BLOGUE. Pourriez-vous imaginer une augmentation de 600% de vos primes d'assurance sur la maison? Ce serait une aberration totale, nous direz-vous. C'est pourtant ce qui se produit dans certains coins de la Floride actuellement. Ranger Dockery et son mari ont acheté une maison en Floride il y a cinq mois. Prenant pour acquis que leur assurance allait leur coûter 2000$ par an, ils ont été estomaqués d'apprendre que la facture s'élèvera plutôt à 14 000$.
L'an dernier, le congrès américain a apporté des modifications au programme fédéral d'assurance contre les inondations. Ce programme est déficitaire, cumulant environ 25 milliards de dollars en déficit depuis 1968. Si l'état défraie moins d'argent pour ce programme, les assureurs doivent prendre le relais, et ainsi augmenter les primes en conséquence.
Or, ce programme a contribué par le passé à gonfler la valeur des habitations qui se trouvent dans les zones considérées ''à risque''. Si vous recherchez une propriété près d'un cours d'eau, et que l'on vous dit que la prime d'assurance atteint au moins 10 000$ par an, vous établirez un certain coût total à retrancher du prix de l'habitation afin de tenir compte de cet important débours.
Des conséquences inattendues
Les conséquences de ces changements de règles au sein du programme fédéral s'avéraient inattendues. ''Ni les démocrates, ni les républicains n'envisageaient la possibilité que cela engendre autant de problèmes'', s'exclama Maxine Waters, un démocrate qui avait appuyé ce changement.
D'après l'article suivant (cliquer ici), l'évaluation des propriétés se situant dans les zones à risque en Lousiane s'est déjà effondrée de 30% suite aux nouvelles règles. Quant à Mme Dockery de Floride, elle pense devoir revendre sa propriété nouvellement acquise à perte. Elle ne se doutait point de l'imminente explosion des primes d'assurance.
Nous savons bien que la majorité des propriétés qui jouissent de la proximité d'un cours d'eau se vendent à des prix plus élevés. Pourtant, les zones propices aux inondations devraient ramener ces prix à des niveaux qui tiennent compte des coûts de remplacement et de maintenance probables. L'industrie de l'assurance constitue un bon baromètre pour évaluer ces risques, puisqu'elle tarifie ses produits en fonction de ces éventualités. Lorsque le gouvernement intervient en compensant les propriétaires qui se trouvent dans des zones à risque, il contribue à abaisser le coût des primes, ce qui gonfle artificiellement le prix des habitations.
On paie pour les privilégiés
Que fut le résultat du programme fédéral? Ceux qui ne bénéficient pas d'une vue spectaculaire sur le fleuve, la rivière ou la mer payaient pour ceux qui en jouissent. Le gouvernement a réalisé cette anomalie, et tente de corriger le tir. Toutefois, cela ne se produit pas sans heurt. Les propriétaires qui se retrouvent dans les zones risquées ont payé le prix fort pour acquérir ces habitations ''subventionnées'' par l'état. Le retour à une politique plus équitable doit donc se faire très graduellement, et il existe probablement plusieurs solutions pour atténuer l'impact de telles mesures.
L'une de ces solutions pourraient peut-être résider dans l'accroissement de la compétition, en instaurant des incitatifs pour amener l'industrie de l'assurance à assumer davantage de risques. Nous songions notamment aux congés d'impôts. Ainsi, un assureur qui s'exposerait aux risques d'inondation dans certaines zones pourrait bénéficier de l'absence totale d'impôts et de taxes en cas de profits. Cette mesure ne coûterait rien à l'état, et soulagerait ce dernier du lourd fardeau d'avoir à assumer les coûts en cas de catastrophe.
Une autre solution pour les propriétaires de maison pourrait consister à sélectionner des déductibles importants sur leur police d'assurance. Le propriétaire ''s'auto-assurerait''. Par exemple, ce montant pourrait aller jusqu'à 20 000$ ou plus. Dans un tel contexte, la banque pourrait devenir réticente à consentir une hypothèque, sachant que le propriétaire se retrouverait potentiellement dans l'incapacité de réparer les dommages de sa poche. Toutefois, ce problème serait vite enrayé par une hypothèque sur un bien quelconque. Il pourrait s'agir de l'équité restante sur la maison ou d'un compte marge sur les investissements boursiers. Moyennant un frais modique, la banque devrait consentir à accepter une garantie en échange du risque couru.
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com