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Un investisseur que nous venons de rencontrer est sur le point de lancer la serviette concernant les États-Unis. Son portefeuille est géré par un gestionnaire qui croit au présent potentiel de nos voisins du sud, alors que celui de sa femme est investi avec un gestionnaire qui affectionne plutôt le Canada. Comme les rendements obtenus par sa femme surpassent les siens, il lui est difficile de ne pas se remettre en question.
Il y a deux ans, il nous avait demandé notre avis. À l'époque, nous préférions les États-Unis. Cependant, la réalité est quelque peu différente de nos expectatives. La Canada a rebondi de façon spectaculaire. Et comme notre taux de change ne cesse de s'apprécier contre le dollar américain, les fonds canadiens affichent des rendements supérieurs. Notre investisseur associe cette suprématie des rendements grâce aux bonnes performances économiques du Canada. Le taux de chômage est peu élevé. Nos ressources naturelles sont convoitées par la Chine et notre immobilier se porte bien.
Or, l'investisseur utilise ces arguments afin d'expliquer pourquoi le Canada fera mieux que les États-Unis...dans le futur! Or, le taux de chômage ainsi que l'immobilier ne constituent point des signes précurseurs. Avant une crise, ils atteignent souvent leur meilleur niveau. Quant aux rendements dans les marchés canadiens, on ne peut s'y fier non plus. Cependant, la raison qui pousse cet investisseur à mettre en doute ces faits évidents, c'est le fait que notre opinion passée se soit avérée erronée.
La plupart des investisseurs associent l'évitement du risque à des prévisions. Par exemple, une mère peut dire à son enfant de ne pas jouer avec le feu. Si l'enfant du voisin le fait, mais qu'il ne se brûle pas, on n'en conclura pas nécessairement que la mère avait tort. Il s'agit ici d'un risque. Et pour mieux comprendre ce risque, on explique souvent les différents facteurs qui peuvent mener à des résultats indésirables.
Ces facteurs constituent uniquement des éléments augmentant le risque, ce qui signifie que le scénario craint peut ne jamais se produire malgré leur présence. En investissement, tout est une question de risques et de rendements potentiels. Warren Buffett juge que l'évitement du risque penche davantage dans la balance que le rendement potentiel. Selon nous, ce conseil tient compte du fait que la plupart des gens sont trop optimistes dans des situations risquées (et trop pessimistes dans des situations peu risquées, mais c'est un autre sujet!). C'est pourquoi on doit d'abord penser aux risques.
Lorsqu'une personne sort du casino avec de l'argent plein les bras, on développe rarement le réflexe de tenter de l'imiter. On attribue souvent ce type de gains à la chance. Malheureusement, nous n'avons pas assez d'une vie pour obtenir des statistiques suffisantes en peu de temps à la bourse. Il peut s'écouler 10 ans avant de voir un scénario se produire. Comme les temps changent, les historiques boursiers sont souvent marginalisés en faveur d'affirmations du genre ''cette fois-ci, c'est différent''. Au casino, un individu peut gagner aux jeux de hasard plusieurs fois d'affilée, mais au bout de quelques mois ou années, les statistiques finissent par avoir le dessus.
Éviter un risque ne constitue donc aucunement une prévision. Et l'important n'est pas d'avoir raison ou tort, mais plutôt de réussir à rentabiliser son portefeuille avec le minimum de risques. Il existe de très belles opportunités ailleurs. Par conséquent, loin de nous l'idée de laisser dormir des liquidités en attendant l'arrivée d'un scénario ''possible''! Nous sommes investis à 100%. Si nous avons tort concernant le Canada, nos portefeuilles seront tout aussi profitables.
Pour conclure, il s'avère extrêmement difficile pour tout investisseur d'appliquer les bons principes en bourse. Les risques perçus et les risques réels divergent incroyablement. Et nous sommes fréquemment surpris de lire ou d'entendre des experts se laisser leurrer par les rendements passés, tant sur le plan des gains boursiers que des indicateurs économiques. Si les experts se font prendre au jeu, peut-on blâmer les investisseurs plus ou moins néophytes d'en faire tout autant?