BLOGUE. Aviez-vous déjà remarqué que l'on ne parle pas de la même façon quand on s'adresse à une, deux ou encore cinq personnes? Ou même 10, 20 ou 50? Par exemple, plus l'auditoire est élevé, plus on a le réflexe de rédiger à l'avance ce qu'on a à dire et à coller au texte au moment de le livrer en public. Idem, plus on parle à de gens, plus on a tendance à donner des explications, afin de s'assurer que tout le monde saisit ce qu'on dit.
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Mais voilà, est-ce là la meilleure façon d'agir? Oui, est-ce la manière la plus efficace de faire passer un message à plusieurs personnes à la fois? Une étude permet de répondre à ces interrogations cruciales pour tout leader qui se respecte. Celle-ci est intitulée Audience design through social interaction during group discussion. Elle est signée par trois professeurs de psychologie de l'Université d'Australie-Occidentale à Perth (Australie) : Shane Rogers, Nicolas Fay et Murray Maybery.
Ainsi, les trois chercheurs ont procédé à trois expériences visant à identifier la meilleure manière de parler aux autres, surtout lorsqu'ils sont nombreux. Trois expériences riches en enseignements, comme vous allez vite vous en rendre compte.
Dans la première, il a été demandé à 100 volontaires de décrire par écrit 18 dessins différents issus du jeu Tangram (vous savez, ces sept pièces en bois – carré, triangle,… – qui permettent de représenter des silhouettes d'animaux ou de bonhommes en train, entre autres, de danser). Pour un quart des participants, il était précisé que ces descriptions allaient servir seulement à eux-mêmes, plus tard; pour un autre quart, qu'elles étaient destinées à une autre personne; pour un autre quart, à quatre autres personnes; et pour le dernier quart, à neuf autres personnes.
Résultat? Fort simple :
> Inflation de mots. Quand on s'adresse à soi-même, on est succinct. Mais dès qu'on s'adresse aux autres – et ce, quel que soit leur nombre – on augmente le nombre de mots de notre message.
Dans la deuxième expérience, 250 autres volontaires ont été répartis dans des groupes qui étaient composés de 2, 3 ou 5 personnes. À chaque fois, l'un des membres du groupe était chargé de rédiger une description de ces mêmes 18 dessins du jeu Tangram, à l'attention de ses coéquipiers ; et il devait quitter la salle. Puis, l'un des membres du groupe devait lire pour lui-même chaque description pour ensuite l'expliquer – avec ses propres mots – aux autres, l'objectif étant de trouver ensemble le dessin correspondant à la description.
Résultats? Là encore, fort simples :
> Confirmation. Tout comme dans la première expérience, plus le groupe était grand, plus celui qui rédigeait les descriptions utilisait de mots.
> Une moindre inflation de mots. Plus le groupe était grand, plus celui qui était chargé de transmettre la description aux autres utilisait de mots. Néanmoins, à groupes comparables, il en utilisait un peu moins que celui qui avait rédigé la description initiale.
> Discussions. Plus le groupe était grand, plus il y avait de discussions entre ses membres pour trouver les dessins correspondants aux descriptions.
Enfin, la dernière expérience consistait à demander à 175 autres volontaires de lire les descriptions initiales, après avoir été répartis dans différentes sortes de groupes, comme dans les deux précédentes expériences. Après lecture, ils devaient dans un premier temps chercher chacun tout seul les dessins correspondants, et dans un second temps, en délibérant en groupe.
Résultat? Toujours aussi simple :
> Avantage à l'interaction. La performance en groupe a été nettement meilleure que celle en individuel. C'est-à-dire que le message est mieux passé quand celui-ci a été discuté à plusieurs plutôt qu'analysé tout seul dans son coin.
Par conséquent, on peut tirer deux leçons de cette étude :
> Un effort vain. Plus notre auditoire est grand, plus nous avons tendance à faire de longues explications. Le hic? C'est que cela n'aide pas à mieux faire passer notre message.
> La cible, pas le messager. Ce qui permet au message de passer ne tient pas vraiment, en fait, au messager, mais à ceux à qui celui-ci s'adresse. Plus précisément, à la possibilité qu'ont les gens de discuter entre eux, par la suite, du message. Si cette possibilité existe réellement, alors le message passera. Sinon, il passera difficilement, voire pas du tout.
Voilà. À vous désormais de jouer, en vous efforçant de faire bref et surtout en veillant à favoriser les échanges au sein de l'auditoire.
En passant, l'écrivain irlandais Oscar Wilde aimait à dire : «Je déteste les discussions, elles vous font changer d'avis».
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