Afin d'obtenir de bons rendements en portefeuille, il peut paraître tout naturel de chercher à détenir les mêmes titres que les gestionnaires qui connaissent du succès depuis longtemps. Les investisseurs qui ont suivi de près l'investissement de Warren Buffett dans la société Tesco PLC ont peut-être été en proie à un réveil brutal s'ils avaient tenté de l'imiter sans tenir compte de sa pondération en portefeuille. On apprend tout récemment que Berkshire Hathaway a enregistré une perte de 678M$ au dernier trimestre après avoir vendu des actions de cette société.
Or, au début de l'année 2012, Berkshire Hathaway avait sensiblement augmenté son investissement dans Tesco. Le conglomérat de M. Buffett se retrouvait maintenant avec plus de 5% du géant épicier britannique, qui constitue le plus gros joueur domestique de son secteur. À l'époque, l'analyse Clive Black de Shore Capital souligna le signal important créé par le geste de l'oracle d'Omaha. En achetant une position significative dans cette société, on rassure les investisseurs qui se seraient autrement inquiétés du fait que Tesco annonçait alors des temps difficiles.
Pour certains, il s'agit d'une marque de confiance importante démontrée par un grand investisseur. Si Buffett le fait, pourquoi pas vous?
Tenir compte du portefeuille global
Tout d'abord, il s'avère impératif de placer cet investissement dans son contexte. Lorsque M. Buffett entama une position dans Tesco, cela représentait environ 2,9% de cette société. Ironiquement, il s'agissait aussi du même pourcentage du portefeuille boursier de Berkshire. Comme le titre ne s'est pas apprécié à long terme, depuis l'initiation de la position en 2006, la valeur de cet investissement par rapport au portefeuille de Berkshire diminua. À la fin de l'année 2011, il représentait environ 2,4% contre 2,9% en 2006, et ce, malgré l'ajout de nouvelles actions lors des années précédentes.
À la fin de l'année 2012, bien que la position de Berkshire s'éleva à plus de 5% de Tesco, il ne s'agissait que de 2,6% du portefeuille boursier. Autrement dit, on avait beaucoup plus d'actions qu'au début, mais le résultat final démontrait plutôt une baisse de la position en termes relatifs.
Au cours de 2013, M. Buffett procéda à la liquidation de plusieurs actions, amenant ainsi le pourcentage détenu de Tesco à 3,7%. Ce chiffre surpasse les 2,9% initiaux. Toutefois, dans le portefeuille boursier de Berkshire, on assistait à tout le contraire. La position pâlissait avec son maigre 1,4% à la fin de 2013, soit moins de la moitié comparativement à la position initiale. Par conséquent, l'effondrement des actions de Tesco ont exercé peu d'impact sur le portefeuille global, malgré la perte annoncée tout récemment.
Nous avons démontré ci-haut que la taille de l'investissement dans la société britannique s'avérait un montant que nous considérons personnellement peu significatif. Les médias rapportent souvent des commentaires teintés d'enthousiasme ou de pessimisme, sans trop tenir compte de l'important contexte dans lequel on doit les considérer. Un investisseur imprudent aurait pu commettre 10% ou plus de ses épargnes dans Tesco, étant confiant grâce à l'approbation implicite du célèbre milliardaire américain. Toutefois, la société connaît des temps difficiles. Avec la faible pondération dans le portefeuille de Berkshire Hathaway, la perte n'est pas alarmante. Ce n'est peut-être pas le cas pour ceux qui l'avaient imité!
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com