Au travail, il arrive toujours un moment où il nous faut tenir une discussion difficile. Qu’on le veuille, ou non. Ça peut consister à annoncer un gel des salaires, démentir une rumeur, ou encore admettre qu’on n’atteindra pas les objectifs visés. Le hic ? C’est que nous avons alors trop souvent le réflexe de l’autruche, qui met sa tête dans le sable pour ne pas voir la réalité en face. Oui, nous n’avons pas le courage de la sincérité. Pas vrai ?
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Cette préoccupation est mienne – et je suis sûr de ne pas être le seul – depuis une éternité. D’où mon ravissement à la découverte d’un livre intitulé Le courage de dire – Transformez 22 conversations difficiles en communication inspirante (Les Éditions Gestionnaires inspirants, 2014), signé par Isabelle Lord, formatrice et coach professionnelle ainsi que blogueuse sur Lesaffaires.com. Y sont présentés une foule d’astuces pour avoir enfin le cran d’aborder des sujets sensibles avec ses employés, dont je vais me faire un plaisir de partager l’un d’eux avec vous. Lequel ? Eh bien, au hasard, l’art d’annoncer le départ d’un employé clé…
«Un employé clé, c’est quelqu’un qui génère des résultats, quelqu’un sur qui vous pouvez compter. C’est un modèle, une personne qui inspire ses collègues. Bref, un employé que vous ne pouvez pas vous permettre de perdre.
«Plus l’équipe est petite, plus son départ fait mal. Ce départ risque e vous déstabiliser et de vous faire vivre un bouquet d’émotions : de la peine à la colère, en passant par la déception et la frustration ; peut-être aussi un sentiment de culpabilité de n’avoir pas su garder cette précieuse ressource, voire un sentiment d’impuissance.
«Aussi, je vois deux phases dans cette conversation difficile : recevoir la nouvelle et annoncer la nouvelle. Quelle que soit votre émotion au moment de recevoir la nouvelle, il est impératif de l’avoir évacuée avant de passer à la seconde phase. Donnez-vous du temps entre les deux, c’est ce qui vous sera le plus utile pour transformer cette conversation difficile.»
Recevoir la nouvelle
«Dans nombre d’ouvrages sur la mobilisation, on répète qu’on joint une entreprise, mais qu’on quitte un patron. Alors, les premières questions qui vous viendront en tête risquent de ressembler à ça : «Est-ce que j’y suis pour quelque chose dans sa décision de partir ?», et autres «Qu’est-ce que j’aurais pu faire pour le retenir ?». Ces interrogations sont parfaitement légitimes et, en tant que patron, vous avez la responsabilité de trouver les réponses. Mais voilà, sous le coup de l’émotion, vous ne serez pas en position pour y répondre adéquatement. Allez plutôt ventiler vos émotions, avant de tenter d’y répondre, ou, mieux, de demander à quelqu’un d’autre de le faire. (…)
«S’il y a trop d’émotions qui montent au moment où vous apprenez la démission de votre employé clé, n’éclatez pas, reportez la conversation à plus tard. Une façon simple de le faire est de prétexter un autre engagement (réunion incontournable, appel téléphonique crucial, etc.), afin d’abréger la discussion. Par exemple : «Là, j’ai une réunion vraiment importante, je dois partir. Je te propose qu’on s’en reparle demain. Sache que je suis peiné, et j’aimerais beaucoup qu’on s’en reparle avant de l’annoncer à l’équipe».
«Si vous vous sentez assez solide, vous pouvez tout simplement dire: «C’est un choc, laisse-moi le temps de le digérer, avant de l’annoncer aux autres». Combien de temps ? Une journée ouvrable, pas plus. Vous pouvez aussi demander si d’autres personnes sont au courant dans l’équipe. Cette information vous permettra d’adapter votre discours en conséquence. (…)»
Annoncer la nouvelle
«Si vous êtes trop émotif devant vos employés en annonçant la nouvelle, s’ils vous sentent d’emblée défait, vous allez forcément envoyer des signaux négatifs sur votre propre compte ainsi que sur la confiance ou l’estime que vous inspirez auprès des autres. Vous ne dégagerez pas l’image d’un chef en pleine possession de ses moyens, ce qui est toujours inquiétant pur une équipe. Certains pourraient même se demander si le bateau n’est pas en train de couler et s’il ne vaudrait pas mieux se chercher un emploi ailleurs. Mais si vous avez évacué vos émotions, cela ne devrait pas se produire.
«Lors de l’annonce, il est capable de faire preuve d’ouverture. Il faut que les gens voient que vous estimez la personne qui s’en va, que vous êtes peiné, mais en même temps que vous lui voulez du bien et tenez à ce que l’équipe continue de briller. Pour en faire la démonstration, je vous conseille de faire l’annonce en présence de l’employé démissionnaire. Cela indiquera que vous avez partagé la décision avec lui, que vous l’avez acceptée avec maturité. C’est ce que les gens retiendront. N’hésitez pas à faire état des aspects positifs de cette nouvelle, qui ouvre peut-être des opportunités à ceux qui restent et des collaborations possibles avec l’entreprise que va rejoindre la personne qui s’en va.
«Pendant l’annonce, soyez attentif au langage non verbal de votre auditoire. Si vous percevez que des gens sont très affectés par la nouvelle, prenez note d’assurer un suivi auprès d’eux.
«Pour finir, il y a peut-être une question qui vous trotte dans la tête depuis que l’employé vous a annoncé la nouvelle : «Est-ce que j’aurais pu le voir venir ?» Afin d’éviter une autre surprise du genre, je vous invite à porter attention aux signes avant-coureurs d’un départ : la personne est moins assidue au travail, elle a une attitude plus passive, vous la sentez plus distante, elle demande des congés non rémunérés, etc. Ne laissez pas filer ces signes-là, réagissez rapidement ! Rencontrez la personne concernée, demandez-lui comment ça va dans son travail, creusez. Et n’hésitez pas à lui dire : «Je veux te garder» ou «Je ne veux pas que tu t’en ailles».»
Voilà. Il s’agit-là d’un exemple éclatant de conversation difficile que tout manager ou leader sera amené, un beau jour, à avoir. Je suis convaincu qu’avec de tels conseils pratiques il vous sera plus aisé d’y faire face avec justesse.
En passant, l’écrivain britannique Laurence Sterne a dit, non sans malice, dans son Voyage sentimental à travers la France : «Tant pis et Tant mieux sont les deux grands pivots de la conversation française».
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