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Un jour, un néophyte de la finance nous entendit dire qu'une telle entreprise avait acheté sa rivale, en raflant ses actions à un prix X. Il nous demanda alors : ''A-t-elle acheté la compagnie ou seulement ses actions?''. Il arrivait mal à faire le rapprochement entre les deux. Lorsqu'une entreprise achète toutes les actions d'une autre entreprise, c'est directement comparable à l'achat d'un commerce.
Or, en bourse, les petits investisseurs que nous sommes n'achètent que des petites parties d'entreprises. Au blogue précédent, un lecteur souhaitait que nous établissions les différences majeures entre l'investissement en bourse (acheter des parts d'entreprise) et l'achat de commerces (achats entiers d'entreprises). Bien qu'il existe une similitude entre les deux, on dénote des différences importantes. C'est pourquoi nous nous attarderons sur les particularités de la bourse par rapport à la détention pure et simple d'un commerce. Nous en avons relevées 9, mais il en existe bien d'autres.
1) À moins d'être actionnaire majoritaire, on ne choisit pas ses dirigeants. C'est comme un forfait : on prend tout ou rien. Pour un investir passif, c'est parfois un avantage. Il n'est pas nécessaire de trouver soi-même les candidats appropriés, même si parfois on voudrait bien remplacer la direction!
2) Il faut seulement quelques secondes pour acheter un titre. Voilà tout un avantage en faveur de la bourse! Pour acquérir un commerce, il faut généralement prévoir plusieurs mois. Pour certains investisseurs, la vitesse des transactions boursières constitue un grand désavantage, puisqu'ils omettent souvent de faire leurs devoirs.
3) La bourse affiche quotidiennement une valeur de l'entreprise. C'est pourquoi on peut consulter le graphique boursier du franchiseur McDonald's, mais pas celui d'un restaurant McDo en particulier. Les cotes boursières ont par conséquent donné naissance à l'analyse technique, ainsi qu'à toutes sortes de façons de tirer profit des fluctuations boursières. Tout comme pour le point numéro 2, ces fluctuations peuvent jouer des tours aux investisseurs. C'est d'ailleurs la raison principale qui explique pourquoi tant de gens voient les titres boursiers, mais pas les entreprises qu'ils représentent.
4) On peut acheter des titres boursiers dans son REER, mais pas un commerce.
5) À la bourse, on peut acheter ou vendre progressivement. Nous aimons beaucoup cet avantage. Nous pouvons débuter avec ce que nous appelons ''une position de départ''. Nous continuons ensuite l'étude de l'entreprise, et nous augmentons progressivement le nombre d'actions. Pour un commerce, il serait étonnant qu'un vendeur accepte de vendre 10% de son entreprise seulement, et de se faire dire ''nous allons continuer d'acquérir votre entreprise seulement si nous l'aimons'' !
6) En bourse, le talent nécessaire pour réussir consiste à trouver et bien évaluer des entreprises. Il n'est point nécessaire de les opérer ou de les diriger, ce qui permet de concentrer davantage ses efforts sur la recherche. On doit également connaître plusieurs domaines d'affaires, mais sans nécessiter autant de profondeur qu'un dirigeant d'un commerce. Par exemple, nous détenons des actions de Gencor (GENC-Q). Nous aimons particulièrement son bilan. Nous savons qu'ils fabriquent des équipements pour produire de l'asphalte pour les routes, entre autres. Nous n'avons pas besoin de savoir comment opérer les installations nécessaires pour fabriquer ce type de produit. Nous prenons pour acquis que le personnel et les dirigeants en place ont ces connaissances.
7) Grâce à la bourse, on peut investir à partir de chez soi. Il serait hasardeux pour un commerçant d'acquérir une entreprise sans quitter sa maison!
8) À la bourse, on ne contrôle pas le niveau d'impôts payés par l'entreprise, ni les changements au niveau de l'actionnariat (options, émissions d'actions, etc). Avec un commerce, il existe plusieurs stratégies possibles pour bien planifier l'impact fiscal sur ses revenus personnels. Dans une entreprise publique, les dirigeants ont plutôt tendance à favoriser l'adoucissement des résultats. Il s'agit de contrebalancer les pertes par des gains, afin de ne pas créer de chocs trop brutaux pour les actionnaires. L'inverse est vrai : lorsque l'entreprise connaît de sérieux ratés, les dirigeants optent souvent pour un grand ménage, favorisant la chute du titre. Et trop souvent, ils en profitent pour s'octroyer des options lorsque le titre atteint des niveaux ridicules. Avec un commerce, le propriétaire garde le plein contrôle sur l'actionnariat (pas d'options) et sur les impacts fiscaux.
9) Bien qu'à la bourse, vous possédez effectivement une ''part'' d'entreprise, vous ne pouvez pas vous comporter comme si elle vous appartenait. Imaginez un seul instant si vous aviez le droit d'aller au siège social d'une entreprise pour vous emparer d'une chaise ou d'une table, en prétextant que vous possédez au moins 0,1% de tout l'ameublement par le biais de vos actions!
Il existe bien d'autres petites différences, mais essentiellement, on doit adopter une attitude similaire face à ces deux options si l'on souhaite s'enrichir de façon importante. Personnellement, nous investissons à la bourse, et nous n'avons pas encore acquis d'entreprise en entier. C'est cependant un objectif à moyen ou long terme pour nous. Nous pourrons alors peaufiner nos connaissances dans plusieurs domaines. Warren Buffett a l'habitude de dire que le fait de posséder et contrôler des entreprises privées l'aide à mieux comprendre la bourse, alors que cette dernière l'aide également à mieux comprendre le monde des affaires. Nous préconisons donc les deux véhicules financiers (bourse et achat de commerces) pour s'améliorer davantage.