Voilà, C2MTL, c’est fini pour cette année. Trois journées intenses, trois journées trépidantes, trois journées carrément démentes. Trois journées où - pour une fois - les idées étaient vraiment reines. Mieux, déesses, tant elles ont eu d’adorateurs enthousiastes, et même fous de passion. Des adorateurs, je le souligne, en tous genres, puisque j’y ai croisé aussi bien un pdg tatoué et percé de partout qu’un jeune créatif en costume trois pièces.
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Les idées, donc, fusaient de partout, sans une seconde de répit. Cela se produisait dans un nid géant, installé en hauteur, digne du nid des Marsupilami. Sur des vélos stationnaires placés par deux l’un en face de l’autre, histoire de pouvoir discuter à deux autrement, en sortant de sa zone de confort. Ou encore dans des ateliers bondés, où chacun se devait de rivaliser d’ingéniosité avec les autres
C’est d’ailleurs à l’occasion de l’un de ces ateliers que j’ai eu un flash. Les participants semblaient triper comme jamais, à échanger leurs idées avec de parfaits inconnus, à confronter leurs opinions à celles des autres, à s’ouvrir à d’autres réalités que la leur, me suis-je dit. Alors, pourquoi ne donnerais-je pas la chance aux lecteurs du blogue «En Tête» de triper tout autant, dès leur prochaine réunion où doivent être brassées des idées? Ben oui, pourquoi pas?
Go! On y va. Voici comment vous y prendre concrètement pour effectuer une réunion de brainstorming à nulle autre pareille, à l’image de ce qui s’est produit lors de l’atelier tenu par Rangu Salgame, pdg, croissance du capital-risque et prestataire de services, de la multinationale indienne Tata Communications. Un atelier organisé par le cabinet-conseil montréalais f.&co, l'organisateur d'événements Altitude C et Tata Communications.
M. Salgame se tenait debout sur une estrade faite de planches de bois, face à une dizaine de tables longues pouvant accueillir chacune une dizaine de personnes. Il a brièvement expliqué que d’ici 2025 la planète comptera 3 milliards d’internautes de plus qu’aujourd’hui, pour atteindre un total de quelque 6 milliards. Ces futurs internautes proviendront essentiellement d’Afrique et d’Inde. Un grand nombre d’entre eux seront des femmes. Enfin, ils seront connectés presque exclusivement via des appareils mobiles (cellulaires, tablettes, etc.).
«Le prochain trois milliards de personnes connectées représente des opportunités d’affaires incroyables, pour tout le monde. Des opportunités qui doivent être imaginées dès aujourd’hui. Des opportunités qui peuvent se traduire par d’immenses bienfaits pour les populations concernées : croyez-moi, il n’est pas du tout indécent de faire de l’argent avec les ‘pauvres’, car, en vérité, les produits et services qu’on leur apporte ainsi peuvent être d’une valeur inestimable pour eux puisqu’ils peuvent changer leur vie radicalement, pour le mieux, bien entendu», a-t-il dit.
Francis Gosselin, président et cofondateur, de f.&co, a enchaîné en indiquant à la centaine de participants qu’il allait leur falloir plancher sur le thème suivant : «Que pourrait-on faire pour répondre aux nouveaux besoins des futurs trois autres milliards de personnes connectées sur la planète?». Et il leur a dévoilé comment allait se dérouler le brainstorming collectif. En cinq étapes :
1. Balancez toutes les idées qui vous passent par la tête. En l’espace de 10 minutes, chacun se devait d’écrire à la main, sur une feuille de papier, toutes les idées qui lui venaient en pensant à la thématique proposée. Les bonnes comme les moins bonnes. Soit tous les nouveaux besoins des futurs internautes, et toutes les solutions qui pourraient être envisagées pour y répondre adéquatement. À noter qu’un facilitateur - de f.&co - était présent à chacune des tables pour animer la discussion.
2. Sélectionnez le Top 5 des meilleures idées émises à la table. En l’espace de 10 minutes, chacun se devait de partager le fruit de son travail avec les autres. Et tous ensemble, ils devaient en choisir les 5 meilleures. À noter, ici, qu’une attention particulière devait être portée par le groupe à ceux qui semblaient les plus timorés ou timides : «C’est que trop souvent d’excellentes idées viennent de personnes introverties, des idées malheureusement écrasées par l'exubérance des introvertis», a souligné le maître de cérémonie.
3. Sélectionnez le Top 1 de vos idées. En l’espace de 10 minutes, chaque groupe devait ne retenir qu’une seule idée de son Top 5. La meilleure de toutes. À noter, cette fois-ci, qu’il était envisageable de la trouver en en combinant deux ou trois, selon M. Gosselin.
4. Préparez votre pitch. En l’espace de 5 minutes, chaque groupe devait rédiger le texte de présentation de leur meilleure idée. En 140 caractères, à l’image d’un tweet. Et l’accompagner d’une image - photo ou dessin - résumant le fait saillant de l’idée retenue.
5. Faites votre pitch. La personne choisie par le groupe se devait de grimper sur la scène et d’y présenter leur idée de génie. En 1 minute très exactement, pas une seconde de plus (un chronomètre figurait derrière lui, sur un écran géant).
