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La compagnie LinkedIn, qui oeuvre dans le réseautage social, a été lancée en bourse aujourd'hui. Le titre a explosé (pour plus d'informations) de façon spectaculaire. Les grands gestionnaires institutionnels ont pu rafler le titre à 45$. Lors de l'ouverture des marchés boursiers ce matin, ils avaient la possibilité de revendre le titre à 83$ et plus, pour un petit gain de 84% en très peu de temps. Un article du site CNBC relate le fait qu'encore une fois, les grands de ce monde ont profité des pauvres petits investisseurs!
Voici comment cela se passe. Tout d'abord, les propriétaires de l'entreprise privée approchent une firme d'envergure afin de se lancer en bourse (ou eux se font approcher, car tout le monde gagne dans ce genre de transaction). Dans le cas de LinkedIn, il s'agit de JPMorgan, Morgan Stanley et Bank of America. Ces dernières s'adressent ensuite à des gestionnaires qui détiennent de grandes quantités de fonds, afin d'écouler les actions à vendre. Ces gestionnaires se voient offrir les actions en priorité, puisqu'ils peuvent investir de fortes sommes. De cette façon, la vente des actions est garantie, puisque l'on connaît d'avance l'intérêt pour l'entreprise. Qui plus est, il s'avère beaucoup plus simple de vendre de gros blocs d'actions, plutôt que de miser sur l'intérêt futur de milliers d'actionnaires pour le titre.
Le 9 mai dernier, on évaluait l'entreprise à 3,3G$. Les derniers profits annualisés s'établissaient à environ 15M$, ce qui résulte en un ratio cours-bénéfice de 220. Ce chiffre semble élevé. Personnellement, nous le trouvons astronomique. Néanmoins, LinkedIn connaît une croissance rapide de ses ventes, qui augmentent de plus de 100% par an. Il s'avère donc difficile de se prononcer sur l'évaluation, puisque tout repose sur la croissance future.
Finalement, l'entreprise fût réévaluée à la hausse avant de procéder à l'offre initiale, à plus de 4G$. Les actions ont donc été vendues à 45$. Le titre a clôturé aujourd'hui à 94$. Comme le titre a ouvert fortement en hausse (83$), les petits investisseurs ont payé le gros prix pour s'accaparer d'un petit morceau de cette entreprise prometteuse, alors que les gestionnaires institutionnels empochent de beaux profits! On crie à l'injustice. On s'abjecte du fait que les fonds mutuels aient pu acquérir le titre à près de 300 fois les profits, alors que les petits investisseurs ont dû payer entre 530 et 600 fois. Pendant ce temps, il existe plusieurs entreprises disponibles à moins de 10 fois les profits sur le marché!
Nous devons reconnaître que LinkedIn affiche une croissance des revenus exceptionnelle. Le titre mérite donc une évaluation beaucoup plus élevée que les aubaines que nous retrouvons sur le marché. Mais revenons à la disparité entre le prix initial et le prix en bourse. Est-il logique que les institutions aient payé 45$ par action, si le titre valait en réalité beaucoup plus? Lors d'une émission d'actions, les propriétaires de la compagnie cherchent à maximiser la rentrée d'argent grâce au financement public. S'ils avaient pu obtenir 150$ par action, ils l'auraient fait. Mais dans les faits, le prix de 45$ était probablement déjà très généreux. Comme les gestionnaires savent que les petits investisseurs s'attardent rarement à des calculs rationnels lors d'une nouvelle émission, ils ont sûrement été volontaires pour payer un prix plus élevé. Ils étaient bien conscients de la possibilité de rafler un gain à court terme.
Qui plus est, si on blâme les institutions de profiter d'un prix moindre, on devrait également blâmer le petit investisseur s'il avait eu la chance d'acheter au prix initial. Ce dernier aurait réalisé un beau profit, mais sur le dos d'un autre petit investisseur. On doit donc comprendre que la folie furieuse lors de telles émissions n'est créée que par les investisseurs eux-mêmes. On achète d'abord, on réfléchit ensuite. Cette tactique est si répandue que les institutions peuvent acquérir d'abord les actions à un prix presque raisonnable, pour les revendre tout de suite à un prix totalement insensé.
Si on se fie à l'évaluation actuelle en bourse de LinkedIn, l'entreprise vaut environ 9G$. Nous serions très surpris si le petit investisseur se disait :''J'achète une part d'une compagnie qui vaut 9G$, et qui fait actuellement 15M$ de profits''. Nous pensons plutôt qu'il résonnait ainsi : ''Je souhaite vite acheter ces actions afin de réaliser un gain rapide!'' Ou encore, le raisonnement pourrait être qu'il croit que s'il n'achète pas maintenant, il n'aura jamais la possibilité de le faire plus tard à un prix raisonnable. L'ennui, c'est que le prix est ''déjà'' déraisonnable! Lorsque tout le monde court vers une direction en bourse, on doit s'habituer à choisir ou au moins considérer la direction opposée! Dans le cas de LinkedIn, nous croyons qu'il valait mieux s'abstenir. Mais l'appât du gain est trop élevé!
Certes, ceux qui ont saisi le titre à 83$ avaient l'opportunité de le revendre à 122$ durant la journée. Tout semble arriver afin de ne pas dissuader les petits investisseurs d'éviter de verser dans la spéculation! Mais pour terminer sur une note de sagesse, on doit ignorer ce type de gain dénué de toute rationalité. Comme le disait Isaac Newton, célèbre mathématicien et physicien : ''Je peux mesurer le mouvement des corps, mais je ne peux pas mesurer la folie des hommes''.