BLOGUE. Nous craignons un ralentissement important au Canada depuis longtemps, et nous nous interrogeons sur ses conséquences. Rappelons-nous du mouvement Occupy Wall Street qui éclata en septembre 2011: on décria l'important fossé entre les personnes qui se situent dans les 1% plus riches par rapport aux autres. Plusieurs statistiques viendraient appuyer cette réalité.
Malheureusement, nous estimons que cet écart s'agrandira dans la prochaine décennie. À moins d'un profond changement dans la mentalité des gens en général, il nous est difficile de ne pas entrevoir un appauvrissement de la classe moyenne. Un des grands facteurs qui contribueront à ce phénomène réside dans l'immobilier.
Pour un grand nombre de familles qui se considèrent comme étant dans cette classe, la résidence principale constitue l'actif le plus important. Si le prix des maisons chute, quel sera l'impact au niveau de la répartition de la richesse dans le pays? Cet article (cliquer ici pour le lire) suggère que la grande récession contribuerait à son aggravation. Toutefois, l'immobilier a tenu bon, et bien des ménages ont bénéficié d'un coup de main appréciable. Qu'en serait-il si la situation changeait?
Lors d'une récession, toutes les classes souffrent d'une manière ou d'une autre. Les personnes les plus aisées voient la valeur de leurs entreprises s'effondrer. Leurs actions en bourses sont souvent également affectées. Quant à la classe moyenne, une chute du prix des maisons aura tendance à fortement détériorer la valeur nette des foyers, puisque la résidence principale s'avère trop souvent l'actif le plus important. En outre, cet actif est souvent grevé d'une hypothèque, ce qui accroît l'impact des variations immobilières.
Lorsque les propriétaires d'entreprise voient leur chiffre d'affaires s'effriter, ils procèdent à des congédiements. Les gens de la classe moyenne sont donc directement affligés par la perte de leur emploi. Voilà donc un double choc : la baisse de l'immobilier sera fréquemment accompagnée de la disparition du revenu principal. Plusieurs ménages ne seront plus en mesure d'effectuer leurs paiements hypothécaires, et devront perdre leur maison.
Qu'en est-il des gens les plus fortunés? Certes, ils souffriront également. Toutefois, ils jouissent d'une certaine diversification de leurs actifs. Ils détiennent probablement des investissements un peu partout : actions, obligations et immobilier. Nul doute qu'ils bénéficieront d'une diversification ''géographique''. S'ils possèdent des actifs aux États-Unis, ceux-ci ne seront pas nécessairement entraînés par une récession canadienne.
Si un important ralentissement survient au Canada, ces personnes pourront même saisir des biens immobiliers ou des commerces à prix alléchants au coeur de la récession, simplement en liquidant les biens qu'ils détiennent à l'étranger. Une famille de la classe moyenne dispose rarement de cet avantage.
Peut-on prévenir l'accroissement de l'écart entre riches et moins riches? Pour y arriver, nous pensons qu'une résidence principale ne devrait jamais être considérée comme un investissement. Trop souvent, nous entendons des justifications de toutes sortes pour débourser de l'argent en ayant recours au crédit. ''C'est vrai, 20 000$ pour une cuisine plus belle, c'est cher; mais dans le fonds, c'est un investissement!''. Ce genre de raisonnement conduit à la catastrophe. Non seulement on néglige d'investir dans sa retraite (actions, obligations et autres), mais en plus, on crée une dette pour effectuer une importante dépense!
Si vous êtes aisé financièrement, et que votre maison représente moins de la moitié de votre valeur nette, il y a fort à parier que vous raisonnerez de façon différente. Lorsque l'on engendre des gains ou des revenus par le biais de ses investissements, on peut plus facilement établir une comparaison équitable et réaliser qu'une dépense demeure une dépense. Malheureusement, la forte montée de l'immobilier lors de la dernière décennie a contribué à une augmentation significative de l'affectation des revenus aux dépenses de la maison (achat et rénovation) chez la classe moyenne. Un ralentissement de notre économie ainsi qu'une baisse du prix des maisons exerceront un impact considérable sur leurs finances. L'écart de richesse ne peut donc que s'agrandir par rapport aux mieux nantis. Qu'en pensez-vous? Êtes-vous plus optimiste sur la question?
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com