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Lorsque les marchés plongent, les investisseurs sont inquiets et anxieux. Un tel contexte peut faire naître le désir de vouloir ''profiter'' des baisses du marché plutôt que d'en être victimes.
On pourrait également souhaiter amortir les variations de son portefeuille, en détenant des titres qui engendrent des profits lorsqu'ils baissent. Ainsi, lors d'une correction boursière, une partie du portefeuille est emportée par la chute boursière, mais l'autre partie compense en déclenchant un certain profit. N'est-ce pas merveilleux? C'est pourquoi la vente à découvert attirera toujours beaucoup d'adeptes.
Steve Eisman, le fondateur du fonds de couverture Emrys Partners, effectua un pari contre l'immobilier américain en 2008. Après un succès retentissant, il suggère aujourd'hui un pari semblable sur l'immobilier canadien.
Cet article (cliquer ici) mentionne entre autres qu'un fonds de couverture californien aurait misé 95% des actifs de ses clients dans des instruments financiers qui profiteront de l'effondrement des banques et du dollar canadien.
La vente à découvert consiste à vendre un titre que l'on ne possède pas, dans l'espoir de le racheter à un prix inférieur plus tard. Comme on ne détient point le titre, on doit recourir à un emprunt de titres, généralement auprès de son courtier.
Pour pouvoir exécuter cette stratégie, le titre doit être disponible dans l'inventaire du courtier, soit parmi ses clients ou pour son propre compte. C'est pourquoi le courtier ne peut garantir que la stratégie pourra être maintenue durant tout le temps souhaité par le vendeur à découvert. À tout moment, ce dernier peut se retrouver dans l'obligation de racheter le titre à la bourse (afin de ''rembourser'' son emprunt), même si cela lui occasionne une perte.
Voilà un risque significatif qui s'avère inexistant avec la simple détention d'un titre. Lorsque vous possédez des actions, votre courtier ne peut pas vous obliger à les vendre au mauvais moment. La vente à découvert expose l'investisseur à ce type de risque.
Toutefois, même en l'absence de ce risque, nous éprouvons de la difficulté à dénicher des moyens efficaces d'engendrer des profits avec cette stratégie, particulièrement dans le cas d'un éventuel effondrement du marché immobilier canadien.
Prenons l'exemple de la banque TD, qui en tant que banque canadienne, est exposée à ce type de risque. Elle a généré plus de 30G$ de profits avant impôts depuis 2009. Le ratio de levier (prêts sur équité nette) s'est amélioré depuis 2008. En d'autres termes, la banque s'est quelque peu renforcée. Donc, un individu qui aurait amorcé la vente à découvert en 2009, au moment où les actions avaient fortement rebondi, aurait perdu environ 30% de la somme en jeu. En outre, il aurait fallu débourser tous les dividendes payables à tous les trois mois.
Or, on pourrait très bien conserver la position à découvert en se disant que tôt ou tard, le carnage surviendra. Toutefois, le temps joue contre soi : chaque trimestre où un profit est déclaré repousse à plus loin le fameux moment fatidique.
Bien sûr, les vendeurs à découvert parviendront parfois à trouver le moment idéal pour amorcer leur vente. En moyenne cependant, prédire un scénario peut devenir coûteux! En effet, on doit tenir compte du coût d'opportunité. Pendant que l'on attend d'avoir raison, on rate d'importantes occasions d'acheter des titres sous-évalués, puisque la plupart des courtiers exigent une marge suffisante afin de couvrir le risque lié à cette stratégie.
Nous ne prévoyons pas des jours roses pour le Canada, mais nous ne tentons pas non plus de parier sur un scénario quelconque. Il ne s'agit pas ici de sagesse excessive, mais simplement d'un raisonnement logique nous conduisant à la conclusion qu'en l'absence d'un certain degré de certitude, nous préférons nous en tenir à des stratégies qui fonctionneront peu importe ce qui surviendra dans notre pays.
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com