que votre cerveau va se concentrer sur les sous-catégories, et donc retenir chacune des choses à accomplir, non pas les deux catégories. (S'il avait été plutôt question de choses qui vous déplaisaient, alors votre cerveau se serait concentré sur les deux catégories, non pas sur les sous-catégories.)
Que retenir de tout cela pour améliorer votre quotidien au travail? C'est fort simple :
> Qui entend décupler son plaisir au travail se doit de ranger les tâches à accomplir dans des catégories. Pourquoi? Parce que cela simplifiera sa vue d'ensemble du travail à fournir, et permettra à son cerveau de se concentrer sur les sous-catégories. Imaginez-vous à la tête d'un parc d'attractions : mieux vaut indiquer aux clients qu'il y a une infinité d'activités différentes, plutôt que de dire qu'il y a deux catégories d'attractions.
> Qui entend surmonter ses contrariétés au travail se doit de ranger les tâches à accomplir dans des catégories. Pourquoi? Parce que cela simplifiera sa vue d'ensemble du travail à fournir, et permettra à son cerveau de se concentrer sur les seules catégories. Imaginez-vous à la place d'un dentiste : mieux vous pour lui dire à son patient que l'opération va être effectuée en deux temps, plutôt que de décrire en détails chacun des gestes qu'il va lui falloir accomplir.
Voilà. C'est aussi bête que ça. Prenez l'habitude de faire des catégories, et vous verrez vos contrariétés diminuer d'elles-mêmes, et votre plaisir croître comme par magie.
En passant, le poète italien Giacomo Leopardi disait : «Le plaisir est toujours passé ou futur, jamais présent».
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