BLOGUE. Qui ne souhaite pas être plus créatif, dans sa vie comme au travail? Oui, qui ne rêve pas d'avoir plus souvent des idées géniales, susceptibles d'améliorer son quotidien? Et quel n'est pas le leader qui souhaiterait que son équipe fasse preuve de davantage d'esprit d'innovation? La réponse à ces interrogations va de soi, bien entendu. Le hic? C'est que devenir plus créatif, c'est plus facile à dire qu'à faire, me direz-vous…
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Alors, détrompez-vous! Se mettre soudain à bouillonner d'idées, c'est beaucoup plus simple qu'il n'y paraît. Si, si… C'est ce que montre une étude intitulée Job design and innovative work behavior: Enabling innovation through active or low-strain jobs, signée par quatre chercheurs de l'Institut de recherche sur le travail et la société de l'Université catholique de Louvain (Belgique), soit Stan de Spiegelaere, Guy van Gyes, Sem Vandekerckhove et Geert van Hootegem.
Les quatre chercheurs ont découvert, dans un premier temps, qu'il n'y avait pas d'études faites sur les liens entre trois composants essentiels de la créativité au sein d'une équipe de travail, à savoir les conditions de travail, les habitudes des employés en matière de créativité ainsi que leur niveau d'engagement au travail. Étonnés, ils ont vérifié leur constat : il existe certes nombre d'études sur les liens entre deux de ces composants, mais jamais sur ceux entre les trois en même temps. D'où leur idée, dans un second temps, de se lancer dans un tel travail.
On pourrait se dire a priori qu'un tel travail n'a guère d'utilité. Il semble logique que plus les conditions de travail sont bonnes, plus l'équipe est habituée à chercher des idées neuves et plus l'équipe est engagée dans ce qu'elle fait, plus elle se montrera créative. Et inversement. Mais raisonner de la sorte revient à vouloir aller plus vite que la musique, et donc à se tromper lourdement, comme vous allez vous en rendre compte…
MM. De Spiegelaere, Van Gyes, Vandekerckhove et Van Hootegem ont mené un sondage auprès d'un millier d'employés travaillant dans 17 entreprises flamandes, lesquelles étaient impliquées dans un programme européen de dynamisation de l'innovation. Ce sondage visait à obtenir une multitude de données dans trois domaines précis :
> Le design du poste. Par ce terme, les quatre chercheurs entendent la présentation de tout poste de travail en fonction de deux critères : le niveau de contrôle de l'employé sur son travail et le niveau de demandes effectuées par l'employeur auprès de l'employé. Par exemple, un poste peut offrir à un employé une grande latitude dans ses décisions et ses interventions, mais aussi être à risque si l'employeur a en même temps des attentes élevées, ce qui représente une combinaison assez stressante.
> Le comportement innovant au travail (CIT). Cela représente les habitudes de l'employé en matière d'innovation, c'est-à-dire dès qu'il s'agit de «produire, introduire et/ou appliquer une idée, un procédé ou une procédure au sein de son équipe ou de son entreprise».
> L'engagement. Il est ici défini comme «un état d'esprit positif, volontaire et contagieux au travail» et se traduit souvent par «une vigueur, une implication et une réalisation de tâches remarquables».
Les quatre chercheurs ont récolté toutes les informations dont ils avaient besoin, étudié les éventuelles corrélations entre elles et vérifié leurs trouvailles par une analyse par régressions multiples. Résultats? Voici les cinq principaux :
> Plus on est libre d'organiser son travail, plus on a un CIT élevé et plus on est engagé dans son travail.
> Plus on est en situation d'apprendre dans son quotidien au travail, plus on a un CIT élevé et plus on est engagé dans son travail.
> Le degré d'autonomie que l'on a au travail n'a guère d'impact sur le CIT et l'engagement.
> Plus le travail est routinier, plus l'engagement diminue ; en revanche, la routine n'a pas vraiment d'impact sur le CIT.
> Plus les attentes de l'employeur sont élevées, plus l'engagement diminue ; quant au CIT, l'impact n'est pas très clair, tantôt il est positif, tantôt il est négatif, et ce, en raison vraisemblablement de facteurs qui n'ont pas été pris en compte par cette étude.
À cela s'ajoute deux constats importants :
> Les CIT les plus élevés ont été enregistrés chez ceux qui occupent des postes soumis à peu de contraintes, c'est-à-dire où le niveau de contrôle est élevé et le niveau des demandes est faible.
> Contrairement à ce qu'on aurait pu croire a priori, les CIT ne sont pas élevés pour les postes réputés "hots", c'est-à-dire où le niveau de contrôle est élevé et le niveau des demandes est, lui aussi, élevé.
Que retenir de tout cela? Deux enseignements on ne peut plus précieux, à mon avis. Si vous voulez vraiment dynamiser la créativité au sein de votre équipe :
1. Donnez à vos employés davantage de contrôle sur leur travail, et en particulier sur leur organisation des tâches à accomplir.
2. Diminuez vos attentes à l'égard de votre équipe, afin de les mettre le moins possible sous pression.
Bref, en une exclamation : «Lâchez-leur la bride!». Car vous les verrez alors se mettre à galoper comme des chevaux ivres de liberté et… éternellement reconnaissants envers leur libérateur.
En passant, l'homme d'État athénien Périclès aimait à dire : «Il n'est point de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage».
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