La confiance. Un bien si précieux et si fragile à la fois. Chacun de nous voudrait pouvoir faire confiance aux autres au travail, et mieux, l'inspirer. Mais aucun de nous ne sait comment y parvenir au juste. Pas vrai?
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D'où ma joie lorsque je suis tombé sur une étude intitulée : Personal trust increases cooperation beyond general trust. Celle-ci est signée par Antoni Gomila, professeur de psychologie à l'Université des Îles Baléares à Palma de Majorque (Espagne), assisté de son étudiante Cristina Acedo-Carmona. Et elle met au jour des trucs pratiques pour faire régner la confiance au sein d'une équipe.
Ainsi, les deux chercheurs ont invité une centaine d'étudiants à se prêter à une petite expérience. Il s'agissait, dans un premier temps, de répondre à un questionnaire qui visait à établir l'identité des étudiants en même année d'étude qu'eux en qui ils avaient véritablement confiance.
Dans un second temps, les participants ont joué à un jeu permettant d'évaluer le degré de confiance qu'ils avaient envers autrui. Le principe était simple…
Chacun était isolé dans un cubicule, mais savait que la personne avec laquelle il jouait n'était pas loin. Pour certains, c'était quelqu'un en qui il avait une grande confiance, et pour d'autres, quelqu'un qui ne figurait pas dans le cercle restreint des personnes en qui il avait une grande confiance. Il fallait dès lors miser le nombre de jetons de son choix, sachant que l'ensemble des jetons misés et les gains en découlant (les organisateurs ajoutaient moitié plus de jetons) seraient équitablement répartis entre les deux joueurs. Et ce, à trois reprises.
On le voit bien, ce jeu était on ne peut plus stratégique : chacun avait a priori intérêt à miser peu, en espérant que l'autre mise beaucoup, histoire d'empocher une grosse somme, en tous cas supérieure à celle gagnée par l'autre. Mais si chacun agissait de la sorte, les gains allaient forcément être minimes, voire nuls, pour tous les deux. En conséquence, l'idéal était que la confiance règne et que chacun mise gros, si bien que chacun puisse emporter un gain maximal…
Alors? Que s'est-il passé? Cette expérience a permis aux deux chercheurs de découvrir une chose formidable :
> L'atout de la mutualité. Plus les joueurs avaient confiance en eux avant le jeu, plus ils se sont montrés collaboratifs au moment de jouer. Inversement, plus ténu était le lien de confiance entre eux, plus ils avaient tendance à jouer stratégiquement, c'est-à-dire à ne pas coopérer ensemble.
Pourquoi? «Ceux qui ont le plus collaboré entre eux ont agi en fonction d'un principe, celui de la mutualité. C'est-à-dire que chacun avait à cœur d'agir pour le bien de l'autre, à plus forte raison lorsqu'il était convaincu que l'autre pensait de la même façon. Les deux cherchaient donc avant tout le bien mutuel», indiquent les deux chercheurs dans leur étude. Et de souligner : «Plus ceux-ci jouaient, plus la mutualité jouait elle aussi. Y compris au troisième et dernier tour de jeu, où la logique poussait pourtant à jouer stratégiquement pour "gagner" la partie».
Mme Acedo-Carmona et M. Gomila ont, bien entendu, voulu en savoir davantage sur le mécanisme de la mutualité. Ils ont alors analysé le réseau de connexions entre les participants, sachant qu'ils venaient de deux cours distincts, les uns étudiant en psychologie et les autres, en physiologie.
Dans le groupe Psycho, le schéma du réseau montrait huit sous-groupes distincts de personnes se faisant confiance entre elles – des amis d'université, autrement dit. Ces huit sous-groupes étaient la plupart du temps reliés les uns aux autres par l'entremise d'une ou deux personnes, c'est-à-dire que seulement certains nouaient des liens de confiance avec des personnes évoluant dans d'autres sous-groupes. À noter également qu'il y avait des sous-groupes qui n'avaient aucun lien avec d'autres : ces sous-groupes-là ne se côtoyaient finalement jamais, si bien que le niveau de confiance entre leurs membres était, disons, quelconque.
En revanche, dans le groupe Physio, il existait cinq sous-groupes essentiellement reliés entre eux par une personne centrale, au cœur du réseau de connexions. À cela s'ajoutait le fait qu'en général une personne de chaque sous-groupe avait noué des liens de confiance avec plusieurs membres d'autres sous-groupes. Du coup, le réseau de connexions était, ici, nettement plus dense et harmonieux que dans le cas du groupe Psycho.
Qu'est-ce que l'analyse poussée de ces deux réseaux de connexions a permis d'apprendre aux deux chercheurs des Îles Baléares? Ceci :
> Avantage à la petitesse et à l'harmonie. Les sous-groupes les plus petits et évoluant le plus harmonieusement au sein du réseau global de connexions étaient ceux dont les membres se montraient les plus collaboratifs. Et ce, tant avec ceux en qui ils avaient confiance depuis longtemps qu'avec ceux qu'ils ne connaissaient pas auparavant.
«Les groupes de personnes de taille modeste et dont les personnes sont naturellement ouvertes aux autres et à la nouveauté sont ceux qui sont les plus prompts à faire preuve de collaboration. Car leurs membres brillent par leur altruisme, qui est la clé de voûte de la confiance entre deux individus», indiquent Mme Acedo-Carmona et M. Gomila.
Fascinant, n'est-ce pas? Maintenant, que peut-on retenir de tout cela? Eh bien, ça :
> Qui entend développer la confiance au sein de son équipe de travail se doit d'agir comme un catalyseur. Un catalyseur? Ce n'est pas vraiment un leader, au sens classique du terme. C'est plutôt quelqu'un qui, par ses seules présence et attitude, rend possible la chimie entre les personnes du groupe dans lequel il évolue. C'est-à-dire qu'il inspire confiance, et mieux encore, donne aux autres confiance en eux-mêmes.
Comment s'y prend-il, au juste? Le plus simplement du monde, à savoir en se comportant en véritable ami :
– Il écoute plus qu'il ne parle.
– Il dit «oui, et…», et ne dit pas «oui, mais…».
– Il ne juge pas.
– Il apprécie les autres tels qu'ils sont, sans chercher à les changer.
– Il est franc et sincère, et se refuse à taire les "vérités qui fâchent".
– Il donne un coup de main, sans discuter.
– Il s'adapte, et ne se braque pas.
– Il rassemble, et ne divise pas.
– Il n'attend rien en retour.
Voilà. C'est aussi bête que ça. Maintenant, c'est à vous de jouer!
En passant, le philosophe grec Zénon de Cition disait : «Un ami est un autre nous-mêmes».
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