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Lors d'un de nos récents blogues (cliquer ici pour visionner), un lecteur se questionna en ces termes :
Bonjour, j'aimerais vous poser une autre question sur la manière de gérer son portefeuille. Vous est-il arrivé d'avoir le choix entre une entreprise d'exception à un bon prix et une entreprise banale à un prix incroyable ? Buffett dit qu'il faut prendre la meilleure entreprise même s'il faut attendre des années avant de voir le titre monter. Alors que pour la compagnie banale, il suffirait d'attendre quelques mois...C'est le choix qui se trouve devant moi. Que feriez-vous ?
Il s'agit d'une question fort pertinente, car le conseil que prodigue M. Buffett publiquement s'avère très valable. Investir dans des sociétés de qualité peut nous éviter bien des maux de tête. Toutefois, il arrive que l'on déniche une société qui ne se démarque point en termes de rentabilité, mais dont le prix est particulièrement alléchant. Devrait-on laisser passer systématiquement ces opportunités, et user de sagesse en demeurant investi dans les sociétés exceptionnelles?
En réalité, un investisseur qui scrute minutieusement toute la littérature disponible au sujet de Warren Buffett découvrira qu'il semble proférer deux discours différents. L'un s'adresse au grand public, et se veut un appel à la prudence et au gros bon sens. Ainsi, il met l'emphase sur la qualité des sociétés, l'investissement à long terme et sur le rapprochement entre les titres boursiers et les entreprises que ces derniers représentent.
Le deuxième discours se veut un peu plus discret, puisqu'il s'adresse davantage aux mordus de l'investissement. Il fait davantage référence à la recherche intensive d'opportunités, aux sociétés et bourses peu liquides et aux produits dérivés. En 1996, M. Buffet avait déclaré qu'il pouvait garantir un rendement minimum de 50% par année sur un petit portefeuille. Il ne fait nul doute que pour obtenir de tels rendements, il ne suffit point de sélectionner quelques entreprises solides pour ensuite les détenir sur de nombreuses années.
Or, nous savons qu'un gros portefeuille ne pourrait point profiter des petites entreprises dont les titres offrent peu de liquidités à la bourse. Toutefois, lorsque M. Buffett s'adresse au grand public, il ne parle pas nécessairement qu'à des multimillionnaires! Il sait fort bien que la plupart des gens détiennent des portefeuilles qui ne surpassent pas un ou deux millions de dollars. Alors, pourquoi discuter avant tout d'une façon d'investir qui engendre des rendements plus modestes?
Nous pensons que l'élément essentiel expliquant ce fait repose dans le temps et le talent requis pour engendrer ce genre de rendement. Investir comme il le faisait dans son partnership dans les années 50 et 60 exige une quantité de recherches gigantesque. Chercher à l'imiter sans y mettre beaucoup d'efforts conduirait probablement à des résultats désastreux. En agissant ainsi, M. Buffett ne rendrait pas service à ses lecteurs ou auditeurs. Vaut mieux prodiguer des conseils qui seront potentiellement suivis par un grand nombre de personnes. Par la suite, ceux qui désirent aller plus loin creuseront davantage par eux-mêmes. Ils seront intrigués par ses petits commentaires lancés de temps en temps, tels que celui qui mentionne le fameux 50% de rendement. Un autre exemple constitue l'attrait du ''pink sheets'' pour Buffett. La plupart des investisseurs seront peu intéressés à effectuer des recherches à partir des sociétés qui se transigent sur des bourses obscures. Heureusement que c'est le cas! La majorité des sociétés qui s'y trouvent sont déficitaires. Le risque d'erreur s'avère élevé. À l'opposé, ce genre de bourse peut servir de point de départ pour les investisseurs minutieux et ambitieux.
Pour répondre à la question de notre lecteur, les deux possibilités doivent être considérées en tant qu'investissement. Plusieurs facteurs peuvent pencher en faveur de l'un ou de l'autre. Nous pensons que c'est du cas par cas. Nous ajouterions que le jugement s'améliore beaucoup avec l'expérience. À force de constamment évaluer des entreprises et des situations d'investissement, on arrive à déceler leurs faiblesses et leurs forces, et ainsi déterminer quel investissement procurera le meilleur potentiel de rendement avec le moins de risque possible.
P.S.: Pour les intéressés, nous approfondissons la question au chapitre 10 du document : démystifier la marge de sécurité.
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com