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Beaucoup d'encre continue de couler au sujet des problèmes en Europe. Nous prévoyons que la situation persistera encore pendant quelques années. Et actuellement, nous assistons à une certaine restructuration des sociétés les plus solides. Elles tendent à migrer des pays en difficulté vers des contrées plus vertes.
Tout récemment, l'embouteilleur Coca-Cola Hellenic, détenu à 23% par le grand fabricant de la populaire boisson gazeuse Coca-Cola, déménage son siège social. L'entreprise quitte la Grèce pour s'installer en Suisse, et son titre sera dorénavant inscrit à la bourse de Londres. Or, ce titre à lui seul représentait environ 20% de la valeur boursière grecque.
Cette prise de décision n'a pas été influencée par les consommateurs grecs. Comme 95% des revenus proviennent de l'extérieur du pays, les problèmes de ce dernier exercent peu d'impact sur ses recettes. Toutefois, les grandes sociétés doivent considérer le climat fiscal et financier dans leurs décisions d'affaires. La Suisse est plus attrayante, et la bourse de Londres offre un marché boursier beaucoup plus liquide. La récente décision de Coca-Cola Hellenic empirera le phénomène. Chaque fois qu'une société quitte le navire grec, la bourse du pays perd un peu plus de son efficacité, et les recettes fiscales s'amenuisent. Une très mauvaise tendance se crée, alors que d'autres entreprises évalueront la possibilité de se joindre au mouvement de migration.
Une importante entreprise de produits laitiers, FAGE, avait également annoncé en octobre qu'elle allait s'installer au Luxembourg. Créée en 1926 en Grèce, FAGE est devenue une multinationale d'envergure, avec environ le deux tiers de ses revenus provenant de l'extérieur du pays. Au Luxembourg, l'environnement financier s'avère plus favorable. On y jouit d'un meilleur niveau de taxation ainsi que de meilleures conditions de financement.
Un jeune grec ayant perdu son emploi depuis des mois, réagit en ces termes : ''C'est enrageant lorsque le gouvernement (grec) exige des gens pauvres de faire plus de sacrifices pour se sortir de la crise, alors que les riches, en particulier les Grecs, tournent le dos au pays au pays après y avoir fait fortune!''
Voilà le genre de réaction que nous lisons ou entendons souvent. Beaucoup de gens sont dépassés par les événements, et assistent impuissants à l'effondrement de leur pays. Face à la frustration de la situation, ils invoquent des aspects émotionnels afin de décrire le comportement des grandes entreprises. Un entrepreneur qui réussit dans un pays n'a pas de dettes envers celui-ci. Il a dû assumer des risques au départ, soit en empruntant, ou en finançant son projet avec son propre argent. Par la suite, son entreprise a payé de l'impôt et a créé des emplois. On pourrait donc aussi affirmer le contraire : le pays est redevable face aux entrepreneurs!
Une importante leçon est enseignée dans ces décisions d'affaires. La Suisse, le Royaume-Uni, le Luxembourg et quelques autres pays possèdent des attributs et des politiques qui sont absentes chez les pays en voie d'effondrement. Par exemple, on y favorise le financement et les inscriptions à la bourse. Or, bien des pays d'Europe concentrent leur attention sur les causes de la crise, et agissent à l'inverse des pays qui bénéficient de la situation. Comment la Grèce peut-elle s'en sortir avec un tel climat? Elle coupe dans les dépenses, parce que sa situation financière l'y oblige. La seule façon de compenser pour les pertes de revenus que ces coupes engendrent réside dans des actions et prises de décisions musclées favorisant la création d'entreprises. Ayant accusé un énorme retard en la matière, un pays tel que la Grèce devra subir des transformations extrêmes, et tenter de devenir ''plus'' compétitif que les autres afin de renverser la vapeur.
Mme Christine Lagarde, la directrice générale du FMI, a déclaré récemment que les mesures d'austérité ne fonctionnaient pas. Toutefois, il semble que la leçon soit difficile à apprendre. Pour remplacer les dépenses de l'état, on doit nécessairement compenser avec un apport équivalent dans le secteur privé. Sans cette compensation, le déficit ne peut qu'empirer! En attendant, quelques pays profitent fortement du phénomène, et récoltent les meilleurs actifs et entreprises des pays en voie d'effondrement. Nous assisterons donc à une disparité économique grandissante entre ces deux camps.