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À peine quatre mois se sont écoulés suite à la pluie de reportages et annonces qui envahirent les médias concernant JP Morgan Chase & Co (JPM), cette banque qui essuya une perte supposément ''colossale''. Nous faisons ici référence à la fameuse transaction qui occasionna une perte de plusieurs milliards de dollars. Cette position se révéla être difficile à fermer, étant donné sa taille. C'est pourquoi le financier responsable, Bruno Iskil, fut baptisé ''London Whale''.
Dans le marché des produits dérivés, il s'agissait certes d'une position énorme. Au 13 juillet dernier, alors que la banque annonçait les résultats du 2e trimestre, la perte s'élevait à 5.8G$. La taille de cette perte peut faire frémir bien des personnes, surtout les gens qui ne sont pas familiers avec les états financiers des grandes sociétés. Ceux qui suivent régulièrement les résultats de cette institution auront plutôt le réflexe de mettre cette perte en perspective. JP Morgan a généré des profits d'opérations totaux d'environ 165G$ lors des dix dernières années. Seulement l'an passé, ces profits s'élevaient à près de 27G$.
Certes, la perte d'investissement peut difficilement être qualifiée de ''négligeable''. Toutefois, lorsque nous visionnions la populaire chaîne de nouvelles financières ''CNBC'', nous constations que ce sujet occupait pratiquement toutes les conversations. À entendre parler les commentateurs, nous avions l'impression que la santé financière de la banque était en péril. Le gouvernement s'était également joint à ce vent de panique, alimentant les inquiétudes des investisseurs et de la population. Nous avions droit à des affirmations du genre : ''Cette perte constitue la preuve que le système financier demeure fragile et doit être revu pour éviter la prochaine crise'', ''Jamie Dimon, le chef de la direction, doit être congédié sur-le-champ'' ou encore ''Une perte d'une telle ampleur ne devrait jamais survenir''.
Or, les différentes personnes interviewées effectuaient un rapprochement entre cette perte, et la possibilité que la banque demande à nouveau l'aide de l'état pour survivre. Notons ici que jamais cette banque n'a demandé l'aide du gouvernement! Et lorsque d'autres intervenants argumentaient à l'effet que JP Morgan affichait un bilan solide comme le roc, capable d'absorber de telles pertes, on aimait répliquer haut et fort : ''Oui, mais, si cela était arrivé à une banque moins solide?''.
Bref, toutes les raisons semblaient justifiées pour condamner la direction et remettre en question le modèle d'affaires de la banque. Le titre fut malmené en bourse, passant de 46$ à 31$. Toutefois, la suite s'avèra surprenante. La sortie tant attendue de Facebook (FB) en bourse engagea toute l'attention des médias. La question consistait à savoir jusqu'où s'apprécierait le titre après sa sortie à 38$ l'action. Pourquoi gaspiller du temps sur une histoire qui commençait à être usée alors qu'un événement bien plus excitant et prometteur se produisait?
Quelques mois plus tard, Facebook a fondu de moitié. Et JP Morgan? Nous assistons au silence complet! La perte ne s'est pas effacée comme par miracle. Elle a bel et bien eu lieu. Sa taille est demeurée ''gigantesque''. Pourtant, le titre a emprunté le chemin inverse de celui de Facebook, en clôturant à plus de 39$ vendredi dernier. Ce gain n'impressionnera peut-être pas les investisseurs les plus aventureux. Néanmoins, il faut avouer que la banque n'effraie plus les actionnaires!
Quelle leçon doit-on en retirer? Dans bien des cas, la bonne attitude à adopter constitue l'inverse de l'humeur générale. Lorsque tout le monde s'inquiète, une aubaine est peut-être en train de se former. Et nous pouvons affirmer que pour les grandes corporations, qui sont constamment suivies par un nombre incroyable d'analystes et d'intervenants, seules la peur et la panique créent des prix assez intéressants pour les investisseurs qui recherchent une marge de sécurité dans tous leurs titres. À nous d'en tirer avantage!
P.S.: Ce matin vers 10h, après que nous ayons terminé les dernières lignes de ce blogue, quelques intervenants ont discuté des banques américaines sur la chaîne CNBC. L'un d'entre eux recommandait JP Morgan. Et vous l'aurez deviné : pas un seul mot sur le London Whale!