L'empathie. Autrement dit, l'art de faire preuve de bienveillance, voire de compassion, à l'égard d'autrui. C'est là l'une des vertus qui contribue à améliorer la vie en société, en particulier au travail. Mais avez-vous remarqué, comme moi, combien elle se faisait rare au bureau?
À votre avis, comment cela se fait-il? Oui, pourquoi avons-nous la fâcheuse manie de taire l'empathie que nous ressentons, à l'occasion, au travail? Est-ce parce que nous ne voulons pas que l'autre se méprenne, en croyant que nous avons pitié de lui? Par lâcheté de notre part? Pis, par cruauté, réjouis que nous sommes de voir un collègue mordre la poussière, une réaction certes malheureuse, mais qui découle du fait que nous évoluons dans un univers où la compétition est de jour en jour plus féroce?
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Eh bien, la réponse est assez subtile, semble-t-il. En effet, l'empathie peine à s'exprimer au travail parce qu'elle peut, en vérité, être utilisée à différentes fins. C'est ce que j'ai compris à la lecture d'un vieux numéro du magazine Psychologies, dont un article traitait justement de ce point : «Les expressions d'empathie vont de la compassion désintéressée à la manipulation, en passant par la stratégie carriériste. Cela dit, impossible de vivre en bonne intelligence avec les autres, notamment au travail, si l'on n'en possède pas un certain degré», y dit la psychothérapeute française Béatrice Millêtre.
Et d'ajouter combien l'empathie, utilisée à bon escient, peut se révéler précieuse au bureau : «C'est que cette vertu répond à un double sentiment largement partagé : la peur d'un monde devenu imprévisible, voire brutal pour l'être humain, et le besoin de résister à sa pression, en se montrant justement plus humains les uns envers les autres».
Alors, comment s'y prendre, au juste, pour vraiment faire preuve d'empathie au travail? Pour le savoir, il convient de découvrir quel est votre propre profil empathique. Par exemple, êtes-vous quelqu'un qui a tendance à user d'empathie stratégique? Ou plutôt, d'empathie compassionnelle? Pour vous en faire une idée, je vous invite à répondre au quiz concocté par l'auteure de Six clés pour se sentir enfin à sa place (Payot, 2014).
Le principe est simple : parmi l'ensemble des affirmations suivantes, choisissez celles qui vous correspondent le mieux. Pour ce faire, il vous suffit d'entourer la lettre en majuscule qui la suit (A, B, C ou D).
1. Je suis une véritable 'éponge émotionnelle'. (A)
2. En général, j'ai du mal à mettre des mots sur ce que je ressens. (C)
3. J'ai une grande capacité d'adaptation. (B)
4. On me dit souvent que je sais écouter et coprendre. (D)
5. La colère est l'émotion qui m'est la plus familière. (C)
6. J'ai tendance à proposer mon aide avant d'être sollicité. (A)
7. J'accepte sans mal qu'on décline mon aide. (D)
8. En général, je fais confiance à mon intuition. (B)
9. On me dit souvent que je sais faire preuve de compréhension et d'objectivité. (D)
10. La manifestation des émotions des autres me met mal à l'aise. (C)
11. Je sais exactement quoi dire et à qui pour atteindre mon objectif. (B)
12. On peut facilement m'avoir par les sentiments. (A)
13. Je sers souvent de coach relationnel à mes proches. (B)
14. Ma réserve passe facilement pour de la froideur ou de l'indifférence. (C)
15. On me demande très souvent mon aide. (A)
16. Je suis rarement déçu par le comportement des autres. (D)
17. Il m'est impossible de profiter de quoi que ce soit si quelqu'un dans mon entourage a des soucis. (A)
18. Je ne vois pas l'intérêt de faire part aux autres de ses états d'âme. (C)
19. Je passe beaucoup de temps à observer. (B)
20. Je sais poser des limites quand je suis trop sollicité. (D)
21. Je ne prends pas mes premières impressions pour argent comptant. (D)
22. Je pourrais terminer les phrases de la plupart de mes interlocuteurs. (B)
23. Je remarque rarement si une ambiance est tendue ou si une personne est mal à l'aise. (C)
24. Je suis de ceux que l'on peut appler jour et nuit. (A)
25. Je me méfie de ce qui relève de l'intuition et du subjectif. (C)
26. On me complimente souvent pour ma diplomatie. (B)
27. Voir pleurer un inconnu me fait monter les larmes aux yeux. (A)
28. Il m'arrive d'être débordé par mes émotions. (D)
29. Je ne suis jamais débordé par mes émotions. (B)
30. Certaines personnes ont le pouvoir de me vider émotionnellement. (A)
31. Je décroche très facilement lorsqu'on me parle. (C)
32. Je sens quand c'est le moment de proposer mon aide. (D)
33. J'ai tendance à me soucier davantage du bien-être des autres que du mien. (A)
34. J'aime apporter une aide concrète, mais pas du tout servir de confident. (C)
35. On pourrait parfois me croire manipulateur. (B)
36. Je n'ai pas tendance à juger les autres. (D)
37. Je ne suis pas du tout porté à l'introspection. (C)
38. On me dit souvent que je suis trop gentil et que je devrais apprendre à dire non. (A)
39. Je comprends sans effort des points de vue opposés aux miens. (D)
40. Je sens très précisément l'impression que je fais à mes interlocuteurs. (B)
Bien. Voilà le plus dur de fait. Bravo!
