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Dans un blogue précédent (voir blogue), nous discutions des intentions des banques face à la nouvelle législation. C'était en janvier dernier. Un peu plus tôt, en décembre 2010, les autorités avaient annoncé qu'elles limiteraient les frais de carte de débit à 12 cents par transaction, au lieu de la moyenne de 44 cents qui prévalait antérieurement. On se rappellera que les marchands ont longtemps combattu afin de détruire le duopole des deux géants Visa et Mastercard, et ainsi récupérer une bonne partie des profits engendrés par les banques qui participent au réseau de ce duopole. On se plaignait entre autres des frais élevés qu'il faut débourser pour l'utilisation des cartes Visa et Mastercard. Après une longue bataille, les marchands ont eu gain de cause. Les banques avaient donc riposté en dévoilant leurs intentions d'augmenter les frais ailleurs afin de compenser pour les pertes infligées par la nouvelle législation.
Finalement, après un long débat au gouvernement américain, les limites de frais ont été révisées à la hausse à 21 cents, plus 1 cent pour la prévention de fraudes, ainsi que 0,05% du montant de la transaction. Alors que le montant moyen des transactions s'élève à 38$, on obtient environ 24 cents, soit 100% supérieur à limite établie antérieurement. Malgré cette amélioration, les banques poursuivent leur stratégie qui consiste à faire payer les consommateurs pour combler les revenus qui provenaient des marchands avant la réforme.
SunTrust Banks, une banque bien présente dans le sud-est des États-Unis, charge maintenant un frais de 5$ par mois pour les comptes où la carte de débit est utilisée. Wells Fargo compte emboîter le pas en procédant à un test dans 5 états, en débutant avec un frais de 3$ par mois, en sus des frais réguliers qui oscillent entre 5$ et 30$.
D'un côté, les frais augmentent, et tout laisse croire qu'ils s'élèveront progressivement jusqu'à ce que les banques puissent engendrer des profits intéressants sur leurs opérations. De l'autre côté, on coupe dans les récompenses. Bank of America, Chase et PNC Financial ont récemment annulé leur programme de récompense.
Ici au Québec, nous n'avons pas l'habitude d'obtenir des points de récompense sur nos cartes de débit, contrairement aux cartes de crédit. Notre législation limite fortement les frais qui peuvent être prélevés. C'est pourquoi seules les cartes de crédit ainsi que les cartes qui accompagnent nos achats chez les marchands participants (ex : air miles) offrent l'accumulation de récompenses.
On pourrait penser que les autorités ou les regroupements de consommateurs tenteront de faire pression afin de freiner l'offensive des banques. Les consommateurs ne seront certainement pas heureux lorsqu'ils réaliseront qu'ils sont les grands perdants de la dispute entre les banques et les marchands. Cependant, les banques peuvent facilement justifier leur geste, car elles doivent affronter des vents contraires. En plus d'avoir à respecter les différentes lois mises en place pendant la crise, elles s'efforcent de maintenir ou d'accroître leur profit malgré la lente reprise économique. Et ces difficultés sont évidentes, puisque plusieurs d'entre elles ont annoncé d'importants congédiements à venir.
Parmi les banques et autres institutions financières qui comptent utiliser les mises à pied pour réduire leurs coûts, nous avons : ABN Amro, Barclays, Bank of New York Mellon, Credit Suisse, Goldman Sachs, HSBC, Lloyds, State Street et Wells Fargo. Depuis le début de la crise (2006), le nombre d'employés de l'industrie financière s'est effondré de 11% selon Moody's Analytics.
Parfois, l'établissement de nouvelles règles contraignantes requiert l'embauche de nouveaux employés afin de consacrer du temps à la compréhension et à la mise en place de ces règles. Cependant, ces emplois contribuent beaucoup moins au développement économique que les emplois reliés aux activités principales de l'entreprise. Les fonds affectés à la conformité ne permettent pas à une compagnie de croître. Dans le cas des banques, ces dépenses ne créent pas davantage de prêts. Sans financement disponible à coût raisonnable, certaines entreprises (les clients des banques) doivent freiner leur expansion. Par conséquent, beaucoup d'opportunités d'embauche sont délaissées. Il ne faut pas s'étonner du fait que le taux de chômage reste élevé aux États-Unis!
Pour conclure, il ne serait pas étonnant de voir plusieurs consommateurs utiliser davantage les cartes de crédit aux États-Unis, afin de profiter des programmes de récompenses. Certains d'entre eux figureront parmi ceux qui gèrent mal leurs dépenses. En délaissant la carte de débit pour la carte de crédit, ils risquent d'être influencés à s'endetter.