BLOGUE. C'est comme le serpent qui se mord la queue : quand on veut accroître l'engagement des membres de son équipe, on les invite en général à en faire plus, en leur offrant davantage de ressources; mais comme on leur en demande plus, certains se mettent à peiner, voire à caler; tout ça se finit par des burnouts, et par une baisse de la productivité. Malheureusement, on voit ça se produire tous les jours autour de nous.
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Comment s'en sortir? Oui, comment mettre fin à ce cercle vicieux, et même le transformer en cercle vertueux? Une solution intéressante figure dans l'étude Engagement vs. Burnout: An examination of the relationships between the two concepts within the framework of the JD-R model, signée par deux professeurs de l'École de commerce Esade (Espagne), Simon Dolan et Ronald Burke, assistés de leur étudiant Scott Moodie. Celle-ci suggère notamment de miser sur l'affinité…
Ainsi, les trois chercheurs ont demandé à 2 115 infirmières espagnoles de bien vouloir remplir en ligne un questionnaire détaillé sur leur quotidien au travail. Pourquoi des infirmières? «Parce que cette profession est notoirement connue pour la détérioration grandissante de ses conditions de travail et pour son niveau élevé de burnouts», indiquent-ils dans leur étude. Avec les 2 094 questionnaires qui ont été correctement remplis, ils ont réparti les infirmières dans quatre catégories distinctes, soit :
> Faible engagement & faible burnout (FEFB);
> Faible engagement & burnout élevé (FEBE);
> Engagement élevé & faible burnout (EEFB);
> Engagement élevé & burnout élevé (EEBE).
Puis, ils ont identifié, à travers les réponses obtenues, quatre facteurs liés – positivement ou négativement – tant à l'engagement qu'au burnout, soit :
> Les tâches à accomplir;
> Les ressources disponibles;
> Le soutien social (du manager, des collègues et du conjoint);
> L'affinité de l'employé avec son travail (tant du point de vue de l'ancienneté que de l'attachement émotif).
Forts de toutes ces données, MM. Dolan, Burke et Moodie se sont servis du modèle de recherche JD-R mis au point par Evangelia Demerouti, aujourd'hui professeure de management à l'Université d'Utrecht (Pays-Bas), et différents collègues durant les années 2000. Ce modèle considère grosso modo qu'une situation de burnout survient dès lors que la quantité de tâches à accomplir dépasse les ressources disponibles. Il permet de déterminer si un facteur précis est corrélé, ou pas, au déclenchement du burnout.
Ils ont, comme ça, examiné toutes sortes de corrélations possibles entre les quatre profils d'infirmières et les quatre facteurs liés à l'engagement et au burnout. Avec différentes sortes de calculs régressifs et d'outils de recherche similaires au JD-R. Qu'ont-ils appris? Plusieurs choses passionnantes…
> L'engagement et le burnout sont liés l'un à l'autre. Et ce, de manière inverse : par exemple, quelqu'un d'engagé dans son travail a en général un faible niveau de burnout (67% des cas).
> Le burnout découle directement des tâches à accomplir. Car les catégories à faible burnout avaient systématiquement peu de tâches à mener à bien, et celles à burnout élevé, beaucoup de tâches à accomplir.
> L'engagement résulte essentiellement des ressources disponibles et de l'affinité. C'est-à-dire que les employés les plus engagés sont ceux qui disposent des moyens nécessaires pour atteindre leurs objectifs et ceux qui se sentent à l'aise dans leurs fonctions.
> Le soutien social peut jouer sur le burnout, pas vraiment sur l'engagement. Ce qui prend le contre-pied de l'idée reçue selon laquelle un employé s'investira à fond dans une mission s'il sent qu'il a l'appui de son boss ou s'il compte briller aux yeux de ses collègues ou de sa dulcinée.
Ces trouvailles ont plusieurs implications pour notre quotidien au travail, comme l'indiquent les trois chercheurs de l'Esade :
> Penser autrement. Il convient d'arrêter de penser en termes d'engagement et de burnout, car ils ne sont, si l'on veut, que les deux faces d'une médaille. L'important, on le voit bien, est la médaille, pas ses deux faces. Or, de quoi est faite celle-ci? Eh bien, elle est l'alliage de deux métaux : les tâches à accomplir et les ressources disponibles. «Si l'on parvient à trouver le bon dosage des deux – des exigences et des ressources –, de bons résultats en découleront nécessairement : les employés vont davantage s'engager dans ce qu'ils font et le risque de burnout ira en diminuant», disent-ils.
> Miser sur l'affinité. «Un des éléments clés de la réussite d'une telle opération, c'est de chercher à améliorer les conditions de travail et le bien-être des membres de son équipe», soulignent-ils. Ce qui peut se faire par le biais de l'affinité : l'idée est alors de tout faire pour que chacun se sente «bien dans ses baskets» au bureau. C'est aussi simple que ça.
Subtil, vous ne trouvez pas? Encore fallait-il y penser, et trouver le moyen de le prouver. Maintenant, vous savez ce qu'il vous reste à faire, si vous voulez voir vos stars briller de tous leurs feux…
En passant, Sénèque disait : «Un athlète ne peut arriver à une compétition très motivé s'il n'a jamais été mis à l'épreuve».
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