À présent, je vais vous demander de compter le nombre de A, de B, de C et de D que vous avez. Puis, de consulter les commentaires qui vous correspondent :
> Majorité de A. Vous avez une empathie compassionnelle.
«La joie, la colère, la tristesse... Vous sentez tout et prenez tout pour vous. Vous êtes ce qu'on appelle une 'éponge émotionnelle'. (...)
- Le versant positif. Une générosité et une humanité qui ouvrent les coeurs et qui donnent du sens et de la consistance à la vie. Une sensibilité exacerbée favorisant l'émerveillement devant la beauté et la bonté qui se nichent dans les petits racoins du quotidien. La capacité à excuser et pardonner quand les autres jugent et condamnent.
- Le versant négatif. L'épuisement émotionnel et physique. La possibilité de se faire manipuler. La difficulté de trouver la bonne distance dans les relations avec autrui.
- Vers l'équilibre. Rééquilibrez votre dosage 'pensées-émotions', en rationalisant vos émotions ('C'est normal que j'aie de la peine pour lui, sa situation est pénible'), en trouvant la bonne distance ('J'attends d'être sollicité pour intervenir, puis j'évalue ma propre capacité d'aide'), en évitant les surexpositions émotionnelles ('J'arrête de regarder les infos en boucle') et enfin - pourquoi pas? - en vous investissant dans une activité humanitaire ou caritative», recommande Mme Millêtre.
> Majorité de B. Vous avez une empathie stratégique.
«Écouter, observer, calculer... Votre empathie est réelle, à la fois très fine et très stratégique. (...)
- Le versant positif. Le sens de la diplomatie. L'adaptabilité. La faculté de trouver les mots justes pour apaiser, réconforter, encourager. L'aptitude à rebondir et à anticiper.
- Le versant négatif. Le risque de manipulation. C'est le cas lorsque l'autre ne devient qu'un simple outil pour atteindre un but. Une méfiance usante pour vous-même, car à trop planifier, calculer, prévoir, vous perdez spontanéité et confiance.
- Vers l'équilibre. Laissez-vous un peu surprendre par la vie et les autres, en vous empêchant d'user de stratégie pour tout et en lâchant un peu prise sur les moyens mis en oeuvre pour atteindre le but que vous visez. Efforcez-vous de moins influencer ou convaincre les autres, et prenez avec eux, de temps en temps, la direction qu'ils proposent», conseille Mme Millêtre.
> Majorité de C. Vous avez une empathie faible.
«Vous comprenez le comportement, la pensée et les émotions de l'autre, mais à condition qu'il vous donne les clés. (...)
- Le versant positif. L'objectivité. La faculté de ne pas se laisser parasiter par les émotions des autres. Un raisonnement logique, efficace, orienté vers la recherche de solutions concrètes. Le sens de la mesure et de la méthode.
- Le versant négatif. Une mauvaise image auprès des autres (ex.: passer à tort pour un indifférent). La difficulté à identifier vos émotions, et donc à les exprimer. Une propension aux explosions de colère (les émotions accumulées finissent toujours par déborder...). Un raisonnement parfois rigide, mécanique, à force de trop de logique et de factuel. Une vie intérieure en jachère, faute d'y avoir accès.
-Vers l'équilibre. Vous devez vous occuper en priorité de vos émotions. En faisant, plusieurs fois dans la journée, des arrêts sur image (ex.: 'Que suis-je en train de ressentir, en ce moment précis?'). En essayant d'identifier de manière précise l'émotion en question et son impact dans votre corps. Puis, avec les autres, pratiquez le 'partage émotionnel progressif' : exprimez plus souvent devant les autres quelque chose de personnel ou d'émotif, au lieu de quelque chose de cérébral ou factuel (ex.: comparez un événement professionnel à un autre survenu durant votre enfance...). Car cela permet de créer du lien, d'humaniser votre image et de stimuler votre intelligence émotionnelle», préconise Mme Millêtre.
> Majorité de D. Vous avez une empathie équilibrée.
«Vous savez décoder les messages émotionnels, verbaux comme non verbaux, de votre interlocuteur. Vous comprenez vraiment ce qu'il ressent. Vous pouvez même être touché par ses émotions, mais avec une distance qui vous évite d'être envahi par elles. La juste distance est d'ailleurs ce qui vous caractérise : ni trop près ni trop loin, ni indifférent ni intrusif. (...)
«Il n'y a que du positif dans ce positionnement juste, qui laisse les autres libres de leur choix tout en étant compris de vous. Vous êtes apprécié pour cela, et c'est ce qui vous permet de garder votre cap relationnel. En revanche, vous pourriez peut-être demander plus souvent de l'aide et des conseils aux autres, car cela vous permettrait sans doute de donner plus de chaleur à certaines de vos relations et de paraîyre plus vulnérable, et donc un peu moins 'parfait'», estime Mme Millêtre.
Voilà. Vous en savez désormais plus sur l'empathie dont vous êtes capable au travail, et surtout sur ce que vous gagneriez à faire pour y booster votre intelligence émotionnelle. D'autant plus que les autres vous en apprécieront que davantage...
En passant, l'écrivain allemand Johann Wolfgang von Goethe aimait à dire : «On ne vit réellement que lorsqu'on jouit de la bienveillance des autres».
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