On le voit bien, le tout était réglé en un peu moins d’une heure. Et tout ça paraît a priori on ne peut plus simple, n’est-ce pas? Mais attention. Car, l’air de rien, un tel procédé est parsemé d’embûches. Par exemple, il suffit que la chimie ne prenne pas à une table pour qu’aucune idée pertinente en ressorte, ou encore qu’un des participants prenne spontanément les choses en mains et empêche, par le fait même, les autres d’exprimer leur plein potentiel. D’où la présentation d’un manifeste auquel chacun se devait d’adhérer sans discuter :
> Non à la critique. Aucun commentaire négatif ne devait être exprimé à l’égard d’autrui et de ses idées. Chacun se devait, donc, de penser «oui, et...» au lieu du sempiternel «oui, mais...», qui casse tant de bonnes idées mal exprimées sur le moment.
> Oui aux idées débridées. Plus une idée paraît folle, plus il faut la partager avec les autres. Car seules les idées folles qui font vraiment avancer la réflexion des uns et des autres.
> Oui au tremplin des idées. Lorsqu’une idée folle voit le jour, elle donne à chacun une occasion en or de rebondir sur elle. Et donc, d’aller de plus en plus haut, là où personne ne pensait au départ pouvoir aller un jour.
> Oui à la quantité & non à la qualité des idées. Pour avoir une idée géniale, il convient d’en émettre des tonnes avant. Des bonnes comme des moins bonnes. Peu importe, dans le fond, leur qualité, car une idée ne prendre de valeur qu’en étant croisée avec une autre, suivant un savant calcul qui veut qu’à ce moment-là 1+1=3.
> Oui aux discussions franches et ouvertes. Il est crucial que les membres du groupe discutent sans cesse entre eux, et non pas qu’ils réfléchissent seulement chacun de leur côté, le nez collé à leur feuille de papier. Tous ensemble, y compris ceux qui sont a priori moins à l’aise que les autres, pour mille et une raisons (timidité naturelle, manque d’assurance, etc.).
> Oui à l’essence des idées. L’essence d’une idée, c’est la plus simple expression qu’elle puisse avoir. Autrement dit, il faut apporter une grande attention à la formulation des idées émises, surtout celles retenues pour le Top 5 et la suite. Cela étant, il ne faut pas pour autant passer tout son temps à ça : l’important, c’est d’être clair et concis, pas d’être parfait.
Voilà. Vous savez tout, à présent. Vous êtes en mesure d’effectuer une réunion de brainstorming digne de celles de C2MTL. Si, si…
Bon. Vous vous demandez peut-être si cette méthode est si efficace que ça. Une interrogation légitime. Aussi vais-je partager avec vous quelques-unes des idées qui sont ressorties de l’atelier de Rangu Salgame :
> Guérir d’un clic. On pourrait créer une application permettant à un malade dans un village perdu en Inde d’entrer gratuitement en contact avec le médecin d’une ONG nord-américaine, lequel, via la vidéo et d’autres technologies, pourrait faire un diagnostic et donner des conseils pour guérir au plus vite.
> Apprendre d’un clic. On pourrait créer un appareil électronique mobile ultrasimple permettant à un enfant ou un adulte d’un village perdu en Afrique d’apprendre à lire et à compter. Ce gadget se rechargerait par le mouvement de celui qui l’a en sa possession ou par l’énergie solaire. Et il permettrait à son détenteur de faire partie d’une communauté internationale de personnes de son niveau, chacun pouvant librement communiquer avec tous les autres. Le tout, gratuitement.
> Troquer le savoir d’un clic. On pourrait créer une application permettant à chacun d’échanger un savoir contre un autre savoir. Il n’y aurait là aucun échange monétaire. Par exemple, l’un apprend à l’autre comment jouer au baseball, lequel, en échange, lui apprend comment fabriquer un instrument de musique avec des boites de conserve.
> Recycler d’un clic. On pourrait créer une application permettant à chacun d’indiquer aux autres ce qu’il détient comme produit qui pourrait être recyclé, mais que lui ne peut faire, ainsi que les produits qu’il aimerait recycler, mais dont il ne dispose pas. Par exemple, l’habitant d’un village indien pourrait indiquer qu’il a des bidons en plastique dont il ne sait que faire et qu’il souhaiterait les échanger contre des bouts de métal, qu’il n’a pas malheureusement ; et l’habitant d’un village voisin pourrait se montrer intéressé à un tel échange.
Fascinant, vous ne trouvez pas? Quant à moi, j’ai été renversé par tant de créativité, en moins d’une heure, je le répète. Quant à M. Salgame, je peux vous confier que ses yeux brillaient en entendant tout ça. Il a même lancé à brûle-pourpoint qu’il était prêt à investir tout de suite dans l’idée «Apprendre d’un clic»…
Que retenir de tout cela? Ceci :
> Qui entend brainstormer aussi bien qu’à C2MTL se doit d’oser la folie contagieuse. Il lui faut organiser une réunion à la Salgame-f.&co, en respectant chacune des 5 étapes et en suivant à la lettre le manifeste. Et ce, soit en formant un seul groupe d’une dizaine de personnes, soit en formant plusieurs petits groupes de 2 ou 3 personnes chacun. À vous de voir. La clé étant, à ne pas douter, de miser sur le fait que la folie est contagieuse et mène, bien souvent, aux idées de génie.
En passant, le physicien helvético-américain Albert Einstein disait : «Si une idée n’est pas a priori absurde, elle est sans espoir».
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